Conflit financier et guerre des accusations : un nouveau chapitre dans l’effondrement des « Frères musulmans »

Un nouveau chapitre du conflit illustre l’état d’une fracture interne difficile à réparer et révèle, une fois de plus, les aspects cachés d’un groupe dominé par la quête d’argent et de pouvoir.

À peine une crise terminée, une autre secoue les Frères musulmans, une organisation désormais caractérisée par la division entre différentes factions et groupes.

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Les Frères musulmans connaissent actuellement un conflit entre l’ancienne direction de l’organisation mondiale – connue médiatiquement sous le nom de « l’organisation internationale » – et le bureau de l’Association des Frères musulmans égyptiens à l’étranger, qui agit comme une structure de coordination pour les membres égyptiens résidant hors du pays.

Ce conflit se concentre sur les questions de financement et les institutions affiliées à l’organisation en Europe.

Ce différend est également lié à celui qui oppose les factions de Londres (dirigée par Salah Abdel-Haq) et d’Istanbul (sous Mahmoud Hussein). Cette dernière a tenté d’exploiter les tensions autour des questions financières pour renforcer les divisions au sein de la faction de Londres.

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Cette crise survient alors que la faction de Londres traverse une des périodes les plus difficiles depuis sa création, à la suite de la scission interne déclenchée fin 2020 sous la direction d’Ibrahim Mounir, ancien responsable par intérim de l’organisation.

Le responsable de l’Association des Frères musulmans égyptiens affilié à la faction de Londres, Saadani Ahmed, tente actuellement de prendre le contrôle des institutions européennes du mouvement, une vaste toile d’organisations établies par les Frères musulmans au fil des décennies.

Sa justification repose sur le fait que ces institutions incluent dans leur structure administrative une proportion significative de membres égyptiens ayant émigré en Europe, notamment en Grande-Bretagne, aux Pays-Bas et en Belgique, au cours des douze dernières années.

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Cependant, Mahmoud Ibiary, une figure influente de l’organisation internationale, s’oppose à cette initiative, affirmant que ces institutions relèvent depuis leur création du secteur européen de l’organisation internationale et n’ont jamais été liées à l’Association des Frères musulmans égyptiens à l’étranger.

Entre l’Association à l’étranger et l’organisation internationale

Créée dans les années 1990, l’Association des Frères musulmans égyptiens à l’étranger a servi de structure organisationnelle pour les membres travaillant hors d’Égypte.

Avec le temps, cette association a ouvert environ 12 bureaux à l’étranger, qui accueillent les membres égyptiens dans leurs pays d’installation et les intègrent au réseau organisationnel global.

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Les membres doivent suivre les directives de l’association et payer leur contribution financière, connue sous le nom de Saham Al-Daawa (la part de la mission). Cela a fait de l’association une entité clé dans la structure administrative et organisationnelle du mouvement.

Après la destitution des Frères musulmans du pouvoir en Égypte en 2013, l’importance de l’association a augmenté, accueillant des centaines de cadres et de dirigeants fuyant le pays.

L’association a pris en charge plusieurs dossiers administratifs, notamment la gestion des membres à l’étranger et la sécurisation de leurs activités.

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Cependant, les divisions apparues sous la direction d’Ibrahim Mounir ont conduit à un éclatement de l’association. La faction de Londres a réussi à rallier 7 des bureaux de l’association, nommant Saadani Ahmed à sa tête. De leur côté, la faction d’Istanbul et ses alliés contrôlent les autres bureaux, avec Mohamed Desouki comme responsable.

En conséquence, l’association s’est scindée en deux structures concurrentes.

L’organisation internationale

Fondée en 1982 par des dirigeants de premier plan comme Mostafa Machhour (futur guide suprême), l’organisation internationale se compose de sept secteurs géographiques (Afrique, Asie, Europe, Amériques). Chaque secteur regroupe les branches officielles de l’organisation dans différents pays et agit comme une structure de coordination et de leadership globalement dominée par les Frères musulmans égyptiens.

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La structure interne de l’organisation internationale donne à l’Égypte une influence prédominante, avec la majorité des sièges au sein du Bureau de guidance mondiale et du Conseil consultatif mondial, les deux organes directeurs.

« Ibiary » face à « Al-Saadani »

Entre-temps, le secteur Europe de l’organisation internationale jouit d’une position unique, étant le principal bastion du mouvement. Ce secteur regroupe les branches européennes des Frères musulmans ainsi que les institutions, entreprises, et investissements du groupe en Europe.

Cette situation en fait un pilier essentiel pour financer les activités de l’organisation, un rôle historiquement assuré par Ibrahim Munir, avec Mahmoud Ibiary comme adjoint. Après le décès de Munir fin 2022, Ibiary est devenu responsable du secteur Europe et secrétaire général de l’organisation internationale.

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Selon des sources internes, Mahmoud Ibiary reste loyal à Salah Abdel-Haq et au front de Londres après le départ de Munir. Cependant, des tensions ont éclaté entre lui et Al-Saadani Ahmed, responsable de l’Association des Frères musulmans égyptiens à l’étranger, qui a demandé le transfert des dossiers administratifs et des institutions européennes sous le contrôle de l’Association.

Ibiary s’y est opposé, arguant que cela enfreindrait les statuts de l’organisation internationale, selon lesquels ces institutions relèvent exclusivement de l’autorité administrative et organisationnelle de l’organisation internationale.

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Mahmoud Ibiary est une figure clé au sein de l’organisation internationale en Europe. Il était l’homme de confiance d’Ibrahim Munir, supervisant et orchestrant les activités de l’organisation. Munir ne prenait aucune décision majeure sans consulter Ibiary, selon une source interne.

Pour contrer Ibiary, Al-Saadani Ahmed a sollicité l’appui de Salah Abdel-Haq, actuel guide par intérim des Frères musulmans, et de Mohieddine Al-Zayt, membre de l’instance administrative supérieure, qui remplace provisoirement le Bureau de la Guidance.

Initialement, Abdel-Haq et Al-Zayt ont soutenu Al-Saadani et demandé à Ibiary de transférer les institutions européennes sous la tutelle de l’Association. Ils espéraient que ce transfert renforcerait le financement du mouvement égyptien et consoliderait leur contrôle sur les ressources du groupe.

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Al-Saadani Ahmed et Helmi Al-Gazar, chef du bureau politique, ont présenté un dossier contenant des accusations de mauvaise gestion financière et de gaspillage de ressources sous la supervision d’Ibiary.

Lors d’une réunion politique, Al-Saadani a accusé Mahmoud Ibiary de collaborer avec les services secrets britanniques et de dilapider les fonds de l’organisation. Il a exigé le retrait de son contrôle sur les finances ou, au minimum, celles concernant les Frères musulmans égyptiens en Europe.

En réaction, Mahmoud Ibiary a rejeté ces accusations, les qualifiant d’attaques contre l’ensemble de la direction, affirmant qu’il agissait toujours sous la supervision de l’organisation.

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Face à cette crise, Salah Abdel-Haq a été sollicité pour arbitrer. Cependant, il n’a pas encore pris de décision finale et prévoit de réunir les parties pour trouver une solution consensuelle.

En parallèle, le front d’Istanbul, dirigé par Mahmoud Hussein, a tenté de rallier Mahmoud Ibiary. Ce dernier a accueilli favorablement cette initiative, reconnaissant que Mahmoud Hussein mériterait de devenir guide par intérim. Néanmoins, aucune adhésion officielle n’a encore eu lieu.

Un sommet est prévu prochainement, réunissant les membres de l’instance administrative supérieure et les responsables des bureaux de l’Association, afin de résoudre les différends concernant le secteur Europe et les dossiers administratifs.

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