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Alliance entre les Frères Musulmans, Daech et Al-Qaïda pour exploiter la guerre de Gaza


Les tentatives de la mouvance islamiste politique pour mobiliser la rue arabe à l’occasion de la guerre israélienne contre Gaza ont rencontré une faible adhésion populaire, reflétant ainsi la diminution de son influence en tant que force politique capable d’influer sur de nombreuses questions régionales.

Un sentiment de frustration a prévalu parmi les islamistes qui comptaient sur des opérations contre des communautés juives, des intérêts occidentaux et des incursions à la frontière avec Israël de la part de leurs sympathisants. Cette frustration s’est particulièrement accentuée lorsque l’on a appris que le dernier affrontement armé à la frontière égyptienne était dû à l’échec d’une tentative de trafic de drogues, et non à la participation de combattants égyptiens pour soutenir les membres du Hamas comme il avait été prétendu.

La campagne lancée par le leader islamiste pro-Frères Musulmans Mahmoud Fathy, intitulée « Le Déluge de la Nation », appelant à une grève générale en Égypte pour commémorer le treizième anniversaire de la révolution de janvier, n’a rencontré qu’un écho minimal, avec seulement une poignée de participants.

Les dirigeants des Frères Musulmans espéraient que l’attaque massive du Hamas contre des cibles israéliennes le 7 octobre dernier et la riposte israélienne sans précédent à Gaza leur permettraient de raviver leur popularité après des années de déclin, renforçant ainsi leur projet politique.

Les campagnes de propagande des islamistes depuis l’opération « Le Déluge de l’Al-Aqsa » visant à délégitimer certains régimes arabes ont montré l’espoir de toutes les factions de l’islam politique de se remettre au premier plan en tant que sauveurs de la nation face à la situation dégradée actuelle.

La volonté des islamistes, qui ont critiqué tous les pays arabes pour leur non-intervention militaire en soutien aux habitants de Gaza, s’est heurtée à un changement d’attitude des musulmans concernant la nature de la religiosité requise, surtout dans les années précédant les attaques du 7 octobre.

Réponse jihadiste

Il est probable que les réponses aux campagnes lancées par les islamistes pour soutenir les Palestiniens à Gaza se limitent à des actes de violence au cœur de l’Europe, en raison de l’influence croissante des jihadistes dans le monde, tandis que la mouvance islamiste politique manque de soutien organisationnel dans certains pays arabes en raison des politiques d’ouverture en cours.

Des facteurs favorables existent pour les principaux groupes jihadistes mondiaux, Daech et Al-Qaïda, pour devancer et exploiter la guerre prolongée d’Israël contre Gaza.

La politique des doubles standards adoptée par les pays occidentaux et leur soutien à Israël, qui a dépassé dans cette guerre toutes les violations précédentes des lois et normes internationales et des valeurs humaines, a approfondi le ressentiment que ces organisations cherchent à exploiter.

En plus de leur contrôle sur des zones en Afghanistan propices à la préparation et à l’entraînement, Daech et Al-Qaïda disposent encore de partisans à travers le monde, prêts à répondre aux appels à la violence.

Depuis le début de la guerre en cours à Gaza, plusieurs villes occidentales, dont la France, les États-Unis, l’Allemagne et la Belgique, ont été le théâtre d’attentats terroristes. Les jihadistes rivalisent pour gagner le soutien de ceux dont la haine de l’Occident s’est intensifiée en raison du soutien flagrant à Israël.

Daech a perçu les changements régionaux actuels comme une opportunité de se réinventer, en se basant sur une stratégie d’expansion visant à élargir ses cibles sous le slogan « Tuez-les où que vous les trouviez », en exploitant les sentiments de frustration et de haine qui se sont répandus parmi les musulmans dans le monde contre certaines puissances occidentales.

Daech a exploité les événements en Palestine de manière différente des autres organisations pour les neutraliser et montrer sa supériorité. Il rejette le combat pour libérer une terre ou une patrie, prônant uniquement le combat pour établir son califat et soumettre tout le monde à sa domination.

Daech a affirmé qu’il n’y a pas de différence entre un gouvernement gouverné par une constitution juive séculière et un autre gouverné par une constitution palestinienne séculière, appelant à combattre sous sa bannière en tant qu’entité cherchant à appliquer la charia et adhérant à la constitution divine. Al-Qaïda, quant à lui, a appelé à élargir la portée de la guerre pour cibler tout le monde, y compris les Juifs dans le monde entier.

Daech vise ainsi à se présenter comme la seule faction islamique adoptant la voie correcte que la communauté doit suivre, alors que la concurrence entre lui et Al-Qaïda s’intensifie pour la prééminence dans le jihad mondial.

Saisir l’opportunité

Le moment choisi pour la mise en œuvre de la nouvelle stratégie de Daech coïncide avec la confusion notable parmi les factions islamiques concurrentes et leur incapacité à exploiter la cause palestinienne à leur avantage. Cela reflète son désir de saisir l’opportunité de se relancer par une activité opérationnelle intensive, exposant ainsi l’impuissance des autres groupes jihadistes et leur réticence à agir pendant cette phase cruciale pour la nation.

Ce scénario rappelle celui de l’an 2000 et de ses suites, lorsque certains chercheurs occidentaux, dont le Français Gilles Kepel, auteur du livre « Jihad: Expansion et Déclin de l’Islamisme Radical », pensaient que le radicalisme avait disparu et se concentraient sur les Frères Musulmans. Quelques mois plus tard, le monde fut confronté aux attentats du 11 septembre 2001, planifiés et exécutés par Al-Qaïda.

Al-Qaïda a exploité cette période pour diffuser son récit et renforcer la propagande de son attaque sans précédent qui a tué trois mille civils au moment de la seconde Intifada palestinienne en 2000, visant à mobiliser l’opinion publique arabe et islamique en sa faveur et à intensifier la haine contre une Amérique complètement alignée sur Israël.

L’exploitation de la cause palestinienne et la focalisation sur le soutien américain inconditionnel à Israël ont conféré une certaine légitimité aux attaques du 11 septembre auprès d’une partie de l’opinion publique arabe et islamique. C’est ce que les jihadistes prévoient de répéter aujourd’hui dans le contexte de la guerre israélienne la plus brutale menée contre Gaza.

Malgré la concurrence et les divergences idéologiques entre les factions jihadistes et leur absence de présence sur le terrain en Palestine, ce qui limite leur capacité à profiter de l’occasion pour relancer leur mouvement, la prolongation du conflit, la colère croissante parmi les musulmans et l’incapacité de la mouvance islamiste politique à mobiliser les masses leur donnent l’opportunité de se positionner en première ligne en tant que représentants des musulmans face aux forces de l’incrédulité.

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