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Heglig sous le contrôle des forces de Tasis : effondrement économique humiliant pour l’autorité de Port-Soudan et tournant américain qui bouleverse les calculs d’Al-Burhan


La prise de contrôle du champ pétrolier de Heglig par les forces de Tasis constitue une étape cruciale dans la guerre soudanaise, non seulement sur le plan militaire, mais également en termes de rééquilibrage économique et de pression politique au Soudan et dans la région. Heglig n’est pas un site ordinaire pouvant être traité comme un simple butin ; il représente le cœur du système de production et de transport du pétrole du Sud-Soudan et constitue un nœud stratégique dont dépend un réseau d’approvisionnement traversant le territoire soudanais jusqu’à Port-Soudan, véritable artère économique pour les autorités dirigées par Al-Burhan. Ainsi, le retrait calme de l’armée et du personnel du site n’était pas un simple geste tactique, mais une reconnaissance implicite de la perte inévitable et du risque que tout affrontement détruit des installations considérées comme une ligne rouge régionale.

Le fait que les forces de Tasis aient pu imposer leur contrôle sans sabotage ni perturbation, et qu’elles aient annoncé via leurs canaux numériques leur engagement à protéger les approvisionnements pétroliers, a donné l’impression que le mouvement dispose d’outils de gestion et n’est pas seulement un acteur militaire. Toutefois, les inquiétudes sur les marchés pétroliers persistent, avec la possibilité que les exportations du Sud-Soudan, économiquement dépendantes de cette ligne vitale, soient affectées. La possession de ce levier confère aux forces de Tasis un pouvoir de négociation considérable et inaugure une nouvelle phase de rééquilibrage du pouvoir dans le sud du pays, alors que l’autorité de Port-Soudan perd du terrain sur des positions qu’elle considérait acquises.

Cette évolution sur le terrain s’accompagne de changements politiques notables à Washington, où l’administration du président Donald Trump s’implique directement dans le dossier soudanais, comme l’ont révélé les déclarations du secrétaire d’État Marco Rubio indiquant un suivi personnel du président. Ce tournant résulte de la prise de conscience américaine que la guerre soudanaise dépasse le cadre du conflit interne et touche des intérêts internationaux et régionaux, notamment avec le rôle croissant des Émirats, la présence russe via le projet de base navale à Port-Soudan, et les inquiétudes de Washington concernant un retour des islamistes dans l’armée.

Dans ce contexte, et face à l’incapacité de l’autorité de Port-Soudan à fournir des dossiers étayant ses accusations contre les Émirats et aux divergences entre la vision d’Al-Burhan et celle du Quartet international, Trump semble s’orienter vers une approche plus ferme, d’autant plus avec la volonté américaine de classer la confrérie des Frères musulmans comme organisation terroriste étrangère. Cette position exerce une pression supplémentaire sur l’armée soudanaise, où Washington insiste sur la présence de groupes islamistes influents. Il apparaît donc que les États-Unis préparent le terrain pour imposer un règlement susceptible de contrecarrer profondément les calculs d’Al-Burhan.

Dans ce contexte, le rapport de la BBC a accentué l’embarras international de Khartoum, révélant que l’aviation soudanaise a mené des frappes ayant causé la mort d’au moins 1 700 civils dans des écoles, des marchés et des camps de déplacés. Ce rapport, basé sur le projet « Witness Sudan », met en lumière la nature punitive du conflit, avec l’usage de bombes non guidées dans des zones densément peuplées, renforçant le récit des adversaires de l’armée et augmentant la pression internationale. Ainsi, le Soudan entre dans une nouvelle phase où la géographie militaire, les intérêts pétroliers, les enjeux de la mer Rouge et les interventions des puissances internationales s’entremêlent, transformant le conflit en un scénario complexe aux multiples dimensions.

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