Politique

L’inauguration du barrage de la Renaissance accentue les tensions entre l’Éthiopie, le Soudan et l’Égypte


L’Éthiopie a annoncé une avancée majeure dans l’exploitation du Grand barrage de la Renaissance (GERD), après avoir installé une technologie avancée qui permet de contrôler intégralement la centrale hydroélectrique depuis la capitale, Addis-Abeba. L’inauguration officielle du barrage est prévue pour le mardi 9 septembre, et ce malgré l’absence d’un accord consensuel avec les deux pays en aval, l’Égypte et le Soudan.

Cette décision accroît les tensions régionales, Le Caire et Khartoum estimant que la construction du barrage menace leurs intérêts stratégiques. Le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, insiste cependant sur le fait que l’ouvrage ne constitue une menace pour aucun des deux pays, affirmant que son pays n’utilise qu’une part limitée des ressources du fleuve transfrontalier et qu’« il n’a rien pris qui ne lui appartienne pas ».

Dans une interview télévisée, Abiy Ahmed a souligné que, malgré le stockage de 74 milliards de mètres cubes d’eau, le débit du Nil vers les pays en aval se poursuit. Il a rappelé qu’« il est scientifiquement et techniquement impossible d’arrêter totalement l’écoulement de l’eau, le barrage n’ayant pas été conçu à cette fin ».

Au Caire, les inquiétudes se concentrent sur la réduction possible de la part égyptienne du Nil, tandis qu’au Soudan les craintes portent sur la sécurité du barrage, construit dans une zone classée sismique.

Lors de la deuxième réunion du mécanisme de concertation « 2+2 » entre l’Égypte et le Soudan, organisée au Caire mercredi dernier, les deux pays ont affirmé que le barrage éthiopien viole le droit international et entraîne de graves conséquences pour les États riverains. Ils ont dénoncé les décisions unilatérales d’Addis-Abeba concernant le remplissage et l’exploitation du barrage, soulignant les dangers liés à la sécurité de l’ouvrage, aux déversements incontrôlés et à la gestion des périodes de sécheresse.

Le directeur du projet, l’ingénieur Kefle Horo, a déclaré au média officiel « Gazeta Plus » que l’Éthiopie avait installé une technologie de pointe permettant un contrôle complet depuis Addis-Abeba. Selon lui, le barrage est une centrale énergétique automatisée, dotée d’un système de gestion moderne. Il a précisé que l’ouvrage sera exploité exclusivement par des experts éthiopiens, qui ont été formés depuis le début des travaux afin de maîtriser chaque composant du projet. Pour lui, le GERD est plus qu’un simple ouvrage hydraulique : « c’est un symbole identitaire qui porte l’empreinte de tous les Éthiopiens ».

En revanche, des spécialistes égyptiens estiment que cette approche nuira directement à l’Égypte et pourrait, à terme, entraîner une confrontation avec Addis-Abeba. Abbas Sharaki, professeur de géologie et des ressources hydriques à l’Université du Caire, a indiqué que le niveau du barrage avait atteint sa capacité maximale, soit 64 milliards de mètres cubes à une altitude de 640 mètres. Il a ajouté que les apports du Nil à destination de l’Égypte seront complets cette année, le barrage ayant été achevé sur le plan structurel et hydraulique depuis septembre dernier.

Face aux annonces éthiopiennes, le ministre égyptien de l’Irrigation, Hani Sweilam, a réaffirmé le refus catégorique de son pays quant à la politique du fait accompli menée par Addis-Abeba. Il a dénoncé une stratégie unilatérale qui contrevient au droit international et persiste à présenter le barrage comme une réussite achevée, alors qu’aucun accord juridiquement contraignant n’a été conclu avec l’Égypte et le Soudan.

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