Politique

Le Maroc consolide sa position de médiateur impartial dans les crises d’Afrique subsaharienne


Le Maroc s’impose de plus en plus comme une puissance diplomatique crédible et impartiale dans la gestion des crises en Afrique subsaharienne, selon l’avis d’experts africains.

Ces derniers estiment que le royaume affirme discrètement son rôle de force diplomatique montante dans la région, en s’appuyant sur des outils de médiation discrets et une grande crédibilité. Son dernier succès en date concerne la libération de cinq gendarmes ivoiriens, détenus par les forces de défense burkinabè à la frontière, grâce à une médiation marocaine.

Les gendarmes ivoiriens avaient été arrêtés le 21 juin par les « Volontaires pour la défense de la patrie » (VDP), une force supplétive de l’armée burkinabè, dans la région de Kalamon, à la frontière nord-est de la Côte d’Ivoire. Ils avaient ensuite été transférés à Batié, au Burkina Faso. Leur retour à Abidjan, le 28 juin, a été rendu possible grâce à une coordination sécuritaire entre les autorités ivoiriennes et marocaines, saluée par des observateurs comme une démarche diplomatique marocaine « discrète mais efficace ».

Le Dr Mamadou Sano, chercheur burkinabè au Centre d’études sécuritaires de Ouagadougou, a déclaré : « Le Maroc a montré une compréhension fine des dynamiques régionales et a misé sur une médiation fondée sur la confiance et la coopération sécuritaire directe, plutôt que sur des démarches visibles ou médiatisées. Cela lui a permis de jouer un rôle décisif dans ce dossier sensible. »

Un partenariat stratégique

Dr Sano a ajouté que « la force de la diplomatie marocaine réside dans sa capacité à éviter les escalades, à agir loin des projecteurs, ce qui lui confère une crédibilité particulière auprès des parties impliquées, surtout dans des zones où se mêlent enjeux tribaux, sécuritaires et souverains, comme à la frontière entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso ».

Selon lui, « le Maroc aborde l’Afrique subsaharienne dans une logique de partenariat stratégique, ce qui le rend légitime dans les conflits bilatéraux et même souhaité dans des dossiers complexes où d’autres acteurs régionaux préfèrent ne pas s’impliquer ».

Il ajoute : « Dans la crise des gendarmes ivoiriens, Rabat a su s’imposer comme un acteur de confiance, capable d’établir un pont efficace entre Abidjan et Ouagadougou. Cela illustre une nouvelle école de diplomatie africaine, fondée sur le respect de la souveraineté, la discrétion, et l’obtention de résultats concrets loin des agitations politiques. »

Le Dr Aliou Kouamé, professeur de sciences politiques à l’Université de Bouaké (Côte d’Ivoire), estime quant à lui que « cette initiative marocaine reflète une évolution dans l’approche de Rabat, qui mise désormais sur son influence indirecte via des outils sécuritaires et diplomatiques souples. Plutôt que d’escalader les tensions, le Maroc s’est présenté comme un médiateur fiable pour les deux camps, ce dont l’Afrique subsaharienne a cruellement besoin ».

Dr Kouamé ajoute que « Rabat a su concilier un discours politique favorable à la stabilité régionale avec des moyens d’action concrets fondés sur un réseau dense de partenariats sécuritaires et d’intérêts communs, notamment avec les pays d’Afrique de l’Ouest confrontés à la montée du terrorisme et aux tensions frontalières ».

Il précise que « le Maroc n’est pas intervenu en tant qu’acteur extérieur porteur d’une agenda, mais comme une puissance africaine impliquée dans les problématiques régionales, proposant des solutions concrètes respectueuses de la souveraineté nationale et des équilibres internes, ce qui lui vaut une reconnaissance dans les milieux officiels aussi bien à Abidjan qu’à Ouagadougou ».

Une solution de l’intérieur

Le chercheur ivoirien souligne que « cette médiation est exemplaire de ce que devraient être les relations Sud-Sud en Afrique : des solutions construites de l’intérieur, par des acteurs qui connaissent le terrain, maîtrisent les clés de la désescalade et savent dialoguer avec toutes les parties ».

De son côté, le chercheur malien Ibrahim Sissoko, de l’Université de Bamako, a salué la capacité du Maroc à proposer un modèle alternatif à la diplomatie traditionnelle. « Nous sommes dans une région minée par les tensions et les coups d’État, où les acteurs internationaux agissent souvent en fonction de leurs intérêts ou par la force. Le Maroc, lui, met en avant une alliance fondée sur la coopération diplomatique plutôt que sur l’intervention militaire ».

Il souligne que « l’action du Maroc repose ici sur une médiation impartiale et équitable, ce qui lui donne une grande crédibilité, surtout quand cette médiation s’accompagne d’actions concrètes, comme ce fut le cas avec la libération des gendarmes ivoiriens ».

Et d’ajouter : « Ce n’est pas la première fois que le Maroc joue ce rôle. Il a déjà soutenu des pourparlers de paix en Libye et au Mali, et semble désormais s’imposer comme un véritable trait d’union diplomatique fiable en Afrique de l’Ouest ».

Il est à noter que les relations du Maroc avec plusieurs pays d’Afrique subsaharienne ont connu un essor remarquable durant la dernière décennie, à travers la coopération religieuse, économique, les missions humanitaires, la formation des imams et les partenariats sécuritaires. Cette approche renforce l’image du royaume comme acteur régional capable de concilier présence politique et capacité de résolution pacifique des conflits.

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