Grand Maghreb

La Tunisie poursuit les porte-voix des Frères musulmans : trois avocats sous enquête


La Tunisie a ouvert une enquête judiciaire contre trois avocats accusés de diffuser de fausses informations concernant l’état de santé de détenus appartenant aux Frères musulmans, prétendument en grève de la faim.

Mercredi, une source judiciaire a déclaré à l’agence de presse officielle tunisienne que le parquet du tribunal de première instance de Tunis avait ordonné l’ouverture d’une enquête à l’encontre de trois avocats, sans en révéler les noms.

Cette décision intervient à la suite d’un renvoi effectué par le parquet général de la Cour d’appel de Tunis, sur la base de plaintes déposées par la Direction générale des prisons et de la rééducation (institution publique).

La source a précisé que « les plaintes de la Direction générale des prisons et de la rééducation ont été déposées à la suite de la propagation de rumeurs et de fausses informations concernant des grèves de la faim dans les prisons, ainsi que la diffusion de données erronées sur la dégradation de l’état de santé de détenus prétendant observer une telle grève ».

Une grève fictive

Mardi, les autorités tunisiennes ont démenti les affirmations des Frères musulmans selon lesquelles leurs membres emprisonnés pour complot contre la sûreté de l’État se trouveraient dans un état critique à cause d’une grève de la faim.

Parmi ces détenus figurent le chef du mouvement, Rached Ghannouchi, ainsi que des figures de la coalition pro-Frères « le Front du Salut », dont Jawhar Ben Mbarek, Abdelhamid Jelassi, Ghazi Chaouachi et Issam Chebbi.

Dans un communiqué publié à cette occasion, la Direction générale des prisons et de la rééducation a nié « les fausses informations et les manipulations délibérées diffusées par certains acteurs via les médias et les réseaux sociaux concernant une prétendue détérioration de la santé de certains détenus en raison d’une grève de la faim ».

Elle a affirmé que « la santé de tous les détenus, y compris ceux prétendant faire la grève de la faim, fait l’objet d’un suivi médical constant conformément aux règlements et protocoles sanitaires en vigueur ».

L’institution a ajouté que « les prétendus mouvements de grève sont dénués de tout fondement, les examens médicaux et témoignages ayant prouvé la fausseté de ces allégations, notamment en raison du refus de certains prisonniers de se soumettre aux examens de leurs signes vitaux et de la constatation qu’ils consommaient effectivement de la nourriture et des boissons ».

Elle a également précisé qu’« un détenu appartenant aux Frères musulmans a été transféré dans un hôpital public, mais a refusé de se soumettre aux examens médicaux, les médecins ayant pourtant confirmé son bon état physique ».

La Direction a réaffirmé « son engagement à appliquer la loi dans le respect des droits de tous les détenus, sur un pied d’égalité ».

La stratégie du “retour par la compassion”

Selon plusieurs observateurs de la scène politique tunisienne, les Frères musulmans poursuivent la diffusion de rumeurs et de fausses informations afin de susciter la compassion du public, tant au niveau national qu’international, et tenter de regagner une attention médiatique après avoir été marginalisés sur les plans local, arabe et mondial.

Vendredi dernier, le comité de défense de Ghannouchi a annoncé que ce dernier avait entamé une grève de la faim illimitée en solidarité avec le dirigeant du « Front du Salut » Jawhar Ben Mbarek.

Le même jour, Issam Chebbi et Ghazi Chaouachi ont également déclaré observer une grève de la faim.

Mardi, Abdelhamid Jelassi, membre du Front du Salut et ancien dirigeant du mouvement Ennahdha, a lui aussi rejoint la grève. Jelassi avait été emprisonné plus de 16 ans sous la présidence de Zine El-Abidine Ben Ali (1987-2011) avant de quitter le mouvement en mars 2020.

En avril 2024, la justice tunisienne a prononcé des peines allant de 4 à 66 ans de prison à l’encontre d’environ 40 personnes reconnues coupables de « complot contre la sûreté intérieure et extérieure de l’État » et de « formation d’une organisation terroriste liée à des crimes terroristes ».

Parmi les condamnés figurent plusieurs figures du mouvement islamiste Ennahdha, dirigé par Rached Ghannouchi, notamment l’ancien ministre de la Justice du gouvernement des Frères musulmans, Noureddine Bhiri, condamné à 43 ans de prison, ainsi qu’Abdelhamid Jelassi, condamné à 13 ans.

Issam Chebbi, dirigeant du « Front du Salut », et Jawhar Ben Mbarek ont chacun été condamnés à 18 ans de prison.

Quant à l’ancien chef du parti Ettakatol (social-démocrate), Khemaïs Ksila, il a écopé d’une peine de 48 ans de prison, tandis que la plus lourde peine, 66 ans de réclusion, a été prononcée contre l’homme d’affaires influent Kamel El-Tayef.

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