Le complot alourdit les souffrances des Frères musulmans tunisiens : des têtes en prison et des bases démoralisées

De nouvelles condamnations judiciaires à l’encontre des Frères musulmans tunisiens ajoutent un chapitre de plus à la trajectoire d’un déclin que ni les manœuvres de diversion ni les rumeurs n’ont pu enrayer.
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Un tribunal tunisien a prononcé des peines de prison allant de 13 à 66 ans contre une quarantaine d’accusés, parmi lesquels figurent des cadres de premier plan des Frères musulmans, pour leur implication dans une affaire de « complot contre la sûreté de l’État », selon les médias officiels locaux.
le premier substitut du procureur de la République près du pôle judiciaire antiterroriste, ces peines de prison concernent des accusations de « complot contre la sécurité intérieure et extérieure de l’État » et de « formation d’un groupe terroriste lié à des crimes terroristes et adhésion à celui-ci », sans fournir davantage de détails.
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Origines de l’affaire
L’affaire remonte à février 2023, lorsque les autorités tunisiennes ont arrêté plusieurs figures politiques majeures, dont Khayam Turki (Parti Ettakatol / social-démocrate), Abdelhamid Jelassi, cadre des Frères musulmans, Noureddine Bhiri, ex-ministre de la Justice et vice-président du mouvement Ennahdha (affilié aux Frères musulmans), ainsi que l’homme d’affaires Kamel Latif, l’ex-directeur général de la Sûreté nationale Sami Hichri, et l’homme d’affaires influent Fawzi Fkih.
Selon les investigations, les accusés auraient tenté, le 27 janvier 2023, de renverser le pouvoir en exploitant les tensions sociales et en semant le chaos la nuit, en coordination avec des éléments à l’intérieur du palais présidentiel.
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Les forces de sécurité et les services de renseignement tunisiens ont réussi à contrecarrer le complot en suivant les appels, communications et déplacements des suspects. Il est apparu que Khayam Turki, désigné par les Frères pour succéder au président Kaïs Saïed, jouait un rôle central dans la coordination du plan.
Des réunions ont eu lieu au domicile de Khayam Turki à Sidi Bou Saïd, rassemblant des cadres du mouvement Ennahdha, des diplomates, des hommes d’affaires, et Kamel Latif, surnommé « l’homme des intrigues ».
Des politiciens, journalistes, hommes d’affaires et même des diplomates seraient impliqués. Des enregistrements téléphoniques auraient révélé des échanges avec des personnes au sein du palais présidentiel de Carthage pour fomenter un renversement du régime. Le groupe aurait aussi planifié de mobiliser la rue sous prétexte d’inflation et de pénurie de produits alimentaires.
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Un lourd passé judiciaire
Ce n’est pas la seule affaire judiciaire pesant sur les Frères musulmans tunisiens. Depuis 2011, plusieurs accusations graves pèsent sur le mouvement, dont l’envoi de centaines de jeunes vers les zones de conflit et l’implication de sa branche armée dans des assassinats politiques.
En février dernier, la justice tunisienne a prononcé des peines de prison lourdes contre plusieurs de ses leaders, dont son chef historique Rached Ghannouchi, condamné à 22 ans dans l’affaire dite « Instalingo », liée à de l’espionnage.
Son gendre Rafik Abdessalem, ex-ministre des Affaires étrangères, a été condamné à 34 ans, sa fille Soumaya à 25 ans, et son fils Moaz à 35 ans.
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D’autres condamnations ont concerné les responsables de l’entreprise Instalingo : Haitham Khouili (28 ans), Salem Khouili (54 ans), Yahya Khouili (18 ans), ainsi que le dirigeant d’Ennahdha Said Ferjani (13 ans), l’ex-directeur du renseignement Lazhar Loungou (15 ans), et la journaliste Sheherazade Akacha (27 ans). Trois blogueurs et une journaliste ont également été condamnés.
Les biens des accusés ont été saisis par décision judiciaire.
Instalingo, spécialisée dans la production de contenu numérique, est accusée d’avoir manipulé l’opinion publique au profit d’Ennahdha et de porter atteinte à la sécurité nationale.
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Quel avenir ?
La majorité des cadres du mouvement sont désormais en prison, et ses bases populaires semblent désabusées. Les dernières tentatives pour reprendre pied sur la scène politique apparaissent comme des efforts désespérés.
Après les lourdes condamnations de février dernier, notamment contre Ghannouchi, le silence s’est imposé du sommet à la base, renforçant l’impression que le mouvement, qui avait tiré parti des événements de 2011 pour accéder au pouvoir, a atteint sa fin politique.
Les militants restants se sentent trahis, ayant soutenu un mouvement gangrené par la corruption et l’extrémisme.
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Selon les observateurs, Ennahdha a perdu presque tous ses partisans. Seuls quelques dirigeants, comme Imed Khemiri, Riadh Chaïbi et Belkacem Hassan, restent actifs. Tous les autres sont en détention pour des crimes commis durant leur gouvernance.
D’après l’analyste politique Abdelkarim Mahmoudi, « Ennahdha est interdite d’activité publique directe et ses locaux ont été fermés sur ordre officiel. Ses responsables ne s’expriment plus que dans l’espace virtuel ou lors d’événements limités de la coalition de la ‘Front du Salut National’. »
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Il ajoute : « La majorité des dirigeants du premier cercle, comme Ghannouchi, ses deux adjoints Bhiri et Ali Larayedh, le secrétaire général Ajmi Lourimi, et plusieurs membres du conseil de la Choura, sont emprisonnés pour des affaires susceptibles de leur valoir de très longues peines, voire la perpétuité. »
Enfin, le juriste et politologue Ziad Kassmi estime que de telles condamnations pourraient aboutir légalement à la dissolution du mouvement Ennahdha, si la justice établit que les actes incriminés sont le fait de la structure même du parti.
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