Moyen-Orient

Armement et financement… Israël reproduit-elle l’expérience de  l’Armée de Lahad à Gaza ?


Israël semble reproduire son expérience du Sud-Liban des années 1970, connue sous le nom de « l’Armée de Lahad », en armant et finançant des groupes armés palestiniens à Gaza.

L’ancien ministre israélien de la Défense et chef du parti d’opposition « Israël Beiteinu », Avigdor Lieberman, a créé la surprise en révélant qu’Israël armait des groupes palestiniens à Gaza.

Mais le plus surprenant fut la reconnaissance de cette opération par le Premier ministre Benjamin Netanyahou lui-même, qui en a même tiré une certaine fierté.

Dans une vidéo diffusée jeudi soir par son bureau, Netanyahou a déclaré : « Après concertation avec les responsables de la sécurité, nous avons tiré parti des clans à Gaza opposés au Hamas. »

Et de s’interroger : « Qu’y a-t-il de mal à cela ? C’est une bonne chose. Cela sauve des vies de soldats israéliens. » Il a toutefois ajouté : « Ce qui est réellement dangereux, c’est que Lieberman ait dévoilé cette opération… La rendre publique ne sert que le Hamas. »

Le site d’information « Times of Israel » a confirmé jeudi que des sources sécuritaires israéliennes avaient reconnu qu’Israël armait un groupe criminel dans la bande de Gaza dans le but de renforcer l’opposition au Hamas.

Lieberman avait déclaré à la radio publique israélienne que Netanyahou avait approuvé seul le transfert d’armes au clan Abou Chabab, un groupe armé opposé au Hamas dans la bande de Gaza.

Il a accusé le gouvernement israélien de fournir des armes à un groupe de criminels affiliés à Daech, sur ordre du Premier ministre.

« À ma connaissance, cette décision n’a pas été approuvée par le cabinet », a-t-il affirmé, précisant que le chef du Shin Bet (Ronen Bar) était au courant, mais qu’il ignorait si le chef d’état-major de l’armée israélienne avait été informé.

Gang ou milice ?

« The Times of Israel » a précisé que ce groupe, qualifié tantôt de milice, tantôt de gang criminel, est dirigé par Yasser Abou Chabab, membre d’une grande tribu du sud de Gaza.

Ce groupe a été précédemment impliqué dans des opérations de contrebande avec des organisations terroristes. Il n’est toutefois pas clair pourquoi Lieberman l’a lié à Daech.

Des images récentes diffusées par Abou Chabab montrent ses hommes près du point de passage de Kerem Shalom, habillés en tenues militaires, arborant le drapeau palestinien et une inscription : « Unité de lutte contre le terrorisme ».

La radio publique israélienne a indiqué qu’Israël avait récemment fourni des armes légères à des groupes opposés au Hamas, dans le but de leur permettre de se défendre et de rétablir un équilibre sur le terrain.

Cette opération aurait été décidée par Netanyahou sans consulter l’ensemble du cabinet de sécurité ou certains services de renseignement.

Un communiqué du bureau du Premier ministre a déclaré : « Israël agit de différentes manières pour vaincre le Hamas, selon les recommandations de tous les chefs des services de sécurité. »

Armes, équipements et argent

Le sujet a pris encore plus d’ampleur après une interview télévisée jeudi soir avec un agent israélien ayant participé à l’opération de livraison d’armes à Gaza.

Son nom n’a pas été révélé, mais ses propos ont été marquants : « Il s’agit d’une unité militaire qui reçoit ses ordres du haut commandement et qui arme des groupes sur le terrain à Gaza, en lien avec des officiers du Shin Bet. »

Il a poursuivi : « Cela a été fait à la demande du renseignement militaire (Aman) et du Shin Bet. Je ne connais pas le nombre exact d’opérations, mais je pense qu’il y en a eu plusieurs dans différentes zones de Gaza. »

Il a précisé : « Nous avons introduit des armes à feu, beaucoup d’équipements, et même de l’argent. Ce n’était pas simplement un soutien militaire, mais un appui à très haut niveau. »

Il a ajouté que les armes en question avaient été saisies à l’intérieur de Gaza ou récupérées par d’autres moyens.

Forte opposition

Cette révélation a provoqué une vive réaction dans les rangs de l’opposition israélienne.

Le chef de l’opposition, Yaïr Lapid, a écrit sur X : « Après avoir offert des millions de dollars au Hamas, Netanyahou livre désormais des armes à des groupes liés à Daech à Gaza, sans stratégie ni planification. C’est une folie. »

Et d’ajouter : « Ces armes finiront par se retourner contre les soldats et les civils israéliens. Ce gouvernement doit démissionner. »

Un retour au modèle de l’Armée de Lahad ?

Israël n’avait pas adopté une telle stratégie depuis les années 1970, lorsqu’elle a soutenu la création de l’« Armée de Lahad » au Sud-Liban.

Cette milice, appelée « Armée du Liban Sud », fut créée en 1976 à Marjayoun avec le soutien d’Israël, à partir d’éléments des villages du sud et de déserteurs de l’armée libanaise.

Elle s’opposait aux factions palestiniennes qui contrôlaient alors la région. Après l’invasion israélienne de 1978 (opération Litani), son influence s’est étendue.

Elle a combattu les ennemis d’Israël : l’OLP, le mouvement Amal, le Parti communiste libanais, les Mourabitoun, puis le Hezbollah après 1982.

Le premier commandant fut le major Saad Haddad. À sa mort d’un cancer en 1984, il fut remplacé par Antoine Lahad. À son apogée, la milice comptait environ 6 000 hommes.

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