Pourquoi Al-Joulani et Hayat Tahrir al-Cham doivent-ils rester sur les listes des organisations terroristes ?
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À la suite de la prise de contrôle par l’alliance des factions rebelles dirigée par Hayat Tahrir al-Cham de la plupart des régions en Syrie, une pression intense est exercée pour déterminer si le nom du groupe et de ses principaux dirigeants doivent être retirés des listes de terrorisme américaines et internationales, et comment procéder à un tel retrait.
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Selon une étude de l’Institut de Washington, l’envoyé spécial des Nations unies pour la Syrie, Geir Pedersen, a appelé à une « levée rapide des sanctions », bien qu’il ne soit pas clair si ses propos incluaient les sanctions spécifiques à Hayat Tahrir al-Cham. Il avait précédemment déclaré que le groupe ne pouvait pas gouverner la Syrie de la même manière qu’il avait administré son ancien bastion d’Idleb, tout en soulignant qu’ »il existe certains éléments rassurants sur le terrain ».
L’institut précise dans un rapport publié sur son site internet que Hayat Tahrir al-Cham n’a jamais été officiellement désigné comme organisation terroriste. Il s’agit de la dernière version de groupes précédemment classés comme terroristes en raison de leurs liens avec Al-Qaïda et Daech.
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Le rôle de Hayat Tahrir al-Cham remonte à juillet 2011, lorsque Abou Bakr al-Baghdadi, alors chef de Daech en Irak – connu à l’époque sous le nom d’Al-Qaïda en Irak –, a envoyé Al-Joulani pour diriger l’expansion du groupe en Syrie. C’est ce même Al-Joulani qui est devenu par la suite le chef de Hayat Tahrir al-Cham et a mené l’offensive qui a renversé le régime d’Assad, adoptant le nom d’Ahmed Al-Char’ et se positionnant ainsi comme le nouveau leader de la Syrie, s’insérant dans les négociations actuelles visant à retirer certains noms des listes de sanctions.
Concernant les classements américains et le dilemme de la suppression de la liste des organisations terroristes, l’institut explique que le groupe actuellement connu sous le nom de Hayat Tahrir al-Cham a été désigné pour la première fois comme entité terroriste en octobre 2004, lorsque le Département d’État américain a classé Jamaat al-Tawhid wal-Jihad – ancêtre d’Al-Qaïda en Irak – comme organisation terroriste étrangère et entité terroriste mondiale. Le même mois, l’ONU a ajouté Al-Qaïda en Irak / Jamaat al-Tawhid wal-Jihad à sa liste unifiée des organisations terroristes. En décembre 2012, le gouvernement américain a officiellement ajouté Jabhat al-Nosra en tant que pseudonyme d’Al-Qaïda en Irak en modifiant les désignations sur sa liste des organisations terroristes étrangères, tandis que le Département du Trésor a également mis à jour la liste des organisations terroristes mondiales.
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Parallèlement, en mai 2013, le Département d’État américain a classé Al-Joulani (souvent orthographié al-Joulani dans les documents américains) comme terroriste mondialement désigné. Par le biais de son programme Récompenses pour la Justice, il a offert une prime allant jusqu’à 10 millions de dollars pour toute information le concernant, soulignant qu’il « reste le leader de Jabhat al-Nosra, affilié à Al-Qaïda, qui constitue le noyau de Hayat Tahrir al-Cham« .
Aujourd’hui, Hayat Tahrir al-Cham est toujours classé comme organisation terroriste par les États-Unis et les Nations unies, ainsi que par plusieurs autres pays et organisations. Al-Joulani demeure inscrit sur la liste des terroristes et est toujours recherché avec une prime de 10 millions de dollars sur sa tête.
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Aux États-Unis, retirer une organisation de la liste des entités terroristes étrangères est relativement simple, comme l’indique la page du Département d’État consacrée au programme des organisations terroristes étrangères. Depuis la création de cette liste, 20 groupes en ont été retirés, dont plusieurs ayant évolué vers une gouvernance politique.
Certains observateurs estiment que lever ces sanctions est essentiel pour offrir à la Syrie post-Assad une opportunité de construire un type de gouvernement et de pays différent. Personne ne peut raisonnablement s’opposer à certaines exemptions temporaires ou à des mesures spécifiques facilitant l’aide humanitaire. Cependant, tout retrait plus large du classement – qu’il s’agisse d’un État, d’un groupe ou d’individus – doit être mérité par des actions concrètes, et non accordé comme une faveur.