Politique

Le gouvernement soudanais torpille l’initiative du Quartet en s’accrochant à la guerre


La coalition Tasis a qualifié le communiqué du Quartet et les sanctions américaines contre la brigade Al-Baraa ibn Malik de « pas important dans la bonne direction pour mettre fin à la guerre ».

Le ministère soudanais des Affaires étrangères a déclaré que le communiqué publié par le Quartet international n’engageait en rien le Soudan et que « toute discussion sur l’avenir du pays doit se faire avec la participation des Soudanais eux-mêmes, à l’écart de toute tutelle étrangère ». Cette position ferme, adoptée par un gouvernement soutenu par l’armée et encouragé par le courant islamiste, ferme la porte aux efforts de paix et traduit une volonté manifeste de poursuivre la guerre.

Dans un ton particulièrement offensif à l’égard des efforts régionaux et internationaux pour mettre fin à la crise humanitaire, le ministère a affirmé samedi que le gouvernement soudanais « n’entrera dans aucune négociation avec les Forces de soutien rapide rebelles ni avec leurs partisans, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays ».

Le communiqué, au ton virulent, visait explicitement les Émirats arabes unis et les États-Unis, accusés d’armer ou de soutenir les Forces de soutien rapide, ce qui servirait de justification à la poursuite de la guerre malgré la situation humanitaire catastrophique.

La diplomatie soudanaise a attaqué les Émirats en les accusant de fournir argent et armes aux Forces de soutien rapide, des accusations qu’Abou Dhabi a maintes fois démenties. Elle a également exhorté les États-Unis à « traiter sérieusement la question du flux d’armes américaines transitant par leurs alliés à Abou Dhabi vers les Forces de soutien rapide ».

Le ton offensif a aussi visé l’Arabie saoudite et les États du Conseil de coopération du Golfe, parrains du processus de paix, les avertissant de ne pas « imposer une tutelle sur le Soudan au lieu de se concentrer sur la menace israélienne croissante », rappelant que « le Soudan est un État souverain et n’acceptera aucune forme de chantage ou de tutelle politique ».

Cette ligne dure semble dictée par le courant islamiste, qui incite à la poursuite du conflit et bloque toute tentative de cessez-le-feu grâce à son influence sur les décisions de l’armée. L’ancien ministre et secrétaire général du Mouvement islamique, Ali Ahmed Karti, a d’ailleurs publié un communiqué sur son compte X, attaquant le Quartet.

Pour sa part, Nasr al-Din Abdel Bari, dirigeant de la coalition Tasis, a estimé que le communiqué du Quartet et les sanctions américaines constituaient « un signal fort adressé aux islamistes et à leurs alliés ou complaisants : le monde n’acceptera pas la reproduction de l’ancien régime au Soudan ».

Cette escalade survient au lendemain du communiqué du Quartet international (Égypte, Arabie saoudite, Émirats arabes unis, États-Unis), qui appelait à une trêve humanitaire de trois mois, prélude à un cessez-le-feu permanent et à une transition politique devant conduire à la formation d’un gouvernement civil sous neuf mois.

Le communiqué conjoint publié vendredi soir par les ministres des Affaires étrangères des quatre pays, relayé par le site du département d’État américain, a rappelé que le conflit avait engendré « la pire crise humanitaire au monde » et menaçait la paix et la sécurité régionales. Le texte soulignait qu’aucune issue militaire n’était envisageable et réaffirmait l’engagement du Quartet en faveur d’un processus de transition transparent et inclusif, dirigé par les Soudanais.

Les ministres ont aussi dénoncé l’impact du soutien militaire étranger aux belligérants, estimant qu’il alimentait la guerre et prolongeait le conflit. Ils ont réitéré leur détermination à promouvoir une solution négociée incluant à la fois l’armée et les Forces de soutien rapide, avec pour priorité la protection des civils, l’accès humanitaire et la préservation des infrastructures.

Ils ont également rappelé leur engagement à renforcer la sécurité en mer Rouge, à lutter contre les menaces transnationales posées par les organisations extrémistes, et à empêcher les acteurs déstabilisateurs de tirer profit du conflit.

Depuis le 15 avril 2023, l’armée soudanaise et les Forces de soutien rapide mènent une guerre qui a causé la mort de plus de 20 000 personnes et entraîné la fuite ou le déplacement d’environ 15 millions d’habitants, selon l’ONU et les autorités locales. Une étude menée par des universités américaines avance même le chiffre de 130 000 morts.

Les appels internationaux et onusiens à mettre fin à la guerre se multiplient, afin d’éviter au Soudan une catastrophe humanitaire où des millions de personnes sont déjà menacées par la famine et la mort, alors que les combats s’étendent désormais à 13 des 18 États du pays.

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