Politique

Les États-Unis cherchent à inclure la Mauritanie dans les accords d’Abraham


Le journal Wall Street Journal estime que l’intégration de la Mauritanie aux accords d’Abraham constituerait un tournant majeur pour le renforcement du réseau de relations israéliennes en Afrique.

Les efforts américains visant à relancer le processus de normalisation entre Israël et plusieurs pays arabes s’intensifient, alors que les négociations progressent vers une annonce d’accord de cessez-le-feu global à Gaza. De nouvelles informations indiquent que la Mauritanie pourrait être le prochain pays à rejoindre les accords de normalisation, connus sous le nom d’« accords d’Abraham ».

Le Wall Street Journal a révélé mercredi que des responsables américains ont organisé ces derniers jours des rencontres discrètes entre des représentants mauritaniens et israéliens, en marge d’un sommet économique et sécuritaire à Washington, auquel ont participé le président américain Donald Trump et cinq chefs d’État d’Afrique de l’Ouest, dont le président mauritanien Mohamed Ould Ghazouani.

Selon des sources diplomatiques citées par le journal, Washington cherche à rétablir les relations entre Nouakchott et Tel-Aviv, rompues depuis plus de treize ans, dans le cadre d’un plan plus vaste de relance du processus de normalisation avec plusieurs pays arabes, dans la foulée des avancées concernant le cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, et des pressions américaines en faveur d’une « solution régionale durable au conflit ».

Historiquement, la Mauritanie avait établi des relations diplomatiques complètes avec Israël en 1999, sous la présidence de Maaouya Ould Sid’Ahmed Taya, devenant ainsi le troisième pays arabe – après l’Égypte et la Jordanie – à franchir ce pas. Mais elle avait suspendu ces relations après l’offensive israélienne contre Gaza en 2008-2009, avant de les rompre définitivement en 2010 sous la pression politique et populaire.

Depuis, Nouakchott est restée silencieuse sur la question de la normalisation, mais des analystes estiment que les contacts avec Israël n’ont jamais totalement cessé, et qu’ils ont été maintenus discrètement en attendant un contexte régional plus favorable, tel qu’un cessez-le-feu durable ou des accords économiques étendus.

D’après le Wall Street Journal, l’administration Trump, qui a réaffirmé son soutien aux accords d’Abraham lors du dernier sommet africain, considère la Mauritanie comme un « partenaire prometteur » en raison de sa position géostratégique et de sa proximité avec le Maroc, qui a rejoint les accords en 2020.

Des sources américaines bien informées indiquent que les incitations proposées incluent un soutien économique direct, des investissements dans les infrastructures et l’énergie, ainsi que des garanties de sécurité dans le cadre du partenariat stratégique avec Washington, en échange d’un rétablissement des relations officielles avec Israël.

Cependant, la situation intérieure en Mauritanie est plus complexe. Le président Ould Ghazouani fait face à une opposition politique et populaire importante à toute initiative de normalisation, notamment en raison de la situation explosive à Gaza et des poursuites engagées contre le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou par la Cour pénale internationale pour crimes de guerre.

Des sources à la présidence mauritanienne ont rapidement démenti les rumeurs évoquant une rencontre entre Ould Ghazouani et Netanyahou en marge du sommet de Washington, réaffirmant que la position de la Mauritanie « reste inchangée » dans son soutien à la cause palestinienne, selon Al Jazeera.

Les discussions sur une possible normalisation surviennent alors que les espoirs d’un cessez-le-feu global à Gaza progressent, sous l’égide des États-Unis, du Qatar et de l’Égypte. Des analystes estiment qu’un accord mettant fin à la guerre déclenchée en octobre 2023 et jetant les bases d’une phase politique post-conflit pourrait ouvrir la voie à une vague de normalisation arabe, dans le cadre d’un ensemble plus large incluant la reconstruction de Gaza et des engagements israéliens.

L’adhésion de la Mauritanie aux accords d’Abraham offrirait à Israël une porte d’entrée stratégique en Afrique de l’Ouest, tout en offrant à Washington un succès diplomatique en vue des élections de novembre prochain.

Toutefois, les milieux politiques et populaires en Mauritanie avertissent que toute décision visant à rétablir les relations avec Israël serait largement rejetée, notamment par les courants islamistes et de gauche, qui considèrent la normalisation comme une « trahison de la cause palestinienne » et s’opposent à toute reconnaissance d’Israël sans la création d’un État palestinien indépendant.

Les manifestations populaires de grande ampleur qui avaient éclaté en 2009 après la guerre de Gaza restent un souvenir marquant du rejet populaire de la normalisation, qui avait alors conduit le gouvernement à rompre les liens avec Tel-Aviv.

Dans ce contexte mêlant enjeux diplomatiques et réalités intérieures sensibles, l’avenir des relations entre la Mauritanie et Israël dépendra de l’évolution des négociations de cessez-le-feu et de la capacité de Nouakchott à équilibrer ses intérêts stratégiques et les attentes de son opinion publique.

Et malgré les démentis officiels, la récurrence du sujet dans la presse américaine et les milieux diplomatiques israéliens laisse penser qu’un processus est en marche, dont les contours pourraient émerger dans les semaines ou mois à venir.

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