Politique

Le mur des drones européen… L’Allemagne en révèle les failles


Le ministre allemand de la Défense a écarté la possibilité pour l’Europe de réussir à bâtir une ligne défensive « impénétrable » contre les drones russes le long de ses frontières orientales.

Selon le journal américain The Times, le ministre Boris Pistorius a estimé que le projet de « mur de drones », promu par certains dirigeants de l’Union européenne et de l’OTAN, ne serait pas en mesure d’assurer une protection complète des frontières de l’Alliance.

« Irréaliste »

Dans des déclarations à la presse, Pistorius a jugé « irréaliste » de penser que les fortifications électroniques proposées pourraient empêcher toute intrusion de drones le long des plus de 2 750 miles de frontières terrestres avec la Russie, la Biélorussie et l’Ukraine, sans compter la mer Noire et la mer Baltique.

Il a ajouté : « Ériger un mur infranchissable est impossible pour le moment, mais le projet peut contribuer à réduire le nombre de drones en cas d’attaque potentielle », soulignant en même temps la nécessité de continuer à protéger l’espace aérien de l’ensemble de l’Alliance.

Ses propos interviennent après l’intrusion d’une vingtaine de drones russes dans l’espace aérien polonais le mois dernier, ce qui a suscité de vives inquiétudes parmi les pays de la frontière orientale de l’OTAN et les a poussés à réclamer l’édification d’un « mur de drones » destiné à prévenir toute incursion future.

Le projet envisagé repose sur un vaste réseau de capteurs — radars et détecteurs acoustiques — reliés à des systèmes de défense multicouches capables d’abattre les drones ennemis à l’aide de mitrailleuses, de canons laser, de petits missiles et d’aéronefs intercepteurs.

Ambitions « exagérées »

Dans des déclarations antérieures, Andrius Kubilius, commissaire européen à la défense, avait affirmé que la première phase du projet serait opérationnelle dans un an.

Mais Pistorius a qualifié ces ambitions de « surestimées », avertissant que le Kremlin cherchait à focaliser l’OTAN sur « des drones bon marché et relativement inoffensifs » au lieu de développer des systèmes de défense aérienne intégrés.

Mercredi soir, Pistorius est arrivé à la base aérienne de Lossiemouth, en Écosse du Nord-Est, où il a rencontré son homologue britannique John Healey, à l’occasion du premier anniversaire de la signature de l’accord de sécurité bilatéral connu sous le nom de « Trinity House ».

La défense contre les drones constitue un axe majeur de la coopération militaire entre Londres et Berlin, surtout après la recrudescence d’activités inhabituelles de drones au-dessus d’installations de l’OTAN.

Plus de cinquante incidents impliquant des drones suspects ont été recensés au-dessus d’aéroports et de bases militaires, de Helsinki à la Floride, depuis les récentes intrusions russes en Pologne.

Inquiétudes

Ce phénomène suscite une vive inquiétude en Occident en raison du coût élevé de l’interception des drones russes à bas prix.

Alors qu’un missile intercepteur coûte entre 300 000 et 4 millions de livres sterling, la fabrication d’un drone russe de type « Geran-2 » ne dépasse pas dix mille livres.

Les responsables de l’OTAN craignent que Moscou ne tire parti de cet avantage économique pour saturer les défenses occidentales de vagues massives de drones bon marché, dont certains ne seraient que de simples leurres dépourvus d’explosifs.

Pour faire face à cette menace, la Grande-Bretagne a annoncé récemment un investissement de 5 milliards de livres sterling dans le développement des technologies liées aux drones, dont 1 milliard destiné à la mise au point du système laser « DragonFire » anti-drones, qui devrait équiper les destroyers navals à partir de 2027.

De son côté, le ministère allemand de la Défense a présenté des plans d’investissement de dix milliards d’euros pour développer des drones offensifs et défensifs.

La société Titan Technologies, basée à Munich, a été chargée de concevoir des drones « chasseurs » capables de protéger les installations militaires et les infrastructures vitales.

Soupçons

La Bundeswehr prévoit l’acquisition d’au moins 19 — voire de plusieurs centaines — de systèmes anti-aériens SkyRanger 30, des tourelles de défense montées sur véhicules blindés utilisant des canons de 30 mm pour abattre drones et aéronefs volant à basse altitude.

Pistorius a assuré que tous les soldats allemands reçoivent désormais une formation de base pour affronter les drones, précisant que l’armée a déjà développé des modèles d’appareils capables de lancer des filets pour intercepter les drones ennemis et travaille actuellement sur des drones chasseurs spécialisés.

Il a également indiqué que l’Allemagne se prépare à acquérir de nouveaux systèmes de défense laser, ajoutant : « La maîtrise de la lutte contre les drones est devenue indispensable pour chaque soldat, quel que soit son poste de service. »

En conclusion, le ministre allemand de la Défense a affirmé qu’il n’existait pas de preuves irréfutables de l’implication de Moscou dans tous les incidents de drones suspects recensés au-dessus des territoires de l’OTAN.

Mais il a souligné que les trajectoires de vol et les types de systèmes utilisés « indiquent clairement que la Russie en est responsable ».

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