Sabratah s’embrase… L’Ouest libyen, butin des milices et règne du non-État

Lundi soir, de violents affrontements armés ont éclaté dans la ville de Sabratah, à l’ouest de la Libye, dans une nouvelle scène illustrant le chaos des milices et la prolifération incontrôlée des armes dans la région occidentale.
Selon une source militaire libyenne, les combats ont commencé dans la zone de Dahman après qu’une grenade RPG a visé une maison appartenant à un certain « al-Kabo », ce qui a provoqué une montée de tension et l’élargissement des affrontements. Les détonations ont retenti dans toute la ville, en particulier dans les quartiers résidentiels de al-Dourine.
La source a confirmé que les affrontements se poursuivaient avec des tirs réels et des obus en direction de la vallée, semant la panique parmi la population. Elle a indiqué la présence de regroupements armés dans les ruelles de Dahman, tandis que les habitants appelaient à l’intervention du Croissant-Rouge pour sécuriser des couloirs d’évacuation pour les familles coincées. Le bilan faisait état d’un mort, plusieurs blessés, ainsi que des destructions dans les infrastructures et les habitations.
Elle a précisé que « jusqu’à présent, la véritable raison du déclenchement des affrontements reste inconnue ».
Chaos quotidien
L’analyste militaire Mohamed al-Tarhouni a estimé que les Libyens se sont habitués à la prolifération des armes et aux affrontements, au point qu’ils sont devenus une partie du « quotidien routinier », soulignant que ce phénomène reflète directement le chaos sécuritaire qui frappe l’ouest libyen.
Al-Tarhouni a affirmé que le gouvernement d’unité nationale, dont le mandat est expiré, porte une part de responsabilité en alimentant ces affrontements pour servir ses propres intérêts, ou en créant un climat chaotique favorable à ses objectifs, à l’image des mobilisations armées à Tripoli pour garantir son contrôle sur la capitale.
Gouvernement et milices
Al-Tarhouni a insisté sur le fait que les chefs de milices considèrent les zones comme des « butins » et affirment leur présence par les affrontements et le banditisme armé, ce qui approfondit le cercle du chaos et éloigne le rêve de stabilité et d’élections.
Il a souligné que le citoyen est le grand perdant de cette situation, précisant que l’inaction des institutions de l’État, qu’il s’agisse du gouvernement d’unité ou des appareils sécuritaires, a contribué à la perpétuation de ce phénomène, voire à son exploitation pour des intérêts étroits, renforçant ainsi la culture du « non-État » dans l’ouest libyen.
Chaos persistant
La capitale Tripoli et ses environs connaissent une tension sans précédent, au milieu d’une polarisation milicienne aiguë qui fait craindre l’explosion d’un affrontement généralisé. La prolifération des armes, qui empoisonne la Libye depuis 2011, demeure un obstacle majeur à toute stabilité.
Des sources militaires estiment à plus de 29 millions le nombre d’armes hors du contrôle de l’État, faisant des attaques armées contre des civils une scène récurrente, surtout dans l’ouest du pays, dominé par des milices aux loyautés multiples.
Feuille de route onusienne
Ces développements surviennent alors que la mission des Nations unies en Libye, dirigée par Hanna Tetteh, s’efforce de soutenir la nouvelle feuille de route annoncée le 21 août dernier. Celle-ci repose sur trois points : l’élaboration d’un cadre électoral, l’unification des institutions par la nomination d’un gouvernement unique, et le lancement d’un dialogue national inclusif.
Cependant, l’explosion sécuritaire dans l’ouest libyen menace de faire échouer ces efforts et de compromettre la feuille de route, au milieu de craintes croissantes que les affrontements ne réduisent à néant toute chance de relancer le processus politique.