Politique

Shahed-136 : des drones russes menacent désormais les avions de combat ukrainiens


La technologie militaire franchit une nouvelle étape dans la guerre en Ukraine, après la diffusion d’images montrant un drone russe Shahed-136 équipé d’un missile air-air R-60. Il s’agit d’une évolution qui accroît le niveau de risque pour les pilotes chargés d’intercepter ces drones suicides, autrefois considérés comme des cibles relativement simples.

La vidéo publiée par la fondation ukrainienne Sternenko montre l’interception du drone alors qu’il était équipé du missile, avant d’être détruit par un missile ukrainien Stinger, selon le site The War Zone. On y voit le missile fixé sur un lanceur installé au-dessus du nez de l’appareil, une scène inédite qui illustre une tendance russe à transformer ces drones d’attaque unidirectionnels en plates-formes dotées d’une capacité limitée de combat aérien.

Les débris du drone Shahed montrent le missile fixé sur sa partie supérieure.

Le missile R-60, connu en Occident sous le nom AA-8 Aphid, est un missile soviétique à guidage thermique entré en service dans les années 1970, mais toujours largement utilisé. Grâce à sa taille relativement réduite et à son faible poids, il constitue une option adaptée aux modifications de plates-formes non conventionnelles, comme les drones suicides.

Des précédents indiquent que ces missiles ont été employés sur des navires sans pilote ukrainiens ou par les Houthis au Yémen. L’Ukraine a également intégré des missiles air-air à courte portée tels que les R-73 et AIM-9 sur ses embarcations sans pilote pour menacer les avions russes qui s’en approchent.

Les photos publiées par l’expert ukrainien Serhiy Beskrestov montrant les débris d’un Shahed-136 équipé du nouveau missile renforcent encore la crédibilité de cette évolution.

Ces images montrent le missile toujours fixé à un lanceur du type généralement utilisé sur les avions de combat, ce qui indique que la Russie n’a pas eu recours à un montage improvisé, mais s’est appuyée sur des composants aéronautiques existants.

Cependant, le mode de fonctionnement réel de cette arme hybride reste flou. Il est presque certain que le drone utilise un système de pilotage humain direct, intégré par la Russie à certaines versions modernisées du Shahed depuis début 2024.

Ce système permet à l’opérateur de contrôler le drone en temps réel via une liaison directe ou des réseaux cellulaires, voire potentiellement via des réseaux de communication étendus. Le positionnement du missile à l’avant permettrait à l’opérateur d’orienter le drone vers la cible juste avant d’obtenir le verrouillage thermique nécessaire au tir.

Les débris du drone Shahed montrent le missile fixé sur sa partie supérieure.

Malgré cela, la capacité de combat de cette configuration reste limitée. Le R-60 possède un champ d’engagement restreint en termes d’angles, et le drone lui-même reste lent et peu manœuvrable. L’intégration du missile pourrait en outre réduire sa stabilité et ses performances aérodynamiques. De plus, la manière dont le drone détecterait les avions ukrainiens reste incertaine, que ce soit via une aide extérieure ou par une réaction directe lors de tentatives d’interception.

Les inquiétudes ukrainiennes grandissent face à ce développement. Des responsables militaires affirment que les drones pilotés en temps réel sont nettement plus difficiles à neutraliser : l’opérateur peut manœuvrer, changer de direction et menacer les avions intercepteurs grâce au missile embarqué ou même par une tentative de collision, technique particulièrement dangereuse pour les hélicoptères volant à basse altitude et disposant d’une manœuvrabilité limitée.

L’histoire récente ajoute un précédent significatif : en 2002, un drone américain MQ-1 Predator avait tiré un missile Stinger sur un avion de chasse irakien qui tentait de l’abattre, ce qui avait ensuite dissuadé les forces irakiennes d’attaquer les drones américains. Moscou semble chercher à obtenir un effet dissuasif similaire en armant le Shahed d’un missile air-air.

Les débris du drone Shahed montrent le missile fixé sur sa partie supérieure.

Cette modification représente une nouvelle étape dans la série d’améliorations russes apportées à ce drone d’origine iranienne, aujourd’hui produit en plusieurs variantes en Russie, dont certaines équipées d’un moteur à réaction.

Les tendances actuelles laissent envisager l’intégration future de technologies de détection ou de ciblage fondées sur l’intelligence artificielle, pouvant accroître le niveau de menace.

On ignore encore quand cet armement hybride pourrait tenter son premier véritable engagement aérien contre un avion ukrainien, mais la simple possibilité de la présence d’un missile R-60 sur les Shahed-136 constitue déjà un facteur de risque supplémentaire pour les pilotes ukrainiens, ajoutant un niveau de complexité supplémentaire à la guerre aérienne au-dessus de l’Ukraine.

Afficher plus
Bouton retour en haut de la page