Le plan de Trump pour Gaza ferme la porte à la normalisation entre l’Arabie saoudite et Israël
Un chercheur saoudien affirme que le déplacement des habitants de Gaza vers l’Égypte et la Jordanie affaiblira deux États essentiels à la stabilité régionale et à la sécurité de l’Arabie saoudite.
Des analystes estiment que le plan du président américain Donald Trump visant à prendre le contrôle de la bande de Gaza retardera inévitablement les tentatives de normalisation des relations entre l’Arabie saoudite et Israël et alimentera le sentiment d’hostilité envers les États-Unis au sein du royaume. De son côté, Riyad a réaffirmé son rejet catégorique de toute tentative de déplacement des Palestiniens, insistant sur la solution à deux États comme unique voie pour mettre fin au conflit israélo-palestinien.
La proposition de Trump de réaménager Gaza et de transférer plus de deux millions de Palestiniens vivant dans l’enclave vers d’autres pays a suscité un choc et une indignation généralisés, en particulier dans le monde arabe.
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James Dorsey, chercheur à l’Institut du Moyen-Orient de l’Université nationale de Singapour, a déclaré à l’AFP : « Si telle est la politique de Trump, alors il a fermé la porte à une reconnaissance d’Israël par l’Arabie saoudite. »
Une reconnaissance par le royaume serait considérée comme une victoire majeure pour la diplomatie américaine au Moyen-Orient, visant à apaiser les tensions persistantes dans la région.
Cependant, l’Arabie saoudite, premier exportateur mondial de pétrole et première économie du Moyen-Orient, ne peut accepter une déstabilisation à ses frontières si l’Égypte et la Jordanie accueillent un grand nombre de déplacés de Gaza.
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Dans le même temps, Riyad souhaite maintenir des relations cordiales avec Washington, son allié de longue date malgré quelques tensions occasionnelles, et son principal rempart contre son rival régional, l’Iran.
Dorsey souligne : « En matière de sécurité, le royaume n’a d’autre choix que de se tourner vers Washington. Il n’y a personne d’autre… Ils ne vont pas se tourner vers la Chine. Elle n’est ni disposée ni capable. Et après l’Ukraine, peut-on vraiment compter sur la Russie ? »
Les Saoudiens étaient engagés dans des discussions préliminaires avec Israël via les États-Unis jusqu’à quelques jours avant l’éclatement de la guerre à Gaza. Mais après l’attaque sans précédent du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023, ils ont suspendu les négociations et durci leur position.
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Lorsque Trump a annoncé lors d’une rencontre avec le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou son projet de déplacer les habitants de Gaza vers l’Égypte et la Jordanie et de placer l’enclave palestinienne sous contrôle américain, Riyad a réagi immédiatement en rejetant fermement cette proposition.
Moins d’une heure après ces déclarations controversées, vers 4 heures du matin heure saoudienne, le ministère des Affaires étrangères saoudien a publié un communiqué sur la plateforme X affirmant son « rejet catégorique de toute tentative de déplacement du peuple palestinien de sa terre ».
Dans le même communiqué, Riyad a également réfuté les affirmations de Netanyahou selon lesquelles la normalisation avec Israël était imminente, réaffirmant qu’il n’y aurait aucune normalisation avant la création d’un État palestinien.
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Le plan de Trump représente également une menace pour le projet économique ambitieux du royaume, « Vision 2030 », qui repose sur la stabilité pour attirer les investisseurs et les touristes.
Le chercheur saoudien Aziz Alghashian estime que le déplacement des habitants de Gaza vers l’Égypte et la Jordanie « affaiblirait deux États essentiels à la stabilité régionale et à la sécurité de l’Arabie saoudite », ajoutant que « le plan de Trump, combiné à l’approche de Netanyahou, présente de sérieux risques pour le royaume ».
Il souligne également que « cela met en évidence le fait que les Israéliens ne sont pas de véritables partenaires pour la paix aux yeux de Riyad, en particulier Netanyahou, qui semble vouloir tous les bénéfices sans offrir de concessions ».
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Anna Jacobs, de l’International Crisis Group, estime que les déclarations de Trump « vont aggraver l’instabilité dans la région et alimenter les sentiments anti-américains, notamment en Arabie saoudite », ajoutant que « cette proposition rend la normalisation entre l’Arabie saoudite et Israël encore plus difficile ».
Andreas Krieg, professeur au King’s College de Londres, souligne que l’Arabie saoudite ne se soumettra pas docilement à une normalisation imposée par Washington.
Avant la guerre à Gaza, les Saoudiens négociaient des garanties de sécurité et une assistance pour développer un programme nucléaire civil en échange de relations avec Israël.
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Krieg affirme que l’Arabie saoudite « n’est pas un État vassal des États-Unis et ne reçoit donc pas d’ordres de Trump », ajoutant : « Je pense qu’ils maintiendront leur position, prêts à négocier, mais sans transiger sur leurs lignes rouges. »
Il conclut en affirmant que « personne en Arabie saoudite n’a intérêt à sacrifier la cause palestinienne. C’est la dernière et la plus précieuse carte que possède le royaume en termes de pouvoir et de légitimité dans le monde arabe et islamique ».
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La question clé reste de savoir comment l’Arabie saoudite et son prince héritier, Mohammed ben Salmane, sortiront de cette impasse.
Krieg conclut : « Je ne pense pas que les Saoudiens prendront des décisions majeures dans l’immédiat. »
Et d’ajouter : « Ils disposent d’outils de pression sur les États-Unis, notamment dans le secteur énergétique, mais je ne pense pas qu’ils souhaitent les utiliser pour l’instant. »