Moyen-Orient

Liban en 2025 : l’État progresse et le Hezbollah perd ses cartes


Le Liban achève l’année 2025 profondément transformé. Après une année jalonnée d’étapes décisives, l’État a repris de l’initiative tandis que le Hezbollah, longtemps dominant au sein des institutions, a vu son influence reculer.

L’année 2025 a constitué une pierre angulaire dans la redéfinition des équilibres internes : de l’élection d’un nouveau président de la République à la formation d’un gouvernement ayant lancé le processus de monopolisation des armes par l’État, le Liban a amorcé une reprise en main visant à se libérer de l’emprise du parti.

Élection d’un nouveau président

Au début de l’année 2025, le Parlement libanais a élu l’ancien commandant en chef de l’armée, Joseph Aoun, président de la République, mettant fin à une vacance présidentielle qui durait depuis octobre 2022.

Lors de la séance parlementaire du 9 janvier, Joseph Aoun a obtenu 99 voix sur 128, un résultat qui a confirmé la volonté de reconstruire l’État.

Cette élection a mis un terme à un vide institutionnel de plusieurs années et a ravivé chez les Libanais l’espoir d’une stabilisation des institutions étatiques.

Un nouveau gouvernement

Le 8 février, un gouvernement dirigé par Nawaf Salam a été formé après de longues négociations et a obtenu la confiance du Parlement avec 95 voix.

L’élément le plus marquant de sa déclaration ministérielle réside dans l’affirmation explicite du principe de l’exclusivité des armes aux mains de l’État, ainsi que dans l’abandon de la formule « armée, peuple, résistance », considérée pendant des années comme une couverture politique pour l’arsenal du Hezbollah. Cette évolution a constitué un signal clair d’un changement profond dans l’équation politique.

Plan de désarmement du Hezbollah

En août, le Conseil des ministres a approuvé le principe de la détention exclusive des armes par l’État et a chargé l’armée libanaise d’élaborer un plan de mise en œuvre devant être achevé avant la fin de l’année.

En septembre, le gouvernement a officiellement adopté le plan présenté par le commandement de l’armée visant au désarmement du Hezbollah.

Cette séance a marqué le début d’un vif affrontement politique, après le retrait des ministres du parti et le rejet par le Hezbollah du principe de désarmement, exigeant un débat sur une prétendue « stratégie de défense » pour le Liban. Le Premier

ministre Nawaf Salam a rejeté cette proposition, affirmant sans ambiguïté : « Cela n’existe pas ».

Ce plan a ouvert une nouvelle ère placée sous le signe de la souveraineté de l’État, après des années d’emprise totale du parti.

Le 19 décembre, la capitale française a accueilli une réunion en présence du commandant de l’armée libanaise, Rodolphe Haykal, consacrée à l’examen de « moyens concrets » permettant de vérifier le désarmement du Hezbollah.

Selon le ministère français des Affaires étrangères, la réunion a également porté sur le renforcement des capacités de la commission chargée de surveiller l’application du cessez-le-feu afin de suivre les progrès réalisés dans le désarmement du parti.

La commission du « mécanisme » de suivi de l’accord, qui avait mis fin un an plus tôt à la guerre entre le Hezbollah et Israël, comprend des représentants des États-Unis, de la France, du Liban, d’Israël et de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL).

Dans le même contexte, l’Union européenne a indiqué étudier différentes options pour renforcer les capacités de la sécurité intérieure libanaise, afin de permettre à l’armée de se consacrer pleinement à la mission de désarmement du Hezbollah.

Le Premier ministre Nawaf Salam a par ailleurs affirmé que le Liban souhaitait conférer à la mécanisme de surveillance du cessez-le-feu un rôle plus efficace, tant pour vérifier les allégations israéliennes concernant la reconstitution des capacités du Hezbollah que pour contrôler l’action de l’armée libanaise dans le démantèlement des infrastructures du groupe armé.

Recul de l’influence du Hezbollah

Plusieurs événements ont montré que 2025 a marqué une année de recul politique et opérationnel pour le Hezbollah.

En septembre, le parti a mené une bataille politique intense pour illuminer le rocher de Raouché, à Beyrouth, avec les images de ses anciens secrétaires généraux Hassan Nasrallah et Hachem Safieddine.

Le gouvernement avait pourtant publié une décision officielle interdisant l’utilisation des biens publics et des sites touristiques à des fins partisanes ou politiques sans autorisation écrite. Une partie proche du parti avait demandé l’autorisation d’un rassemblement, à condition expresse de ne pas illuminer le rocher.

L’événement n’a toutefois pas attiré de foules, tandis que la tentative d’illumination a suscité une large réprobation populaire, politique et officielle.

Le simple fait que le parti ait dû déposer une demande officielle a été perçu comme un précédent, alors qu’il imposait auparavant sa présence par la force.

Face au rejet populaire et à la menace de poursuites judiciaires, le Hezbollah a publié un communiqué niant toute intention d’illuminer le rocher lors de l’événement, marquant un net recul par rapport aux annonces initiales.

Revers sur le terrain

De nombreux rapports de renseignement ont indiqué que le parti avait perdu une part importante de son arsenal militaire ainsi qu’un grand nombre de combattants lors de la dernière confrontation avec Israël, affaiblissant considérablement ses capacités militaires et logistiques.

En mars, Israël a mené sa première frappe aérienne contre la banlieue sud de Beyrouth depuis le cessez-le-feu de novembre 2024, visant une installation de drones appartenant au Hezbollah.

En novembre, le chef d’état-major du parti, Haitham Ali Tabatabaï, a été tué lors d’une frappe israélienne à Haret Hreik.

Tout au long de l’année, Israël a annoncé avoir mené d’autres frappes ayant entraîné la mort de combattants et la destruction de dépôts d’armes, tandis que le Hezbollah s’est contenté de publier des communiqués évoquant un « droit de riposte » sans passer à l’action sur le terrain.

Israël a fixé la fin du mois en cours comme échéance pour que le gouvernement libanais achève le désarmement du Hezbollah au sud du fleuve Litani. Cette date coïncide avec la rencontre prévue le 29 décembre en Floride entre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou et le président américain Donald Trump, dans un climat de craintes quant à une possible opération de désarmement par la force, susceptible de raviver les affrontements.

L’armée israélienne a annoncé la mort de plus de 380 membres du Hezbollah depuis l’entrée en vigueur du cessez-le-feu au Liban à la fin de l’année dernière.

Dernière prorogation de la FINUL

En août, le Conseil de sécurité des Nations unies a approuvé à l’unanimité la prorogation du mandat de la FINUL jusqu’au 31 décembre 2026, précisant qu’il s’agirait de la dernière prolongation, en vue d’un retrait organisé au cours de l’année 2027.

Le Liban s’est félicité de cette décision, que la présidence de la République a qualifiée d’« opportunité pour rétablir la souveraineté de l’État sur l’ensemble de son territoire », en particulier dans le Sud.

Les forces de la FINUL resteront ainsi un pont sécuritaire temporaire facilitant le déploiement de l’armée libanaise dans le Sud, afin que le Liban impose sa souveraineté sur l’ensemble de son territoire et que la mission de maintien de la paix relève exclusivement de l’autorité de l’État.

Les Frères musulmans classés organisation terroriste

Le décret exécutif du président américain Donald Trump classant la branche libanaise des Frères musulmans comme organisation terroriste a accentué les pertes politiques du Hezbollah, dans la mesure où la Jamaa Islamiya et son aile armée, les Forces de l’Aube, figurent parmi ses principaux alliés au sein de la communauté sunnite.

Cette décision est susceptible d’entraîner des sanctions financières contre l’un des alliés les plus importants du parti au Liban.

Épreuve de souveraineté

En 2025, l’État libanais a démontré une volonté réelle de restaurer sa souveraineté, à travers l’élection d’un président, la formation d’un gouvernement qui ne pratique pas l’équilibrisme politique, l’adoption de mesures concrètes pour démanteler les armes illégales et l’établissement de relations internationales fondées sur l’égalité et le respect mutuel.

En parallèle, le Hezbollah a perdu une part significative de son capital militaire, opérationnel et politique. Toutefois, le chemin reste long, car le désarmement complet exige un consensus interne solide, ainsi qu’un traitement de la grave crise économique.

L’année 2025 demeure ainsi une étape charnière dans l’épreuve de la souveraineté de l’État libanais.

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