Politique

Pourquoi les chefs de l’armée soudanaise craignent-ils un accord nucléaire avec l’Iran ?


La capitale italienne, Rome, a accueilli des négociations entre les États-Unis et l’Iran concernant le programme nucléaire de Téhéran. Des pourparlers que les dirigeants de l’armée soudanaise suivent avec une profonde inquiétude.

Des sources proches de hauts responsables militaires soudanais ont indiqué l’état-major suit de très près les déclarations des responsables américains et iraniens faisant état de progrès dans les négociations.

Le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, a déclaré dimanche que si le réalisme et la bonne foi prévalaient dans les discussions indirectes avec Washington, il serait possible « d’aboutir à des résultats positifs », selon l’agence de presse iranienne Mehr.

Pourquoi cela inquiète-t-il Khartoum ?

Les dirigeants de l’armée soudanaise restent déterminés à poursuivre les combats contre les Forces de soutien rapide, écartant toute solution diplomatique et refusant le dialogue pour résoudre le conflit qui dure depuis 2023.

L’armée soudanaise s’appuie sur les drones iraniens pour prendre l’avantage sur les forces adverses. Ces drones kamikazes ont récemment permis à l’armée de reprendre le contrôle de vastes zones stratégiques de la capitale, y compris des sites souverains.

Malgré les critiques internationales sur l’utilisation non réglementée de ces drones qui mettent en danger les civils, l’armée soudanaise présente ces reconquêtes comme des victoires stratégiques.

Les sources affirment que les chefs militaires craignent qu’une avancée dans les négociations entre Téhéran et Washington n’entraîne un arrêt de l’approvisionnement en drones par l’Iran.

Est-ce envisageable ?

La deuxième série de pourparlers irano-américains s’est conclue samedi à Rome par un accord sur la mise en place d’un mécanisme technique à travers des réunions d’experts, avant une troisième série prévue à Mascate, capitale du Sultanat d’Oman.

Lors de cette rencontre indirecte – la deuxième en une semaine – Abbas Araghchi a négocié durant environ quatre heures avec l’envoyé spécial de Trump au Moyen-Orient, Steve Witkoff, par l’intermédiaire du ministre omanais des Affaires étrangères, Badr Al-Busaidi.

Selon un communiqué du ministère omanais, les deux parties ont convenu « de passer à l’étape suivante en vue d’un accord juste, durable et contraignant ».

Le texte précise que l’accord potentiel garantirait « une Iran totalement dénucléarisée et levée des sanctions », tout en « conservant sa capacité de développer l’énergie nucléaire à des fins pacifiques ».

Il est également souligné que « le dialogue et la transparence sont la seule voie vers un accord crédible et bénéfique pour toutes les parties au niveau régional et international ».

Les chefs de l’armée soudanaise comprennent qu’un accord entre Washington et Téhéran signifierait un retrait iranien des conflits régionaux, surtout que les États-Unis ont parrainé plusieurs initiatives de médiation pour mettre fin à la guerre au Soudan.

Un secret difficile à garder

Des sources proches des cercles décisionnels militaires ont révélé à que les responsables savent pertinemment que les livraisons de drones « Mohajer-6 » reçues l’an passé sont désormais connues de Washington. Ces drones monomoteurs sont les mêmes que ceux que les États-Unis ont accusé l’Iran de fournir à la Russie durant la guerre en Ukraine.

Scott Bessent, secrétaire au Trésor américain, a déclaré que Téhéran continue « d’utiliser les revenus du pétrole pour financer son programme nucléaire, produire des missiles balistiques et des drones meurtriers, et soutenir ses agents terroristes dans la région », soulignant l’engagement de Washington à cibler toutes les tentatives de financement de ces activités hostiles.

En février de l’année dernière, l’agence Bloomberg rapportait que l’Iran avait fourni à l’armée soudanaise des drones Mohajer-6, capables de surveillance et de transport d’explosifs, citant des images satellites montrant un tel drone sur la base de Wadi Seidna, au nord d’Omdurman, contrôlée par l’armée.

Peu avant la fin de son mandat au Soudan en mars 2024, l’ambassadeur américain John Godfrey a qualifié les rapports sur un soutien militaire iranien à l’armée soudanaise de « profondément préoccupants ».

Des analystes estiment que le moment du rétablissement des relations diplomatiques entre Khartoum et Téhéran – après sept ans d’interruption – a suscité des interrogations dans les cercles occidentaux quant aux intentions du gouvernement militaire basé à Port-Soudan.

Cette reprise diplomatique, survenue en octobre 2023, soit six mois après le début de la guerre, semble selon ces observateurs indiquer une volonté de coopération militaire renforcée entre l’armée soudanaise et l’Iran en échange de livraisons d’armes.

Un diplomate, sous couvert d’anonymat, a declaré que Téhéran profite du besoin en armement du Soudan pour étendre son influence sur la mer Rouge et y soutenir ses opérations logistiques, notamment l’approvisionnement en armes des Houthis au Yémen.

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