Golfe Persique

Pourquoi les médiations qataries ont échoué à résoudre plus d’une crise


Doha ne jouit plus dune confiance absolue en tant que médiateur « impartial », que ce soit dans les crises du Moyen-Orient, dAfrique ou dEurope, en raison de ses relations avec des groupes rebelles ou islamistes radicaux, ou à cause de conflits dintérêts et de financements douteux.

Le Qatar, émirat du Golfe riche et l’un des plus grands producteurs de gaz au monde, est récemment devenu le centre d’attention à l’échelle mondiale, s’activant sur plusieurs fronts pour jouer le rôle de médiateur dans des crises complexes et parfois sanglantes, comme la guerre israélienne contre Gaza. Il s’est présenté comme un acteur clé pour parvenir à une trêve qui s’est rapidement effondrée, un échec diplomatique qui ne fait pas exception dans une série d’échecs plus larges, alors que Doha s’est engagée dans des conflits complexes en Afrique.

Bien que Doha joue un rôle actif dans la médiation des conflits régionaux et internationaux, ses efforts n’ont pas toujours été couronnés de succès. L’échec des médiations qataries s’explique par plusieurs raisons interconnectées.

De nombreuses crises dans lesquelles le Qatar est intervenu étaient extrêmement complexes et profondément enracinées, rendant difficile la recherche de compromis satisfaisants pour toutes les parties. À titre d’exemple, le conflit israélo-palestinien est marqué par une longue histoire de violence et de méfiance, avec des questions fondamentales comme les frontières, les réfugiés et Jérusalem rendant tout accord durable difficile à atteindre.

Nombreux sont ceux qui pensent que le conflit, qui s’est intensifié depuis l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023 contre le sud d’Israël, suivie de la riposte israélienne la plus meurtrière de l’histoire du conflit, est bien trop vaste et complexe pour que Doha puisse y mettre fin, malgré ses bonnes relations avec les deux parties.

Le médiateur qatari a tenté de capitaliser sur ses relations avec le Hamas pour promouvoir une accalmie et mettre fin à des mois de tueries quotidiennes, tandis que le Qatar faisait face à des accusations de Tel-Aviv et de Washington l’accusant d’avoir armé et financé le mouvement islamiste palestinien.

Il est également estimé que Doha ne bénéficie plus d’une confiance absolue comme médiateur « impartial », que ce soit dans les crises du Moyen-Orient, d’Afrique ou d’Europe de l’Est, notamment depuis qu’elle a voulu jouer un rôle dans la résolution du conflit russo-ukrainien, en raison de ses liens avec des groupes rebelles ou islamistes radicaux et de sa participation passée au paiement de rançons à des organisations terroristes, un financement direct sous couvert humanitaire.

Le Qatar s’est illustré par l’intermédiaire de son principal négociateur, le ministre d’État aux Affaires étrangères Mohammed Al-Khulaifi, comme médiateur dans le conflit ayant éclaté récemment en République démocratique du Congo, où le mouvement armé M23, soutenu par le Rwanda, a réalisé une série d’avancées rapides dans l’est du pays, riche en ressources naturelles.

Al-Khulaifi a déclaré : « Cette réunion a contribué à ouvrir une véritable voie vers une désescalade et un accord sur un mécanisme de mise en œuvre », ajoutant : « Nous avons réussi à établir une ligne de communication souple entre les deux parties, et nous espérons obtenir d’autres succès dont vous entendrez parler dans les jours à venir. »

Il a ajouté, après les rencontres entre les présidents, que le Qatar avait convaincu le M23, le Rwanda et la RDC de « calmer la situation » près de la ville de Walikale, un centre minier stratégique, expliquant que cela avait permis « un retrait de Walikale vers l’est, en direction de Goma. Ce mouvement en lui-même constitue, selon nous, une évolution positive », en référence à la capitale de la province du Nord-Kivu en RDC, sous contrôle du M23.

Al-Khulaifi a souligné que les États-Unis étaient considérés comme un « partenaire fiable » en RDC, exprimant son espoir de discuter du conflit avec l’émissaire américain pour l’Afrique, Mossad Boules, à Washington dans les prochains jours.

Certains estiment également que les conflits d’intérêts régionaux et internationaux jouent un rôle dans l’échec des médiations qataries. D’autres puissances régionales et internationales impliquées dans ces conflits peuvent avoir des intérêts divergents et ne pas soutenir un accord qui ne correspond pas à leur agenda, sapant ainsi les efforts de médiation.

Parfois, l’une ou les deux parties peuvent ne pas être prêtes à faire les concessions nécessaires pour parvenir à un accord, en raison de positions politiques ou idéologiques rigides, ou de la conviction d’avoir l’avantage sur le terrain. Les interventions d’autres acteurs extérieurs peuvent aussi compliquer ou faire échouer la médiation, surtout si elles visent à défendre des intérêts opposés ou à soutenir un camp en particulier.

Au cœur de ce débat émerge une question sur la nature même du médiateur. Bien que le Qatar bénéficie d’un respect international et de bonnes relations avec de nombreux acteurs, sa petite taille et son rôle régional limité peuvent restreindre sa capacité à exercer une influence suffisante pour pousser les parties à faire des concessions difficiles. De plus, certains peuvent voir Doha avec méfiance en raison de ses liens avec certains groupes ou États dans la région.

Récemment, Doha a cherché à jouer un rôle dans la crise entre la Russie et l’Ukraine, en se rapprochant de Moscou. Une crise dans laquelle interviennent également l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et récemment les États-Unis, dans le cadre d’efforts plus larges visant à mettre fin à la guerre.

Le Qatar a également tenté de se repositionner dans le dossier du nucléaire iranien, en transférant des messages américains à Téhéran et en réaffirmant sa volonté de jouer un rôle de médiateur. Mais, dans les années précédentes, les tentatives qataries pour résoudre cette crise n’ont pas permis de mettre fin aux tensions.

Cependant, l’échec de certaines médiations ne diminue pas l’importance du rôle que joue le Qatar dans la recherche de solutions pacifiques aux conflits. Même lorsqu’elles n’aboutissent pas à un règlement complet, ces médiations contribuent souvent à réduire les tensions et à ouvrir des canaux de communication qui peuvent s’avérer décisifs à l’avenir — ce qui permet aux Qataris de promouvoir leur action diplomatique comme un succès que d’autres n’ont pas su atteindre.

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