Al-Joulani est-il devenu modéré ou agit-il simplement avec pragmatisme et prudence ? Un professeur de sciences politiques répond

Frédéric Encel, professeur de sciences politiques et de relations internationales à la Paris Business School, estime que les nouveaux dirigeants en Syrie disposent de cartes extrêmement faibles. Bien qu’ils aient rapidement renversé le régime d’al-Assad, leurs ressources internes restent très limitées. Il affirme que les différentes communautés, y compris les alaouites, les chrétiens, les druzes, et surtout les Kurdes, observent attentivement la manière dont ils agiront à l’avenir.
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Dans un entretien publié par le Centre arabe pour l’étude de l’extrémisme, il ajoute que la région du nord-est, qui fait partie du Kurdistan, échappe toujours complètement au contrôle du nouveau régime, lequel demeure militairement relativement faible.
Encel a déclaré également : « Je ne pense pas que al-Joulani soit devenu modéré. Il n’existe pas d’islamistes modérés. Mais je pense que lui et ses hommes agiront avec un grand pragmatisme et une extrême prudence pour plusieurs raisons : ils savent qu’ils doivent beaucoup – sinon tout – à la Turquie ; ils sont conscients des risques liés à la proximité de la frontière israélienne ; et ils ne contrôlent qu’une infime portion du territoire syrien ».
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Il a aussi souligné que le président Erdoğan n’est qu’un manipulateur, et que le soutien turc a joué un rôle décisif dans l’offensive éclair ayant renversé Assad, d’autant plus que la ville d’Idleb, bastion des rebelles, se trouve à la frontière turque. Selon lui, sans la complicité – militaire et économique – de la Turquie, ou à tout le moins sa tolérance, les jihadistes n’auraient jamais pu l’emporter.
Pendant des années, Erdoğan a cherché à renvoyer entre deux et trois millions de réfugiés syriens ayant fui vers la Turquie au début du conflit. La Turquie a utilisé la question des réfugiés comme prétexte pour justifier son intervention dans le nord de la Syrie, ce qui constitue, en droit international, une occupation formelle.
Dans la Syrie post-Assad, Erdoğan apparaît comme le principal vainqueur, agissant comme le parrain du front qui a renversé le régime.
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