Moyen-Orient

Retour qui défie la « Nakba » : Les habitants du nord de Gaza entre le silence des décombres et le tumulte des souvenirs


L’atmosphère était froide, mais elle commençait à s’effacer devant la chaleur du retour à la terre, bien que désormais réduite en décombres, et aux souvenirs, désormais empreints de douleur.

Tel était le tableau sur la route côtière au sud du passage de Netzarim, qui sépare les gouvernorats de Gaza et du nord du centre et du sud de la bande de Gaza.

Là, des milliers de Palestiniens, forcés par Israël de fuir de leurs maisons dans le nord, s’étaient installés sur la terre, attendant le signal du retour qui faillit être emporté par une otage israélienne.

Il s’agissait pour eux d’un premier retour depuis les premières semaines de la guerre, qui dura 15 mois entre Israël et le Hamas, durant laquelle des scènes de meurtres, de destruction et de déplacements forcés ont marqué les esprits.

Des vidéos sur des agences de presse et des comptes de réseaux sociaux ont montré d’énormes foules se dirigeant vers le nord de Gaza à pied à l’aube de ce lundi, portant leurs bagages et leurs enfants sur la tête.

Charge lourde

Ces foules avançaient sur la route comme des fantômes du passé, certaines s’appuyant sur leurs souvenirs, d’autres portant des bagages semblant venir des vestiges des jours d’exil, des enfants sur les épaules, dans l’espoir que leurs pieds retrouvent la terre qui fut jadis un refuge.

Une fois leurs pieds touchant la terre dont les limites s’étaient perdues, les souvenirs déferlèrent sur eux, comme des blessures profondes saignant en silence.

Ce lundi, Israël a commencé à permettre à des milliers de Palestiniens de revenir dans le nord de la bande de Gaza, lourdement détruit.

Conformément à un accord, Tel-Aviv a autorisé les habitants de Gaza à revenir au nord à partir de ce lundi matin, comme l’a annoncé l’armée israélienne. Le communiqué de l’armée précise que les habitants peuvent revenir à pied le long de la route côtière de Rachid, tandis que les véhicules peuvent circuler sur la route intérieure de Salah al-Din après inspection.

Cette décision, qui aurait dû être prise le week-end précédent, avait été retardée à cause des accusations entre le Hamas et Israël, ce dernier affirmant que le Hamas avait modifié l’ordre des otages libérés contre des centaines de prisonniers palestiniens. Cependant, les médiateurs ont résolu ce conflit du jour au lendemain.

Avant leur retour, des milliers de personnes attendaient dans les rues ou sur la plage avec leurs matelas, bagages et réservoirs d’eau, attendant que le poste de contrôle s’ouvre conformément aux conditions du cessez-le-feu.

Souvenirs de la Nakba de 48

Ismail Abu Matar, père de quatre enfants, a attendu trois jours avant de traverser avec sa famille. Il a décrit à l’Associated Press les scènes de joie de l’autre côté, où les gens se retrouvaient et pleuraient en retrouvant leurs proches.

Abu Matar, dont la famille faisait partie des centaines de milliers de Palestiniens ayant fui ou été expulsés de ce qui est maintenant Israël lors de la guerre de 1948, entourant sa création ou la « Nakba », a déclaré : « C’est la joie du retour. Nous pensions que nous ne reviendrions jamais, comme nos ancêtres. »

« Nadia Qassem, du camp de réfugiés de la plage, a ajouté à CNN : « Nous voulons retourner chez nous… même si ma maison a été détruite… mon pays et mon lieu me manquent. »

Le dimanche avant dernier, Israël et le Hamas ont conclu un accord de cessez-le-feu après 471 jours de guerre, déclenchée après une attaque surprise du Hamas sur les colonies autour de Gaza.

Le cessez-le-feu vise à mettre fin à la guerre la plus violente et dévastatrice entre Israël et le Hamas et à assurer la libération des dizaines d’otages capturés lors de l’attaque du 7 octobre 2023 qui a déclenché les combats.

Au début de la guerre, Israël avait ordonné l’évacuation du nord à grande échelle et l’avait fermé peu après l’entrée des troupes terrestres. Environ un million de personnes avaient fui vers le sud à l’époque, tandis que des centaines de milliers étaient restés dans le nord, où se sont déroulées certaines des batailles les plus violentes et des destructions les plus graves de la guerre.

Le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, a affirmé que son pays continuerait à appliquer le cessez-le-feu et que toute personne le violant ou menaçant les forces israéliennes « en assumerait les conséquences ».

Il a écrit sur la plateforme « X » : « Nous ne permettrons pas un retour à la situation du 7 octobre. »

Retour en écho à l’exil

Les tensions croissantes concernant la libération des otages, quelques jours plus tôt, ont menacé de perturber la fragile trêve.

Ces tensions ont encore augmenté samedi, après que le président américain Donald Trump ait exprimé son souhait que la Jordanie et l’Égypte, limitrophes de Gaza, accueillent des centaines de milliers de Palestiniens, soit temporairement, soit « à long terme ».

L’Égypte et la Jordanie ont condamné le plan de Trump pour le déplacement des Palestiniens de Gaza, affirmant qu’une telle démarche constituerait un déracinement des Palestiniens de leur terre.

 

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