Politique

Diego Garcia : retrait américain d’une base utilisée pour tromper l’Iran


La base de Diego Garcia a attiré une attention particulière au printemps dernier, alors que les tensions autour du programme nucléaire iranien s’intensifiaient au Moyen-Orient.

Des images satellites ont révélé le retrait des forces américaines de cette base navale isolée de l’océan Indien, après que cette installation militaire américano-britannique eut joué un rôle central dans une campagne visant à induire l’Iran en erreur.

À la fin du mois de mars, les analystes avaient observé une intensification du déploiement aérien américain à Diego Garcia, dans le contexte d’une montée des tensions régionales. Le secrétaire à la Défense, Pete Hegseth, confirma par la suite que ces opérations faisaient partie d’un dispositif destiné à dissuader l’Iran et ses alliés.

Située au cœur de l’océan Indien, Diego Garcia bénéficie d’une position stratégique, à 2 000 à 3 000 milles tant de l’Iran que de la Chine, ce qui en fait un point d’appui majeur pour la projection de puissance américaine dans l’ensemble de la vaste zone indo-pacifique.

Avec seulement quelques centaines de militaires britanniques et américains stationnés en permanence, la base permet aux États-Unis de réagir rapidement aux crises, en prépositionnant forces aériennes et navales à proximité des foyers de tension potentiels, souligne le magazine américain Newsweek.

Depuis l’opération « Minuit Hammer », menée en juin dernier par des bombardiers américains contre des sites nucléaires iraniens, la diplomatie entre Washington et Téhéran est quasiment paralysée. Le président Donald Trump a menacé de nouvelles frappes si les dirigeants iraniens refusaient de reprendre les négociations pour un nouvel accord nucléaire.

Contrairement aux bases américaines situées au Qatar et dans d’autres pays voisins, Diego Garcia échappe à la portée de la majorité des missiles iraniens, ce qui en fait une zone de lancement idéale. Par le passé, elle a servi de rampe pour les guerres d’Afghanistan et d’Irak et s’est transformée par la suite en centre opérationnel couvrant le Moyen-Orient, l’Asie du Sud et l’Afrique de l’Est.

Cependant, lors de l’ordre donné en juin pour frapper l’Iran, l’attaque ne fut pas lancée depuis Diego Garcia : le Pentagone opta pour le déploiement de sept bombardiers B-2 décollant du Missouri, afin de préserver l’effet de surprise.

Une image satellite récente, publiée par l’Agence spatiale européenne, montre désormais des parkings vides, là où étaient stationnés auparavant des bombardiers stratégiques et chasseurs américains, marquant la fin du rôle temporaire de Diego Garcia comme outil de signalisation militaire destiné à Téhéran.

Au plus fort des tensions, en mai, les États-Unis avaient renforcé leur dispositif sur la base en y acheminant des chasseurs F-15, des bombardiers B-2 et B-52, des ravitailleurs KC-135 et des avions de transport C-17.

« Nous avons sans doute assuré la préparation opérationnelle de Diego Garcia, mais le président a finalement privilégié une autre approche, centrée sur la sécurité », expliqua à Newsweek le général Joseph Votel, ancien chef du CENTCOM, aujourd’hui chercheur à l’Institut du Moyen-Orient.

L’opération « Minuit Hammer » s’appuyait sur la tromperie, le ravitaillement en vol et un silence radio quasi total : les bombardiers B-2 avaient décollé de la base aérienne de Whiteman, frappé des sites nucléaires iraniens, puis regagné leur point de départ après une mission de plus de 30 heures. En parallèle, une flotte distincte d’aéronefs de diversion fut dirigée vers Guam, réussissant à détourner l’attention des observateurs des véritables intentions américaines.

Selon Shahin Piroangi, professeur adjoint au Naval War College : « Le but de ces avions de diversion était probablement de recentrer l’attention de l’Iran sur une menace supposée émanant de Diego Garcia plutôt que du territoire continental américain. »

Il ajoute : « L’absence de troupes prépositionnées à Diego Garcia n’empêche nullement les États-Unis de frapper l’Iran à l’aide de bombardiers stratégiques décollant directement du pays. »

Pour les experts, la menace iranienne reste entière : la réduction du contingent américain sur Diego Garcia ne traduit pas un changement de priorité du CENTCOM.

Le général Votel conclut : « L’Iran continue d’influencer la stratégie américaine dans la région. Ses capacités d’enrichissement nucléaire ont certes été retardées, mais elles n’ont pas été anéanties. L’Iran n’a pas changé de cap : il reste donc essentiel de demeurer vigilant. »

En définitive, Diego Garcia restera un pivot stratégique majeur pour les États-Unis dans l’espace indo-pacifique, même si elle n’est pas sollicitée dans chaque opération.

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