Politique

Iran et Israël : frappes croisées… y a-t-il encore une fenêtre pour des négociations nucléaires ?


Alors que l’Iran et Israël échangent des frappes, la diplomatie semble reléguée à l’arrière-plan, malgré plusieurs rounds de négociations entre Téhéran et Washington ces dernières semaines.

Mais cela signifie-t-il pour autant que la diplomatie est morte sur ce dossier ?

Selon le New York Times, les efforts pour parvenir à un accord sur le programme nucléaire iranien pourraient être relancés, même après que les frappes israéliennes ont compromis le dernier cycle de pourparlers.

Le journal ajoute : « Au cœur d’un conflit qui pourrait dégénérer en guerre, il ne faut pas écarter la possibilité de reprendre les discussions sur le programme nucléaire en pleine expansion de l’Iran. »

La campagne militaire israélienne pourrait durer plusieurs jours, voire semaines, et l’Iran continue de riposter. De son côté, Washington ne semble pas, pour l’instant, exercer de pression sur les deux parties pour mettre fin à la violence et relancer les pourparlers.

L’Iran veut négocier

Téhéran, tout comme l’ancien président américain Donald Trump, souhaite toujours parvenir à un accord. Le format des négociations dépendra donc nécessairement du moment et des conditions dans lesquelles le conflit militaire actuel entre Tel-Aviv et Téhéran prendra fin.

Le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, a déclaré dimanche dernier aux diplomates étrangers à Téhéran : « Nous sommes prêts à tout accord garantissant que l’Iran ne cherche pas à obtenir l’arme nucléaire. »

Cependant, il a précisé que l’Iran n’accepterait aucun accord « qui le prive de ses droits nucléaires », notamment le droit à l’enrichissement d’uranium, même à faible niveau, à des fins civiles.

Il a même accusé Israël de « vouloir saboter la diplomatie et faire échouer les négociations », une analyse partagée par de nombreux experts occidentaux selon le New York Times.

Israël justifie ses frappes

De son côté, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a justifié l’attaque contre l’Iran par la nécessité d’empêcher Téhéran de développer une arme nucléaire, alors même qu’un sixième round de négociations avec les États-Unis était prévu.

Les calculs israéliens

Israël affirme avoir agi pour empêcher l’Iran d’accélérer la fabrication d’une bombe atomique. Pourtant, les évaluations américaines et européennes estiment que l’Iran est encore à plusieurs mois d’une telle capacité et n’a pas encore pris de décision définitive.

Netanyahou aurait craint qu’un éventuel accord entre les États-Unis et l’Iran l’empêche d’atteindre son objectif : détruire le programme nucléaire iranien, voire provoquer, comme il l’espère, un changement de régime.

Mais il est hautement improbable qu’Israël parvienne à détruire ce programme sans une participation active des États-Unis — une option que Trump refuse toujours à ce stade.

Le président américain souhaite parvenir à un accord. Il semble croire que les frappes israéliennes affaibliront l’Iran et le forceront à revenir à la table des négociations dans une posture plus conciliante, acceptant d’abandonner totalement l’enrichissement de l’uranium.

Mais l’Iran maintient qu’il a le droit d’enrichir de l’uranium à des fins civiles, conformément au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).

Pour Vali Nasr, professeur à l’université Johns Hopkins et ancien conseiller au Département d’État sous Barack Obama : « Conclure rapidement un accord incluant l’abandon de l’enrichissement serait perçu comme une capitulation, ce qui fragiliserait encore plus le régime à l’intérieur du pays. »

Et d’ajouter : « Ils ne renonceront pas à l’enrichissement. Pas aussi facilement. Ils ne céderont pas. »

Le rôle de Washington

Robert Malley, ancien négociateur américain avec l’Iran sous Joe Biden, a affirmé que les négociations étaient actuellement suspendues. Leur reprise dépendra de la durée et des résultats de l’offensive israélienne.

Il estime que Washington soutient tacitement les frappes israéliennes, mais : « À un moment donné — et plus tôt ce sera, mieux ce sera — les États-Unis devront faire preuve de retenue » pour éviter une escalade.
Selon le New York Times, Trump veut un accord et souhaite éviter une guerre ouverte.

Karen von Hippel, ancienne responsable au Département d’État américain, partage cette vision : « Nous reviendrons tôt ou tard à la table des négociations. Mais à quel prix pour Israël et pour la région ? »

Elle précise : « Le défi sera de permettre aux Iraniens de sauver la face pour revenir aux pourparlers », alors que Trump préférerait les « forcer à capituler ».

Sauf effondrement du régime iranien ou tentative israélienne d’éliminer ses dirigeants politiques et religieux, comme ce fut le cas avec le Hezbollah, tout futur accord ressemblera probablement à celui de 2015 — abandonné par Trump lors de son premier mandat.

Ce type d’accord viserait à empêcher l’Iran de développer une arme nucléaire, tout en lui laissant le droit d’enrichir l’uranium à des fins pacifiques.

« La meilleure option »

Susan Maloney, spécialiste de l’Iran et directrice du programme de politique étrangère au think tank Brookings, estime que, même si le régime iranien ne s’effondre pas, il reste « affaibli et très vulnérable ».

Elle conclut : « Le chemin vers un accord est aujourd’hui incertain, mais la diplomatie demeure la meilleure voie pour permettre à l’Iran de sortir de cette crise existentielle. »

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