Politique

Accélération des libérations de membres de Daech en Turquie : quel lien avec le changement de régime en Syrie ?


Une vague récente de libérations de personnes accusées de financer et de soutenir Daech en Turquie a suscité une vive polémique. La police turque et le système judiciaire, largement contrôlés par le gouvernement du président Recep Tayyip Erdoğan, ont arrêté de nombreux suspects liés à Daech, mais peu ont été condamnés, ce qui a conduit à la libération de la majorité d’entre eux.

Les médias turcs suggèrent que ces libérations pourraient être liées à des demandes ou négociations avec Hayat Tahrir al-Cham (HTS), un groupe comprenant d’anciens combattants d’Al-Qaïda et de Daech, qui a joué un rôle clé dans la chute de Bachar al-Assad en Syrie.

Dans une affaire impliquant 19 accusés, 18 d’entre eux ont été libérés en attendant leur procès, tandis que le dernier a demandé la citoyenneté turque et payé une caution de 500 000 dollars, selon le Centre arabe pour l’étude de l’extrémisme, relayé par Nordic Monitor.

Le site souligne que ce schéma de libérations de suspects dans des affaires liées à Daech n’est pas nouveau en Turquie. Dans de nombreuses affaires, des individus accusés de crimes graves liés au terrorisme ont été libérés en raison d’un prétendu « manque de preuves » ou de « retards procéduraux ». De plus, certaines condamnations ont été annulées en appel.

Les observateurs estiment que ces pratiques reflètent des problèmes plus profonds au sein du système judiciaire turc, notamment des ingérences politiques et un manque de rigueur dans les enquêtes.

Malgré ces lacunes, la Turquie a réussi à être retirée de la liste grise du Groupe d’action financière (GAFI) en juin 2024. Cependant, les récentes libérations de suspects liés au financement de Daech ont ravivé les inquiétudes quant au sérieux des efforts du pays dans ce domaine. Les critiques soutiennent que ces mesures visent davantage à satisfaire les organismes internationaux qu’à combattre réellement le financement du terrorisme.

Ce développement intervient après une décision similaire la semaine dernière dans une autre affaire, où des suspects impliqués dans l’attentat terroriste de l’aéroport Atatürk ont été libérés. Le 12 décembre, six des sept individus condamnés pour leur rôle dans l’attentat de l’aéroport Atatürk à Istanbul, survenu le 28 juin 2016, ont été libérés après un jugement de la Cour de cassation turque. Cet attentat, perpétré par trois assaillants de Daech, avait fait 45 morts et 236 blessés.

Le président Erdoğan avait déjà négocié la libération de membres emprisonnés du Hezbollah turc en échange de soutiens politiques, selon le Centre arabe pour l’étude de l’extrémisme.

Depuis 2014, Erdoğan a noué une alliance avec le bras politique du Hezbollah, le Parti de la cause libre (HÜDA PAR), lors des élections nationales et locales, bien que cet accord soit resté secret, sans reconnaissance publique ni documentation officielle. En échange du soutien de HÜDA PAR, Erdoğan a facilité la libération de tous les terroristes condamnés du Hezbollah, y compris des meurtriers purgeant des peines de prison à vie pour l’assassinat de 91 personnes en Turquie dans les années 1990 et au début des années 2000. Lors des élections générales de 2023, HÜDA PAR a obtenu cinq sièges au parlement sous la liste du parti au pouvoir d’Erdoğan.

 

Afficher plus

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page