Ciblage de la vitrine administrative : des scénarios douloureux pour l’avenir des Houthis

La frappe israélienne qui a visé des dirigeants houthis a provoqué un état de désarroi au sein du mouvement, soulevant des interrogations sur l’impact de la perte de sa génération dirigeante.
Samedi, les milices houthis ont annoncé la mort de leur Premier ministre non reconnu à l’international, Ahmad Ghalib al-Rahwi, ainsi que de plusieurs de ses ministres, lors de la frappe israélienne menée jeudi sur Sanaa.
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Un vide et une confusion
Des analystes estiment que la disparition du chef du gouvernement houthiste et de plusieurs membres de son cabinet a créé une brèche évidente dans la structure administrative du groupe, affaiblissant ainsi sa capacité à gérer le conflit et à élaborer des stratégies.
Selon eux, le ciblage de responsables houthis, indépendamment de leur poids politique ou militaire, constitue un tournant majeur dans la confrontation. Cette dynamique soulève des débats sur l’avenir du mouvement, en particulier si ces éliminations se poursuivent et affectent ses processus décisionnels.
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Pour le politologue yéménite Bassam al-Hakimi, la perte de figures administratives et de la façade politique des Houthis influe directement sur la rapidité de la prise de décision, tout en privant le groupe d’une expertise accumulée dans divers domaines.
Il a affirmé que « la disparition de cette génération administrative et des dirigeants de façade représente une évolution significative sur les plans organisationnel et politique, avec des répercussions directes et indirectes sur le mouvement ».
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Selon lui, cette perte fragilise la capacité décisionnelle des Houthis en raison de la disparition d’expériences accumulées dans des domaines tels que la gestion du conflit, la négociation, la mobilisation des ressources ou encore l’équilibre des rapports de force, aussi bien en interne qu’avec leurs alliés et adversaires.
Il ajoute que « l’absence de ces figures entraîne un ralentissement dans la prise de décision, notamment sur des dossiers complexes tels que la gestion des fronts militaires ou les relations avec les alliés. Elle ouvre également la voie à l’ascension de nouvelles élites, plus jeunes et plus radicales, mais dépourvues d’expérience, ce qui accentue les risques de confusion dans la phase à venir ».
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Un état de paralysie interne
De son côté, le chercheur politique Saleh al-Duwail considère que cette frappe a provoqué une paralysie partielle au sein du groupe, en ciblant sa vitrine dirigeante.
Il a souligné que les Houthis auront besoin de temps pour compenser ces pertes, ce qui réduit leur capacité à planifier et à agir efficacement à court terme.
Il met également en garde contre les risques engendrés par l’affaiblissement du tissu administratif du mouvement, ce qui pourrait entraîner une mauvaise coordination entre les anciennes et les nouvelles générations de dirigeants, augmentant ainsi la probabilité d’erreurs stratégiques.
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Abdelqader al-Khali, professeur de sciences politiques à l’université de Taiz, partage cette analyse quant à l’impact de la frappe israélienne, bien qu’il le juge limité.
« Il est indéniable que les Houthis ont perdu des cadres dans cette attaque, mais il ne s’agissait pas de figures de premier plan directement impliquées dans la prise de décision politique ou dans le contrôle du mouvement », a-t-il déclaré.
Cependant, al-Khali a souligné « l’émergence d’une nouvelle phase du travail de renseignement, qui commence à porter ses fruits ».
Il anticipe, dans les prochains jours, des frappes israéliennes visant des dirigeants houthis plus influents, issus des premier et deuxième cercles de commandement, ou encore des responsables militaires dont les décisions pèsent directement sur l’orientation du mouvement.