L’Europe et la bataille contre les Frères musulmans : le cordon de défense s’étend

Le continent européen connaît une transformation notable dans sa manière de traiter avec les Frères musulmans, alors que la plupart des gouvernements occidentaux considèrent désormais le mouvement comme une menace idéologique dépassant les limites du prosélytisme religieux pour s’étendre aux sphères du pouvoir politique et de l’influence sociale.
Tandis que des pays comme l’Autriche, l’Allemagne et la France adoptent une surveillance stricte, voire interdisent de facto leurs activités, l’Irlande s’ajoute récemment au débat européen autour de l’avenir du groupe sur le Vieux Continent, au moment où des voix parlementaires s’élèvent pour réclamer une enquête officielle sur son niveau d’infiltration dans le pays.
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Irlande : un avertissement précoce contre une « infiltration silencieuse »
À Dublin, la sénatrice indépendante Sharon Keogan a mis en garde, devant la chambre haute du Parlement irlandais, contre le risque de voir son pays permettre aux Frères musulmans de « prospérer sans contrôle ni surveillance ». Elle a exhorté le gouvernement à agir sans délai et à ouvrir une enquête approfondie sur les activités du mouvement.
Keogan a estimé que l’inaction du gouvernement irlandais représenterait « une erreur stratégique » face à ce qu’elle a décrit comme une « infiltration idéologique silencieuse » susceptible d’éroder la cohésion sociale sur le long terme.
Selon elle, les Frères musulmans n’ont pas renoncé à leur objectif fondamental : construire un système politique transnational cherchant à recréer le modèle de ce qu’ils appellent le « califat islamique », mais en utilisant des moyens plus subtils fondés sur le discours religieux et les activités sociales.
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Les mises en garde de Keogan sont survenues après la fermeture en avril dernier de la plus grande mosquée d’Irlande, située dans la banlieue de Clonskeagh, à Dublin, à la suite de différends administratifs et de soupçons de liens entre certains responsables et des courants religieux extrémistes.
Bien que la direction du Centre culturel islamique d’Irlande (ICCI) ait affirmé que la fermeture constituait « une mesure préventive pour des raisons de sécurité », l’affaire a rapidement pris une tournure politique, des médias ayant établi des liens entre le centre et des individus proches des Frères musulmans.
Keogan a considéré cette crise comme un microcosme d’un conflit plus large au sein de l’islam européen : d’un côté, un courant réformiste prônant une intégration complète dans les sociétés occidentales ; de l’autre, une mouvance politisée cherchant à renforcer l’influence du mouvement sous couvert d’activités religieuses et caritatives.
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La question irlandaise s’inscrit dans un contexte européen plus vaste marqué par un tournant radical à l’égard des Frères musulmans. Au Royaume-Uni, une révision officielle menée en 2015 a conclu que la pensée du mouvement présentait « des signes de radicalisme », bien que le gouvernement n’ait pas opté pour une interdiction totale.
L’Autriche est allée plus loin : en 2021, elle a fermé plusieurs associations et centres culturels affiliés au mouvement dans le cadre de la « nouvelle loi islamique », imposant une surveillance stricte du financement et du discours religieux des institutions musulmanes. En Allemagne, l’Office fédéral de protection de la Constitution a placé plusieurs organisations liées au mouvement sous surveillance, estimant qu’elles « cherchent progressivement à saper le système démocratique de l’intérieur ».
Pour de nombreux analystes, ces mesures traduisent un passage du « tolérantisme » à la vigilance : les Frères musulmans ne sont plus considérés comme un simple courant religieux conservateur, mais comme un réseau politique et idéologique exploitant l’action caritative pour bâtir une influence sociale durable.
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Une structure tentaculaire
Le mouvement, classé terroriste dans plusieurs pays, s’appuie sur un réseau dense d’institutions, de centres culturels, d’associations étudiantes et d’organisations caritatives pour étendre sa présence en Europe. Ces entités, souvent enregistrées sous des appellations culturelles ou religieuses, servent de points d’ancrage idéologiques et organisationnels.
Les Frères musulmans tirent également parti de la liberté de culte et d’expression garantie par les démocraties européennes, ainsi que de financements transnationaux difficiles à tracer, pour consolider leur implantation au sein des communautés musulmanes, notamment auprès des jeunes et des minorités.
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Scénarios d’avenir
Les perspectives d’évolution du mouvement en Europe se répartissent entre trois scénarios principaux :
- L’escalade et l’interdiction totale : plusieurs pays, à l’instar de l’Irlande, pourraient rejoindre le camp des partisans du bannissement complet, poussant ainsi le mouvement à la clandestinité.
- Le contrôle structuré : certains gouvernements pourraient privilégier un encadrement financier et administratif strict sans aller jusqu’à l’interdiction, afin d’affaiblir progressivement l’emprise idéologique du mouvement.
- La désintégration progressive : les pressions extérieures et les divisions internes pourraient entraîner l’éclatement du mouvement, qui perdrait alors sa cohésion organisationnelle pour se fragmenter en groupes locaux isolés.
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En conclusion de son discours au Sénat, Sharon Keogan a averti : « Nous ne pouvons pas être naïfs. La sécurité et la cohésion de notre République dépendent de notre capacité à reconnaître la réalité de cette influence et à y faire face avant qu’elle ne devienne une menace silencieuse pour notre identité nationale. »
Ainsi, alors que le ton se durcit en Irlande sur fond de crispation européenne, les Frères musulmans semblent entrer dans une phase de redéfinition de leur présence sur le continent — entre l’option d’une confrontation ouverte et celle d’une adaptation forcée à un environnement de plus en plus restrictif.
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