Politique

La crise entre le Mali et l’Algérie pèse sur la sécurité régionale

Crisis Group met en lumière le recul de l’influence algérienne au Sahel et appelle à une médiation africaine pour apaiser les tensions.


Le Groupe international de crise (International Crisis Group) a mis en lumière l’escalade des tensions entre le Mali et l’Algérie ainsi que le déclin de l’influence algérienne dans la région du Sahel, mettant en garde contre les répercussions d’une crise exacerbée par l’amplification, selon elle, par l’Algérie de l’incident impliquant l’abattage d’un drone de reconnaissance de l’armée malienne. L’organisation alerte sur les conséquences de cette détérioration sur la stabilité d’une région déjà fragilisée par des risques sécuritaires et des menaces terroristes, plaidant pour une médiation africaine afin d’éviter l’escalade.

Spécialisée dans la recherche et l’analyse approfondie sur les zones de conflit dans le monde, l’organisation estime que, sans efforts concrets pour réduire les tensions, la crise entre Bamako et Alger pourrait évoluer vers un affrontement ouvert.

Elle souligne également que l’Algérie a raté une occasion stratégique de renforcer son rôle dans la région du Sahel après le retrait de la France de l’opération Barkhane en 2022. Alger aurait pu combler ce vide et s’imposer comme partenaire sécuritaire crédible, mais son échec dans le dossier malien a poussé Bamako à se rapprocher du Niger et du Burkina Faso, alors que la Russie a profité du contexte pour accroître son influence par le biais d’accords militaires et économiques.

Les relations entre le Mali et l’Algérie se sont détériorées depuis que Bamako a annulé, fin 2023, l’accord de paix fragile signé en 2015 sous l’égide d’Alger, censé mettre fin au conflit opposant l’armée malienne aux séparatistes touaregs, sans qu’aucun progrès tangible n’ait été constaté.

Alger est perçue comme n’ayant pas accepté la fin de son rôle au Mali, pays qui l’a accusée à plusieurs reprises d’ingérence, notamment pour avoir négocié avec les séparatistes sans l’impliquer, ce que les autorités algériennes ont nié en affirmant que leurs discussions visaient uniquement à apaiser les tensions avec leur voisin.

La crise s’est aggravée début avril avec la destruction par l’Algérie d’un drone malien au-dessus de son territoire, un acte perçu davantage comme une démonstration de force que comme une mesure de protection nationale. Les relations ont alors atteint un point de rupture : Bamako et ses alliés, le Niger et le Burkina Faso, ont rappelé leurs ambassadeurs à Alger, qui a répliqué en rappelant ses propres ambassadeurs au Mali et au Niger.

Des observateurs estiment que l’Algérie traverse une phase d’isolement sur le continent africain, en raison de sa diplomatie hésitante et de son incapacité à reconstruire ses relations avec plusieurs pays. Malgré son image de médiateur en matière de paix et de stabilité, ses tentatives se sont soldées par des échecs, et elle fait face à des accusations d’ingérence, de soutien aux mouvements séparatistes, et d’un désir d’accroître son influence sans proposer de véritables solutions aux défis économiques et de développement de la région.

Dans son rapport, Crisis Group avertit que la poursuite de l’escalade, en particulier dans le contexte des frappes de drones menées par l’armée malienne contre les groupes armés dans le nord, risque d’entraîner des erreurs de ciblage ou des violations de frontières mettant en danger la vie de civils et de militaires.

Le groupe considère que la montée des tensions entre Bamako et Alger compromet les chances de résolution du conflit entre le gouvernement central et les mouvements touaregs. Ces derniers cherchent à affaiblir les capacités de l’armée malienne et à avancer vers le contrôle de villes stratégiques après plusieurs victoires militaires. Certains pourraient même nouer des alliances avec des groupes jihadistes.

Crisis Group appelle à des solutions diplomatiques urgentes à la crise entre l’Algérie et le Mali, en insistant sur la nécessité de reconnaître mutuellement les intérêts sécuritaires des deux parties et d’éviter toute posture de domination ou de déni, tout en proposant une médiation africaine pour désamorcer les tensions entre ces deux pays partageant plus de 1 400 kilomètres de frontière.

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