Al-Sadr brandit la carte de la rue et la boycott des élections face à l’offre du Coordination Framework

Une source a confirmé que Moqtada al-Sadr a présenté l’option de retourner dans la rue avec des manifestations, ou celle d’un accord implicite sur les élections tout en incitant son public à les boycotter, voire à pousser au report complet du scrutin en misant sur des évolutions régionales.
Le leader du courant sadriste, Moqtada al-Sadr, a rejeté une offre présentée par le Coordination Framework, visant à apaiser l’atmosphère politique et à garantir la participation d’al-Sadr au processus électoral, selon des sources politiques informées. Ce refus marque un développement significatif, reflétant les défis imposés par les prochaines élections au paysage politique irakien.
Selon la source, qui a préféré rester anonyme et qui s’est confiée au site kurde irakien Shafaq News, un émissaire spécial du Coordination Framework a récemment rencontré al-Sadr avec une proposition lui offrant la liberté de nommer le prochain Premier ministre, à condition de ne pas intervenir dans les détails des élections ni contester leurs résultats. Bien que cette offre représente une tentative de contenir les tensions croissantes, al-Sadr l’a rejetée catégoriquement.
À la place, al-Sadr a présenté trois options principales pour gérer la prochaine phase, toutes reflétant une posture plus prudente et stricte, soulignant l’ampleur des défis auxquels le courant sadriste est confronté dans un environnement politique tendu, alors que le leader avait précédemment rejeté toute tentative de bloquer le processus électoral.
La première option envisagée par le leader consiste à retourner dans la rue, en lançant une nouvelle vague de manifestations populaires qui pourraient inclure
l’installation de tentes de sit-in et l’escalade du conflit, ce qui pourrait entraver l’ensemble du processus électoral et même menacer de faire échouer le processus démocratique en l’absence d’accords rapides.
Bien que son courant se soit déjà retiré du Parlement et de la course électorale, cette option lui permet de rester fortement influent dans la rue, notamment grâce à sa capacité à mobiliser un large public, comme lors des manifestations des années précédentes.
La deuxième option consiste à accepter implicitement les élections en principe, tout en incitant ses partisans à les boycotter. Ce scénario peut sembler calme en apparence, mais il comporte un risque majeur pour le processus politique, pouvant entraîner un taux de participation très faible, ce qui minerait la légitimité populaire des élections, surtout si des forces armées controversées participent.
Selon la source, al-Sadr parie sur le fait qu’un faible taux de participation pourrait pousser des acteurs internationaux à refuser de reconnaître les résultats, ouvrant ainsi la voie à la formation d’un gouvernement d’urgence transitoire, à l’image du gouvernement précédent de Mustafa Al-Kadhimi.
La troisième option consiste à pousser au report complet des élections, soit en soulevant des questions techniques, soit en demandant des garanties politiques supplémentaires, ou encore en pariant sur des évolutions régionales imprévues qui forceraient le gouvernement et le Coordination Framework à revoir le calendrier actuel.
Cette possibilité reflète une lecture approfondie par le courant sadriste de la nature des conflits régionaux imbriqués, notamment la montée des tensions irano-américaines, les évolutions dans le dossier syrien, et les fluctuations dans les relations entre Bagdad et Erbil.
Selon des sources proches du courant, al-Sadr prend désormais ses décisions au sein d’un cercle très restreint, composé uniquement d’un petit nombre de proches. Cette isolation traduit un retrait stratégique temporaire visant à éviter l’épuisement politique, tout en affaiblissant les canaux de communication avec les autres blocs politiques et en compliquant les chances de parvenir à des compromis.
Les dernières données et tweets d’al-Sadr montrent une volonté de s’adresser directement à sa base populaire, sans passer par les canaux politiques traditionnels, renforçant le sentiment de ses adversaires qu’il conserve l’initiative en dehors des institutions officielles.
La crise politique récente s’est intensifiée après des fuites concernant un complot d’assassinat contre al-Sadr, attribué au député Yasser Al-Maliki du State of Law Coalition, via un drone lors d’une visite potentielle au sanctuaire de son père à Najaf.
Bien que le député ait rapidement nié ces allégations, les tensions sur le terrain n’ont pas tardé, avec le déploiement de membres des Saraya al-Salam, aile militaire du courant sadriste, dans la province de Bassorah, augmentant le niveau d’alerte sécuritaire avant les élections.
Dans un tweet qualifié de “premier avertissement”, al-Sadr a averti que le pays s’achemine vers une escalade dangereuse par “les amateurs du pouvoir et les accros aux sièges”, affirmant que le courant sadriste “ne sera pas entraîné dans la fitna”, misant sur la vigilance de ses partisans.
Dans une déclaration datant de deux jours, il a indiqué que “le non-participation a accru les craintes des électeurs et leurs spéculations sur les scénarios possibles”, répondant aux rumeurs selon lesquelles “le courant chiite” empêcherait l’accès aux urnes par la force ou provoquerait des troubles pour saboter les élections, ou mobiliserait sa base massive pour descendre dans la rue et organiser des manifestations afin de bloquer le scrutin.
Une source proche d’al-Sadr a expliqué que ce message constitue une déclaration implicite selon laquelle le courant ne permettra pas la reproduction du consensus politique et du partage des postes, et n’acceptera pas d’être marginalisé sur la scène politique, même en dehors du Parlement.
Al-Sadr propose clairement deux options : soit un gouvernement de majorité nationale reflétant la volonté des électeurs, soit une opposition active capable d’influencer depuis la rue, et non depuis les salons de la politique de compromis.
Les prochaines élections ne semblent donc pas être un simple rendez-vous constitutionnel, mais un moment décisif qui déterminera la forme du paysage politique irakien pour les années à venir. Avec l’intensification des conflits entre forces chiites et la montée des indices d’ingérences régionales et internationales, les résultats pourraient non seulement refléter l’équilibre des forces au Parlement, mais aussi l’avenir du courant sadriste et la position de Moqtada al-Sadr dans l’équation du pouvoir.