Des juristes américains : classer les Frères musulmans comme organisation terroriste est une étape qui nécessite davantage de mesures
Des experts juridiques aux États-Unis estiment que la décision de classer les Frères musulmans comme « organisation terroriste » est une étape qui doit être suivie d’autres actions.
Ils considèrent que le mouvement traverse actuellement sa phase la plus fragile et souffre de désorganisation, mais que sa dangerosité réside encore dans son héritage idéologique radical.
Le président américain Donald Trump se prépare à porter un coup décisif aux Frères musulmans. Il a confirmé, dans des déclarations exclusives au site Just the News dimanche, qu’il désignera le groupe comme organisation terroriste étrangère, ajoutant : « Cela sera fait avec les termes les plus stricts et les plus fermes… Les documents finaux sont en cours de préparation. »
Cette annonce survient quelques jours après la publication par Just the News d’une enquête approfondie sur les activités des Frères musulmans et les inquiétudes croissantes au sein de l’administration Trump concernant leur influence.
Le débat s’intensifie aux États-Unis et en Europe sur la manière de traiter les Frères musulmans, alors que le camp occidental mène des révisions sur la façon d’aborder les risques que représente l’organisation pour les valeurs démocratiques.
Hazem Al-Ghabra, ancien conseiller au Département d’État américain et membre du Parti républicain, estime que le classement des Frères musulmans comme organisation terroriste est une mesure « très tardive ».
Il a expliqué que la structure institutionnelle de l’organisation s’est largement effondrée dans la plupart des pays du monde, mais qu’il subsiste de petits groupes et des individus porteurs de son idéologie.
Il a souligné que plusieurs pays européens ont commencé à qualifier les Frères musulmans d’« organisation terroriste ou promotrice de l’extrémisme », mais que cela « reste insuffisant » face au défi majeur qui consiste à affronter l’idéologie elle-même, et pas seulement l’organisation. Il a ajouté : « Il existe un contenu idéologique radical qui doit être traité, mais sans porter atteinte aux libertés fondamentales sur lesquelles reposent les sociétés occidentales. »
Selon lui, le véritable problème ne réside pas dans la structure organisationnelle des Frères musulmans, qui s’est presque dissipée, mais dans l’idéologie qui a généré des tensions dans les sociétés occidentales et arabes. Il a précisé que la démarche requise aujourd’hui doit concilier sécurité, cohésion sociale et préservation des libertés au cœur du système démocratique.
Al-Ghabra a déclaré qu’il est également vrai que les Frères musulmans n’ont jamais été une organisation institutionnelle cohérente, mais plutôt un réseau large d’individus et de groupes partageant une doctrine commune.
Il a ajouté que la nature décentralisée du mouvement « complique aujourd’hui toute tentative de relier officiellement des entités ou réseaux aux Frères musulmans aux États-Unis ou ailleurs », d’autant plus que les systèmes juridiques diffèrent d’un pays à l’autre.
Il a souligné que les systèmes juridiques aux États-Unis et en Europe reposent sur une stricte séparation entre religion et État, et que toute restriction doit éviter de porter atteinte à la pratique religieuse légitime tant qu’elle ne nuit pas à la société. Il a ajouté que « la question complexe réside dans la distinction entre activité religieuse protégée par la loi et activité politico-idéologique prônant l’imposition de la charia ou des idées contraires aux valeurs constitutionnelles ».
Concernant la lutte contre le terrorisme, il a affirmé que les lois actuelles constituent « l’outil le plus clair » pour traiter les groupes qui apportent un soutien direct ou indirect à des organisations terroristes telles que le Hamas, ajoutant que le débat s’amplifie autour des positions de certaines organisations qui justifient ou ignorent des actes destructeurs sous prétexte de « liberté d’expression ».
De son côté, l’avocate américaine de l’État du Maryland, Ginger T. Chapman, membre du Parti républicain, a mis en garde contre les démarches récentes du président Donald Trump visant à désigner les Frères musulmans comme organisation terroriste étrangère, signalant que ces efforts pourraient être entravés pour les mêmes raisons qui ont bloqué des projets similaires au cours des dix dernières années.
Chapman a expliqué que les précédents projets de loi échouaient au Congrès en raison d’un obstacle technique : toute désignation légale doit définir précisément ce que sont les Frères musulmans. Elle a souligné que le mouvement est décentralisé, transnational, dépourvu d’une direction unifiée et composé de nombreuses branches qui doivent être examinées séparément.
Elle a ajouté que plusieurs de ces branches sont des partis politiques légaux dans des pays alliés des États-Unis, ce qui complique le travail du Congrès pour satisfaire aux exigences de preuve lors des procédures législatives.
L’avocate a indiqué que si Trump parvient à formaliser cette désignation par décret exécutif, il pourrait contourner certaines exigences juridiques, mais s’exposerait à l’annulation de la mesure par un contrôle judiciaire.
Elle a précisé que la stratégie la plus efficace serait que le président ou le Congrès se concentrent sur les menaces spécifiques pour la sécurité nationale posées par certaines branches affiliées aux Frères musulmans, affirmant que cette approche permettrait d’interrompre le financement de l’organisation et de ses différents réseaux.
De son côté, le juriste américain de l’État du Tennessee, Corbett B. Coburn, également républicain, a affirmé que cette mesure permettrait au gouvernement américain de poursuivre des citoyens américains pour leurs publications sur les réseaux sociaux, mais qu’elle ne modifierait pas fondamentalement l’orientation de la politique américaine.
Il a ajouté que le dossier des Frères musulmans est devenu si important que le sénateur Ted Cruz, gouverneur du Texas, estime que son initiative de désigner le mouvement comme organisation terroriste pourrait renforcer sa position de candidat potentiel à la présidentielle.
Il a précisé que Cruz cherche à classer les Frères musulmans comme organisation terroriste pour apparaître comme un dirigeant « ferme », tandis que le président Trump tente de le surpasser en annonçant son intention de publier un décret exécutif majeur.
Le gouverneur républicain du Texas, Greg Abbott, a classé les Frères musulmans comme « organisation terroriste » et « organisation criminelle transnationale », une décision qui a également visé le Conseil des relations américano-islamiques (CAIR).
Le bureau du gouverneur du Texas a justifié cette décision en affirmant que les Frères musulmans cherchent à imposer leur idéologie par la force, une réalité que l’Europe a expérimentée au fil des années, mais dont les réponses — selon les observateurs — ont oscillé entre mesures symboliques et actions limitées, jugées insuffisantes pour contrer les risques liés à l’activité de l’organisation.
La mesure américaine s’avère plus contraignante, plaçant les Frères musulmans et leurs branches sous les lois strictes du Texas relatives au terrorisme et au crime organisé.
