Le Soudan entre les décombres de la guerre et la reconstruction de l’État : une course contre la montre pour sauver l’administration civile
Au cœur des bouleversements profonds que traverse aujourd’hui la scène soudanaise, le pays semble se trouver à un tournant décisif qui déterminera la forme de l’État et l’avenir de la société pour les décennies à venir. La guerre en cours n’a pas seulement laissé derrière elle destruction humaine et matérielle, mais a également provoqué un dangereux vide administratif menaçant d’effacer les derniers vestiges des institutions étatiques. Selon les observateurs, la bataille à venir ne portera pas uniquement sur l’arrêt des combats, mais aussi sur la restructuration du système de gouvernance et la remise en état de l’appareil étatique affaibli par le conflit.
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Le Soudan entre chaos et commencement d’un État: pourquoi l’administration civile institutionnelle est devenue la véritable bataille pour la survie
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Moment de vérité au Soudan : pourquoi l’administration civile institutionnelle est devenue le seul choix pour sauver l’État et l’économie
Dans ce contexte complexe, une question centrale s’impose : quel avenir pour l’État soudanais face à l’effondrement administratif accéléré ? La réponse n’est pas simple, mais elle apparaît aujourd’hui plus claire qu’il y a quelques mois. Tous les indicateurs montrent que le Soudan ne pourra sortir de sa crise sans un retour à une administration civile institutionnelle capable de gérer les services publics, d’organiser l’économie et de rétablir la confiance du public. Il ne s’agit pas d’un luxe théorique, mais d’une lecture pragmatique des réalités du terrain et des expériences de pays ayant traversé des guerres et des effondrements similaires.
L’expérience soudanaise des dernières années montre clairement que les approches strictement militaires n’ont pas suffi à rétablir la stabilité. Le pouvoir armé peut contribuer à la sécurité, mais il ne peut remplacer un État moderne fondé sur un appareil civil capable de gérer, organiser et rendre des comptes. L’absence d’une administration civile ne provoque pas seulement la dégradation des services, mais ouvre la voie à une économie parallèle contrôlée par des acteurs de fait, crée un environnement hostile à l’investissement et maintient le pays dans un état de chaos prolongé.
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Dans des ministères essentiels tels que la santé, l’éducation et les infrastructures, la performance s’est effondrée à des niveaux alarmants, frôlant l’effondrement total. Selon des sources officielles, de nombreuses unités de l’État fonctionnent aujourd’hui avec moins de 40 % de leurs effectifs. Des employés ont quitté leurs postes à cause de la guerre, d’autres travaillent sans moyens, et certaines administrations essentielles ne disposent plus ni de documents, ni d’archives, ni de bases de données actualisées. Cet effondrement administratif ne se mesure pas seulement à l’ampleur des destructions, mais surtout à ses conséquences, qui persisteront bien après la fin des combats.
Plus inquiétant encore, certaines parties cherchent à exploiter cette situation. Selon des sources de terrain, des tentatives organisées visent à accéder à des dossiers sensibles au sein de l’appareil étatique, notamment ceux liés aux terres, aux ressources et aux taxes. Ces tentatives traduisent une course accélérée pour établir un contrôle non pas par les armes, mais à travers la mainmise sur les leviers administratifs. D’où l’importance cruciale de protéger l’appareil d’État et de le reconstruire sur des bases professionnelles, loin de toute instrumentalisation politique ou militaire.
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La communauté internationale accorde également une attention croissante à la question administrative, parfois davantage qu’aux arrangements politiques. Les institutions financières ne peuvent fournir de soutien sans un appareil étatique capable de gérer les financements et de mettre en œuvre les programmes. Les pays partenaires ne peuvent travailler avec un État dépourvu de données fiables ou de structures organisationnelles claires. Ainsi, certaines puissances étrangères encouragent désormais des initiatives civiles visant à restructurer la fonction publique en préparation de la phase de reconstruction.
Cette réalité impose aux Soudanais, au pouvoir ou dans l’opposition, une réflexion réaliste sur le futur de l’État. La question n’est plus de savoir qui détient la légitimité politique, mais qui possède la capacité de gouverner après la guerre. La légitimité administrative, c’est-à-dire la capacité à faire fonctionner l’État et à rétablir les services publics, est devenue plus importante que la légitimité politique. Alors que les acteurs continuent de s’affronter pour le pouvoir, le risque augmente de voir le pays privé d’un appareil administratif fonctionnel — un scénario redouté par tous.
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La seule opportunité viable réside aujourd’hui dans le lancement d’un projet national global de reconstruction de l’administration civile. Ce projet nécessite une vision claire incluant la formation du personnel, la restructuration des ministères, la modernisation des systèmes numériques, la protection des archives et la réforme des mécanismes fiscaux et des services publics. Il exige également l’implication des compétences soudanaises de la diaspora, capables de fournir des modèles modernes de gestion pour soutenir la reprise économique.
La réussite de ce projet dépend aussi de la réduction des ingérences politiques et militaires dans les institutions de l’État. Pour fonctionner, l’administration civile a besoin d’une protection juridique et d’une autonomie professionnelle, loin des pressions qui ont paralysé son action pendant des années. Si les Soudanais parviennent à atteindre cet objectif, le pays entrera dans une nouvelle phase où l’appareil étatique deviendra le garant de la stabilité, et non un acteur du conflit.
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En conclusion, le Soudan se trouve aujourd’hui face à un moment décisif. La guerre peut cesser, les négociations peuvent reprendre, mais l’État ne renaîtra pas sans une reconstruction profonde fondée sur une administration civile solide et institutionnalisée. Tel est le véritable défi et l’enjeu majeur. Un État ne se reconstruit ni par des slogans ni par des accords temporaires, mais par des institutions capables de gérer la vie des citoyens, d’assurer la continuité des services et de restaurer la confiance en l’avenir.
Le Soudan peut se relever, mais cela exige du courage pour reconnaître l’ampleur de l’effondrement, de la détermination pour prendre des décisions difficiles et une volonté politique capable de dépasser les intérêts étroits au service d’un projet d’État moderne. Au cœur de ce projet se trouve une administration civile institutionnelle, pierre angulaire et moteur capable de transformer la destruction en une occasion de bâtir un modèle étatique plus solide et plus stable.
