Politique

Le gouvernement d’al-Burhan enquête sur l’usage d’armes chimiques pour éluder sa responsabilité


Cette démarche s’inscrit dans les efforts du gouvernement soudanais pour apaiser la colère de la communauté internationale, notamment afin d’éviter un affrontement potentiel avec les puissances occidentales, au premier rang desquelles les États-Unis, en raison des conséquences politiques, diplomatiques et économiques que cela pourrait entraîner.

Malgré l’annonce par le gouvernement soudanais de la formation d’un comité national pour enquêter sur les accusations américaines concernant l’usage par l’armée d’armes chimiques dans le conflit contre les Forces de soutien rapide, cette déclaration semble n’être qu’une tentative de diversion. Plutôt que de traiter sérieusement des accusations fondées sur ce qui a été qualifié de preuves solides de l’utilisation d’armes chimiques dans des zones peuplées, les autorités cherchent à blanchir l’armée et à atténuer la pression intérieure et internationale, sans engagement clair à tenir les véritables responsables pour comptables de leurs actes.

Cette initiative semble viser à désamorcer la colère de la communauté internationale et à éviter un éventuel affrontement avec les puissances occidentales, notamment les États-Unis, compte tenu des lourdes répercussions politiques, diplomatiques et économiques possibles. Dans ce contexte, le gouvernement pourrait désigner certains individus comme boucs émissaires, tentant ainsi de se défausser de la responsabilité institutionnelle plus large quant à l’usage d’armes chimiques, afin de protéger les hauts gradés militaires, y compris le chef de l’armée, le général Abdel Fattah al-Burhan.

Le comité d’enquête est composé des ministères des Affaires étrangères, de la Défense et des services de renseignement général, et devra rendre son rapport immédiatement, selon un communiqué officiel rapporté par l’agence de presse soudanaise SUNA.

Le communiqué précise que le président du Conseil de souveraineté, Abdel Fattah al-Burhan, a émis « une décision de former un comité national regroupant le ministère des Affaires étrangères, le ministère de la Défense et le service de renseignement général pour enquêter sur les accusations américaines, avec l’obligation de présenter son rapport immédiatement ».

Khartoum a souligné son engagement envers les obligations internationales du Soudan, notamment la Convention sur l’interdiction des armes chimiques, ratifiée en 1999.

Le 22 mai, le Département d’État américain a accusé Khartoum d’avoir utilisé des armes chimiques en 2024, sans fournir de précisions sur le lieu ou la date de leur utilisation.

En réponse, l’administration américaine a annoncé des sanctions économiques contre le Soudan à compter du 6 juin, incluant l’interdiction des exportations américaines et du financement à destination du gouvernement soudanais, ce qui accroît encore la pression sur celui-ci.

Le porte-parole du gouvernement soudanais a rejeté les accusations américaines, les qualifiant de « chantage politique ». Ce n’est pas la première fois que de telles accusations sont portées contre le Soudan.

En janvier, le New York Times a rapporté que l’armée soudanaise avait utilisé des armes chimiques à au moins deux reprises dans des zones reculées lors de sa guerre contre les Forces de soutien rapide.

Selon le journal, des responsables américains anonymes ont affirmé que l’arme utilisée semblait être du gaz chloré, connu pour provoquer de fortes douleurs respiratoires et pouvant entraîner la mort.

En 2016, Amnesty International avait déjà dénoncé l’utilisation par l’armée d’armes chimiques au Darfour (ouest du pays).

En 1998, les États-Unis avaient affirmé que l’usine pharmaceutique d’Al-Shifa produisait des composants chimiques pour le compte d’Al-Qaïda, avant de la bombarder. Washington n’a jamais présenté de preuves étayant ses accusations, qui n’ont d’ailleurs fait l’objet d’aucune enquête.

Depuis avril 2023, le Soudan est en proie à une guerre sanglante entre l’armée dirigée par al-Burhan et les Forces de soutien rapide menées par son ancien adjoint Mohamed Hamdan Dogolo, surnommé « Hemetti« .

Le conflit a fait des dizaines de milliers de morts et déplacé 13 millions de personnes, provoquant ce que l’ONU décrit comme la pire crise humanitaire de l’histoire moderne.

Afficher plus

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page