Politique

Al-Burhan envoie une délégation de « sauvetage » en Égypte dans une nouvelle manœuvre politique

Le gouvernement invente des prétextes multiples pour entraver les pourparlers de paix en refusant la participation de nouveaux médiateurs aux négociations.


Le gouvernement soudanais, favorable à l’armée, a annoncé dimanche qu’il avait décidé d’envoyer une délégation au Caire pour discuter de « la mise en œuvre de l’accord de Djeddah » visant à atténuer l’impact de la guerre acharnée contre les Forces de soutien rapide depuis 16 mois. Pendant ce temps, d’autres négociations se poursuivent à Genève sous l’égide des États-Unis, une étape qui montre la persistance de l’armée à manœuvrer après avoir été accusée de faire échouer les négociations dans un contexte de détérioration de la situation dans le pays à cause de la guerre.

Le Conseil de souveraineté transitoire a indiqué dans un communiqué que « suite à un contact avec le gouvernement américain représenté par l’envoyé spécial des États-Unis au Soudan, Tom Perriello, et un contact avec le gouvernement égyptien, le gouvernement enverra une délégation au Caire. »

Le conseil a précisé dans son communiqué que l’objectif de la visite de la délégation gouvernementale soudanaise est de « discuter de la vision du gouvernement pour la mise en œuvre de l’accord de Djeddah. » La déclaration n’a pas précisé la date de la visite.

Les observateurs des affaires soudanaises estiment que le recours d’Al-Burhan à l’envoi d’une délégation au Caire, alors que les négociations se poursuivent à Genève, est un exemple de la manipulation du chef de l’armée envers la communauté internationale et reflète le débat en cours sur toutes les manœuvres qui ont entouré les négociations de Genève.

Ils estiment également qu’Al-Burhan craint l’opposition de ses alliés islamistes qui ne veulent pas participer aux négociations, car son sort est lié aux vestiges de l’ancien régime, dont il n’est pas dans l’intérêt de réaliser la sécurité et la stabilité.

Les deux parties au conflit ont déjà mené des séries de discussions dans la ville saoudienne de Djeddah, au cours desquelles il a été convenu de respecter les principes humanitaires et de permettre l’entrée des aides, dont le besoin est crucial, sans toutefois parvenir à une percée sérieuse ou à un accord sur un cessez-le-feu durable.

Avant de participer à de nouvelles négociations pour mettre fin à la guerre dans le pays, le gouvernement soudanais insiste sur la mise en œuvre de la « Déclaration de Djeddah », publiée en mai 2023, à l’issue des pourparlers organisés à Djeddah entre l’armée et les Forces de soutien rapide.

Le gouvernement soudanais invente divers prétextes pour entraver les pourparlers de paix, notamment en refusant l’implication de nouveaux médiateurs dans les négociations, autres que les sponsors des négociations de Djeddah, les États-Unis et l’Arabie saoudite.

Cette décision survient alors que des pourparlers se poursuivent en Suisse, à l’invitation des États-Unis, dans le but de parvenir à un cessez-le-feu entre l’armée et les Forces de soutien rapide dans la guerre qui a éclaté l’année dernière.

Bien que les Forces de soutien rapide aient accepté l’invitation à participer aux discussions, les autorités soudanaises, dirigées par le président du Conseil de souveraineté, Abdel Fattah al-Burhan, se sont abstenues d’y prendre part, après avoir exprimé leurs réserves quant à la méthode employée et manifesté leur désaccord avec les États-Unis sur les participants.

Les représentants des Forces de soutien rapide ont assisté aux négociations qui ont débuté à Genève le 14 août, tandis que les représentants de l’armée ont été contactés par téléphone, selon Tom Perriello.

Malgré l’absence de participation directe de l’armée aux négociations de Genève, Perriello estime que les discussions ont remporté un certain succès, en attirant l’attention internationale sur le Soudan à un moment où « le monde détournait son attention ».

Les Forces de soutien rapide au Soudan ont accepté de coopérer à la livraison d’aides humanitaires après que le gouvernement soudanais a décidé d’ouvrir un passage frontalier majeur avec le Tchad, selon l’annonce des pays parrains des pourparlers en Suisse samedi.

Les États-Unis dirigent les discussions en collaboration avec l’Arabie saoudite, la Suisse, l’Union africaine, l’Égypte, les Émirats arabes unis et les Nations Unies.

Dans une déclaration conjointe, les cinq pays, ainsi que les Nations Unies et l’Union africaine, ont salué la décision d’ouvrir le passage frontalier d’Adré entre le Tchad et le Darfour du Nord pour les trois prochains mois.

La déclaration publiée par l’agence de presse émiratie a ajouté : « Nous nous félicitons de l’engagement des Forces de soutien rapide à coopérer avec les opérations de transport des aides, notamment via la route vitale de Daba vers le Darfour et le Kordofan, et à protéger les travailleurs humanitaires dans leur mission. »

La déclaration ajoute que « ces décisions constructives des deux parties permettront l’accès des aides nécessaires pour éviter la famine, traiter l’insécurité alimentaire, et répondre aux immenses besoins humanitaires au Darfour et au-delà. »

La déclaration a souligné qu’il « incombe aux parties de communiquer et de coordonner immédiatement avec les partenaires humanitaires pour activer ces corridors efficacement afin de garantir un accès durable et sans entrave aux aides », et les signataires de la déclaration ont exhorté « la communauté internationale et les organisations humanitaires à saisir cette opportunité pour acheminer les aides et sauver des vies, en particulier les plus vulnérables. »

La fermeture du passage d’Adré avait inquiété les organisations humanitaires qui rencontrent des difficultés pour acheminer les vivres et les fournitures vers la région du Darfour au Soudan.

Les combats ont éclaté à la mi-avril 2023 entre l’armée dirigée par Abdel Fattah al-Burhan, qui est également président du Conseil de souveraineté et dirigeant de facto du pays, et les Forces de soutien rapide dirigées par son ancien allié et adjoint, Mohamed Hamdan Dagalo.

La guerre s’est intensifiée, entraînant des dizaines de milliers de morts et une crise humanitaire majeure, tandis que les Nations Unies, les ONG et le Comité international de la Croix-Rouge dénoncent les obstacles entravant l’accomplissement du travail humanitaire.

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