Tebboune revient sur sa politique d’escalade avec la France

Le président algérien considère son homologue français comme la seule référence pour résoudre les différends entre les deux pays et affirme que le différend actuel est « fabriqué, mais il est désormais entre de bonnes mains ».
Le président algérien Abdelmadjid Tebboune a déclaré dans une interview diffusée samedi soir que son homologue français, Emmanuel Macron, est « la seule référence » pour résoudre les tensions entre l’Algérie et la France, ancienne puissance coloniale. Cette déclaration marque un changement plus conciliant de Tebboune, qui semble revoir sa politique d’escalade, laquelle n’a pas donné de résultats positifs.
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Les relations entre les deux pays se sont détériorées en raison des tentatives de Paris d’expulser des Algériens et depuis que Macron a reconnu, en juillet dernier, la souveraineté du Maroc sur le Sahara. Une série de mesures de rétorsion ont été prises récemment entre les deux pays, notamment l’élaboration par le gouvernement français d’une liste secrète de 800 membres de l’élite algérienne, comprenant des responsables de haut rang qui devront fournir des documents supplémentaires pour justifier leur visite en France, dans un climat de tensions croissantes.
Tebboune a déclaré dans une rencontre avec des représentants de la presse nationale, diffusée par la télévision algérienne : « La seule référence pour résoudre les différends avec la France sera le président français lui-même, et personne d’autre ».
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Il a ajouté que, de son point de vue, il y a eu « un malentendu passager, mais il reste le président français, et tous les problèmes doivent être réglés avec lui ou avec la personne qu’il délègue, à savoir les ministres des Affaires étrangères ».
Tebboune a estimé que le différend actuel est « fabriqué », sans préciser par qui, mais a affirmé qu’il est désormais « entre de bonnes mains », exprimant sa pleine confiance en son ministre des Affaires étrangères, Ahmed Attaf. Ce dernier avait déjà déclaré que l’Algérie était victime d’un complot du « lobby d’extrême droite français haineux ».
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Le président algérien a insisté : « Nous sommes face à deux États indépendants, une puissance européenne et une puissance africaine, avec deux présidents qui travaillent ensemble. Tout le reste ne nous concerne pas ».
Les relations entre l’Algérie et la France ont récemment connu une escalade marquée en raison de plusieurs dossiers. Les tensions ont commencé lorsque la France a cherché à expulser plusieurs « influenceurs » algériens résidant sur son territoire, ce qui a provoqué de vives réactions du côté algérien.
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Dans ce contexte, le ministre français de l’Intérieur, Bruno Retailleau, a menacé de démissionner si l’Algérie refusait de reprendre ses ressortissants considérés comme une menace. Il a également laissé entendre qu’une révision de l’accord de 1968, qui accorde des privilèges particuliers aux citoyens algériens en France, pourrait être envisagée.
De son côté, l’Algérie a rejeté le ton menaçant et les ultimatums, affirmant son attachement aux droits de ses citoyens résidant en France.
Dans un communiqué, le ministère algérien des Affaires étrangères a déclaré : « Dans ce climat d’escalade et de tensions initiées par la partie française, l’Algérie n’a en aucun cas cherché la rupture, laissant la France seule assumer l’entière responsabilité de cette situation ».
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L’annonce par Macron, en juillet 2024, de son soutien au plan marocain d’autonomie du Sahara sous souveraineté du Royaume a constitué un tournant majeur dans les relations entre Alger et Paris. Cela a marqué le début d’une montée des tensions et d’une guerre verbale entre les responsables des deux pays.
Cette escalade s’est aggravée après une attaque au couteau à Mulhouse, en France, perpétrée par un Algérien faisant l’objet d’un arrêté d’expulsion, mais que l’Algérie avait refusé de reprendre.
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Le différend s’est encore envenimé avec l’arrestation, le 16 novembre, de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal à l’aéroport d’Alger. Cette arrestation est survenue après que les autorités algériennes ont été outrées par des propos de l’écrivain dans le journal français « Frontier », proche de l’extrême droite, où il reprenait le discours marocain affirmant qu’une partie du territoire algérien avait été annexée sous la colonisation française.
Dans cette interview, Sansal a déclaré que « des villes de l’ouest algérien comme Tlemcen, Oran et Mascara faisaient historiquement partie du Maroc » et a critiqué le régime algérien, affirmant que ses dirigeants « ont inventé le Front Polisario pour déstabiliser le Maroc ».
En réponse, Alger a qualifié Sansal de « falsificateur professionnel ».
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Le comité français de soutien à Boualem Sansal a appelé à une manifestation à Paris mardi pour exiger sa libération, dénonçant la peine de dix ans de prison requise contre lui comme étant « équivalente à une condamnation à mort ».
Dans un appel publié par La Tribune Dimanche, le comité a écrit : « Nous devons tous, citoyens engagés, défenseurs des droits de l’Homme, amoureux de la liberté et figures culturelles, faire échec à ce projet funeste ».
Parmi les signataires figurent l’ancienne membre du Conseil constitutionnel Noëlle Lenoir, l’ancien ministre Jean-Michel Blanquer et les écrivains Georges-Marc Benamou et Alexandre Jardin.
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Le parquet algérien a requis jeudi une peine de dix ans de prison contre Boualem Sansal, âgé de 80 ans, selon les éditions Gallimard. Il est accusé notamment d’ »atteinte à l’unité nationale ».
Le verdict de la Cour criminelle de Dar El Beïda, près d’Alger, sera rendu le 27 mars prochain. L’écrivain, connu pour ses critiques du gouvernement algérien et des islamistes, est détenu à Alger depuis le 16 novembre dernier, selon le journal Echourouk et l’Agence de presse algérienne.
Le comité de soutien à Sansal a ajouté que « malgré lui, il est devenu un otage de cette relation devenue chaotique entre Paris et Alger ».
Les signataires de l’appel ont conclu : « Il est clair que la stratégie du dialogue apaisé et des méthodes ‘douces’ n’a donné aucun résultat tangible jusqu’à présent ». Ils ont insisté sur le fait que l’état de Sansal « se dégrade de jour en jour » en raison de son « incarcération » et de son « cancer ».