Exposition des enfants aux écrans : « Il est nécessaire de modifier les habitudes familiales »
Les enfants de deux ans passent en moyenne 56 minutes par jour devant un écran. Cette conclusion du bulletin épidémiologique de Santé publique France pointe un temps d’écran des tout-petits beaucoup trop important. Et la durée grimpe avec les années : 1 h 10 à l’âge de 3 ans et demi et 1 h 34 à 5 ans et demi. Cette vaste étude française, baptisée Elfe (Étude longitudinale française depuis l’enfance), a été menée auprès de 18 000 enfants avant l’épidémie de Covid-19.
« Pour les plus petits, les écrans sont très attractifs. Grâce aux contenus et aux mouvements colorés, ils captent facilement l’attention. Télévision, smartphone, aujourd’hui, la société vit avec un écran », constate Marie-Noëlle Clément, psychiatre, psychothérapeute, directrice de l’hôpital de jour pour enfants du Cerep-Phymentin à Paris et membre fondatrice de l’association « 3-6-9-12 ». L’éducation se fait en grande partie par imitation, les enfants prennent exemple sur le comportement de leurs parents. « Pour limiter l’exposition des enfants aux écrans, il faut s’attaquer au problème global de la dynamique familiale. Ce sont plus largement les habitudes de toute la famille qu’il faut changer. »
Baby-sitter numérique
De plus en plus, les écrans impactent les relations familiales et s’immiscent dans les liens parents/enfants. « On parle de plus en plus de technoférence parentale. Les parents ont souvent leur téléphone portable dans la main en même temps qu’ils s’occupent de leurs enfants, qu’ils jouent avec, etc. Certaines mères utilisent même leur smartphone pendant l’allaitement, ce qui empêche leur bébé de croiser leur regard. Ce moment de rencontre ne se fait pas, c’est fortement délétère pour le développement du tout-petit », regrette Marie-Noëlle Clément.
Certaines études ont d’ailleurs montré que des enfants dont les parents restaient les yeux rivés sur leur téléphone au parc avaient tendance à se mettre davantage en danger et à faire plus de crises de colère. Un moyen d’attirer l’attention.
« Évidemment, les recommandations tendent vers le moins d’écran possible, mais certaines nuances sont importantes. Il est préférable d’opter pour des activités interactives et toujours en présence d’un adulte. Le principal est de rétablir la communication, d’interagir tous ensemble et de ne pas laisser son enfant passif devant un écran », recommande la psychiatre.
Pas d’écran dans la chambre des enfants
Pour éloigner les enfants des écrans, il faut leur proposer d’autres choix. En effet, allumer la télévision est souvent la réponse la plus simple à l’ennui ou à l’occupation des parents à d’autres tâches. À la place de cette baby-sitter numérique, proposez des jeux de société, des moments de lecture, des sorties en plein air, des activités manuelles, des recettes de cuisine à faire ensemble, etc. L’idée est de faire du temps passé devant les écrans un petit plaisir partagé et pas une habitude solitaire.
Afin de tendre vers un bon usage des écrans, il est recommandé de les éviter au maximum le soir pour ne pas empêcher l’endormissement, d’éteindre la télévision pendant les repas pour favoriser ce moment d’échange et de ne pas placer d’écrans dans la chambre des enfants.
Dernier conseil, ne laissez pas votre enfant regarder la télévision le matin : « Si les écrans ne favorisent pas le sommeil, ils n’aident pas non plus à préparer le cerveau pour l’école. Les maîtresses parviennent d’ailleurs facilement à identifier les petits qui ont regardé un dessin animé avant de venir. »