Grand Maghreb

La « chambre noire » engloutit les Frères tunisiens… Décision judiciaire contre le « leader » et les cadres


Les violations commises durant les années de pouvoir se retournent contre les Frères musulmans de Tunisie, un mouvement qui paie aujourd’hui un prix élevé pour une décennie noire marquée par le sang et l’extrémisme.

Ce vendredi, la justice tunisienne a refusé la libération de plusieurs dirigeants du mouvement islamiste Ennahdha et de hauts cadres sécuritaires impliqués dans l’affaire dite de la « chambre noire » au ministère de l’Intérieur.

La chambre criminelle du tribunal de première instance du gouvernorat de l’Ariana (banlieue de Tunis) a rejeté les demandes de libération déposées par plusieurs accusés détenus dans cette affaire, dont l’examen a été reporté au mois de mars prochain.

Les soupçons dans cette affaire visent le chef des Frères musulmans de Tunisie, Rached Ghannouchi, ainsi que d’autres figures influentes du mouvement, en plus de hauts responsables sécuritaires, notamment l’ex-directeur du renseignement tunisien et le chef de l’unité de lutte contre le terrorisme d’El-Gorjani, au centre de la capitale.

Le juge d’instruction avait déjà émis des mandats de dépôt à l’encontre de Ghannouchi et d’anciens cadres sécuritaires ayant occupé des postes de direction au sein des services de renseignement du ministère de l’Intérieur et de la direction centrale de lutte contre le terrorisme.

Un mandat d’arrêt judiciaire a également été émis contre Mustapha Khadr, actuellement en fuite à l’étranger et poursuivi dans cette affaire.

La « chambre noire »

Cette affaire concerne des documents transférés sans mandat de saisie depuis une école de conduite appartenant à Mustapha Khadr, chef présumé de l’appareil secret des Frères musulmans, vers le ministère de l’Intérieur, sans en informer la brigade de police judiciaire ni le juge d’instruction chargé du dossier.

L’appareil secret des Frères musulmans est soupçonné d’être impliqué dans plusieurs assassinats politiques et autres crimes graves, selon les rapports d’enquête sur les assassinats des hommes politiques Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi.

L’existence de cette chambre secrète n’a été officiellement reconnue qu’après que le juge d’instruction en charge de l’affaire Brahmi s’est rendu au ministère de l’Intérieur et y a saisi de nombreuses caisses et sacs contenant une immense quantité de documents.

Ces documents ont ensuite été transférés au Pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme le 13 novembre 2018.

Suite à ces découvertes, le juge d’instruction chargé de l’affaire Belaïd et Brahmi a inculpé Mustapha Khadr pour homicide volontaire dans le dossier Brahmi, en plus de 22 autres chefs d’accusation.

À l’époque, le comité de défense de Belaïd et Brahmi avait révélé que le juge avait découvert des documents liés à l’organisation secrète du mouvement Ennahdha, ainsi qu’aux assassinats politiques.

Parmi ces documents figurent des dossiers sur Mohamed Al-Awadi, chef de la branche militaire du groupe extrémiste Ansar Al-Sharia, accusé d’avoir assassiné Mohamed Brahmi. L’un de ces documents recommandait de lui fournir une escorte sécuritaire afin de faciliter sa sortie de Tunisie.

Le juge a également trouvé deux listes de criminels, avec leurs numéros de téléphone, parmi lesquels Amer Al-Balazi, accusé dans les assassinats de Belaïd et Brahmi, ayant jeté les armes du crime en mer. Mustapha Khadr a reconnu avoir des liens avec Amer Al-Balazi.

Le comité de défense de Belaïd et Brahmi avait déjà affirmé que le mouvement Ennahdha disposait d’une organisation secrète impliquée dans des assassinats politiques et que Mustapha Khadr, exfiltré à l’étranger, en était le responsable. Il aurait détenu des documents liés aux assassinats de Belaïd et Brahmi.

En décembre 2013, le comité avait également signalé la découverte d’une série de documents dans la résidence de Khadr. Une partie de ces documents aurait été stockée dans une « chambre noire » au ministère de l’Intérieur, ce qui avait conduit le comité à réclamer son ouverture et l’accès aux documents qui y étaient entreposés.

 

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