Peines de mort houthies pour restaurer le prestige après un échec du renseignement
Le gouvernement yéménite accuse le tribunal houthi de s’appuyer sur des accusations fabriquées et des aveux falsifiés obtenus sous la torture et sous pression psychologique et physique.
Le gouvernement yéménite a accusé les Houthis d’avoir prononcé des peines de mort et de prison à l’encontre de 17 Yéménites dans le cadre de procès qualifiés de « simulés » et dépourvus de toute base légale. Selon des sources médiatiques, ces verdicts interviennent dans un contexte de failles sécuritaires répétées, après des coups sévères ayant embarrassé les autorités houthies, qui cherchent à restaurer leur prestige auprès de la population.
Le ministre de l’Information, de la Culture et du Tourisme, Muammar Al-Eryani, a déclaré que les jugements annoncés par la milice reposaient sur des « accusations inventées et des aveux fabriqués, extorqués sous la torture et sous pression psychologique et physique », affirmant que ce qui se passe n’a aucun rapport avec les normes de justice.
Il a ajouté, dans une publication sur la plateforme X, que la diffusion par les Houthis d’aveux télévisés parallèlement à l’accélération des séances judiciaires constitue une tentative de présenter de « faux succès médiatiques » et de dissimuler l’« effondrement sécuritaire » et les infiltrations qui frappent la milice et ses appareils militaires.
Le ministre a décrit ces procès comme une extension d’une « campagne de liquidations » menée par la milice sous prétexte d’« espionnage », estimant qu’il s’agit d’un outil destiné à réprimer les voix dissidentes, éliminer les opposants et instaurer un climat d’intimidation au sein de la société, qualifiant ce qui se passe de « mise en scène complète ».
L’agence de presse Saba, affiliée aux Houthis, a rapporté que le tribunal pénal spécialisé de la capitale avait prononcé son verdict dans « des affaires de cellules d’espionnage appartenant au réseau de renseignement américain, israélien et saoudien », à l’encontre de 17 citoyens yéménites. Deux autres accusés ont été condamnés à dix ans de prison.
Selon la même source, les peines de mort doivent être exécutées par balles et en public afin de servir d’avertissement. Les condamnés ont été accusés d’avoir fourni à ces États des informations permettant d’identifier des dirigeants houthis et des cibles militaires. Les audiences se sont déroulées sur une période d’environ deux semaines.
Le parquet avait accusé les condamnés d’avoir « collaboré avec des pays en guerre avec le Yémen durant la période 2024-2025, à savoir l’Arabie saoudite, le Royaume-Uni et les États-Unis, et d’avoir espionné pour leur compte par l’intermédiaire de membres de leurs services de renseignement et du Mossad israélien, qui les auraient supervisés, équipés de moyens de communication chiffrés, d’applications de géolocalisation, et formés à l’utilisation de caméras secrètes connectées à des logiciels de diffusion directe ».
Selon l’agence houthie, les condamnés auraient fourni à ces pays des informations sur des dizaines de sites liés à des responsables de l’État, leurs déplacements, des données politiques, militaires et sécuritaires, ainsi que des renseignements sur les missiles, leurs lieux de lancement et de stockage. Ils auraient également contribué à recruter des citoyens, installé des caméras de surveillance et reçu de l’argent en contrepartie, ce qui aurait conduit à la frappe de plusieurs sites militaires, sécuritaires et civils, causant de nombreuses pertes humaines et des destructions matérielles étendues.
Ces évolutions surviennent dans un contexte de forte confusion au sein de la direction houthie depuis les frappes israéliennes de juin et d’août derniers, qui ont mis en évidence la fragilité de l’appareil sécuritaire et du renseignement des Houthis, provoquant une « secousse majeure » interne.
Les Houthis ont récemment renforcé leurs mesures sécuritaires à l’égard des habitants, interdit de filmer les sites visés et menacé toute personne qui le ferait en l’accusant de « servir l’ennemi ». Ils ont également lancé de vastes campagnes d’arrestations dans plusieurs régions et imposé des restrictions allant jusqu’à interdire la tenue de funérailles ou de cérémonies de condoléances pour les membres tués du groupe, sauf dans des zones reculées, loin des médias.
Au début du mois de novembre, le ministère de l’Intérieur contrôlé par les Houthis a affirmé avoir démantelé un « réseau d’espionnage » lié à une salle d’opérations commune regroupant des services de renseignement américains, israéliens et saoudiens, dont le siège serait situé en Arabie saoudite. Selon le communiqué, ce réseau aurait créé des cellules d’espionnage au Yémen, fourni formation et équipements, et participé à transmettre à Washington et Tel-Aviv des informations sur des sites ciblés.
Pour le ministre yéménite de l’Information, cette escalade reflète une stratégie visant les employés des organisations onusiennes et humanitaires, accusés à tort d’espionnage afin de faire pression sur eux et de contrôler le travail d’aide humanitaire. Il a mis en garde contre une possible vague d’exécutions, faisant des employés onusiens détenus les premières victimes potentielles.
Le ministre a appelé l’envoyé spécial de l’ONU pour le Yémen, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme et les organisations internationales compétentes à prendre une position claire face à ces « procès simulés », à intervenir immédiatement pour empêcher l’exécution des sentences et à obtenir la libération des détenus.
Le tribunal pénal placé sous le contrôle des Houthis à Sanaa avait déjà émis une condamnation à mort contre 17 Yéménites par exécution par balles, en plus de la condamnation à dix ans de prison d’un homme et d’une femme, pour « espionnage au profit de pays étrangers », à l’issue de sessions accélérées n’ayant pas dépassé deux semaines.