Des élections marquées par la division : les coulisses de la désignation d’une nouvelle direction des Frères musulmans
Dans un nouveau chapitre du processus de fragmentation interne, le groupe des Frères musulmans se retrouve confronté à des élections internes organisées dans un climat de division profonde qui érode ce qui reste de sa cohésion.
La Fraternité, inscrite sur les listes terroristes dans plusieurs pays, a tenu ces derniers jours des élections internes en vue de désigner une nouvelle instance dirigeante, sans qu’aucune annonce officielle n’ait été faite, pour des raisons liées au fonctionnement interne de l’organisation.
Ces élections, perçues comme une « tentative de réingénierie vouée à l’échec pour restaurer une structure en ruine », ont été organisées par le camp de Londres avec seulement un quart des membres, boycottées et contestées par le camp d’Istanbul, et rejetées par le courant du changement, dans un contexte de recours incessants et de règles organisationnelles disputées.
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Un seul camp… les autres en marge
Le scrutin mené par le camp de Salah Abdel Hak, connu médiatiquement comme le « camp de Londres », a eu lieu en l’absence totale du camp de Mahmoud Hussein (camp d’Istanbul) et du courant du changement issu du bureau général. Chacun de ces camps considère les autres comme des « dissidents » sans légitimité pour représenter le groupe.
Ainsi, les élections se sont réduites à un processus monopolisé par une seule faction, tandis que les autres camps ont continué à contester la légitimité de toute décision issue de ce processus.
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Le déroulement du scrutin a été marqué par trois reports successifs, en raison de l’aggravation des divisions et des désaccords profonds concernant le règlement interne sur lequel reposaient les élections.
Après qu’un comité juridique dirigé par Mohieddine Al-Zayt a été chargé d’amender l’ancienne réglementation, les débats sur l’adoption de la version finale ont persisté. Finalement, les élections ont été organisées selon l’ancien règlement malgré l’achèvement des amendements.
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Un vote limité… une légitimité fragile
Le second motif de report a été le faible taux de participation, qui n’a pas dépassé 25 % de l’ensemble des membres inscrits dans les quatre sections concernées par les élections en Turquie.
Faute de quorum, le vote a été prolongé à plusieurs reprises durant deux jours, jusqu’à son achèvement, avec un grand nombre de recours en attente d’examen par le comité électoral et le comité juridique.
Les élections se sont tenues au niveau du Conseil consultatif dans différents pays ; les membres présents en Turquie ont voté physiquement, tandis que les membres établis à l’étranger ont voté en ligne.
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Après l’élection du Conseil consultatif général, ses membres ont choisi la composition du Comité administratif supérieur, organe qui remplace temporairement le Bureau de la Guidance selon le règlement de 2021, lequel confère au Conseil le pouvoir de sélection.
Le Comité administratif supérieur se compose de 21 membres : 7 issus des membres de l’intérieur, 7 de l’extérieur et 7 nommés par le guide par intérim en concertation avec le Conseil consultatif général. Selon les informations disponibles, certains cadres ayant quitté leurs fonctions seront promus vers le « Bureau mondial » chargé de la coordination internationale de l’organisation.
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Quant au bureau administratif du groupe en Turquie, ses élections n’ont pas encore été organisées en raison de divergences, de nombreux recours et d’un nombre élevé de candidats.
L’organisation prévoit une annonce succincte confirmant la tenue des élections sans divulguer de détails ni de résultats, tandis qu’un communiqué interne plus complet sera diffusé aux membres.
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Bien que le vote ait été mené, les indications initiales montrent que la structure dirigeante ne connaîtra pas de changements majeurs, d’autant plus que le scrutin s’est limité à une seule faction déjà affaiblie par des querelles internes et des contestations de légitimité. Aucun membre du camp de Mahmoud Hussein ni du courant du changement n’a participé au processus, que ce soit comme candidat ou électeur. Le camp de Londres ne reconnaît pas leur qualité de membres.
Le camp de Mahmoud Hussein n’a pas seulement boycotté le vote, mais a également pris des mesures punitives contre les partisans du camp de Londres. Il a mis en garde ses membres contre toute participation, menaçant de couper le soutien financier et les privilèges organisationnels. Il a aussi envoyé des éléments clandestins infiltrer le camp de Londres pour surveiller le déroulement du vote et identifier les participants, en vue de prendre des mesures disciplinaires à leur encontre, ce qui reflète la poursuite de la crise interne malgré la tenue formelle des élections.
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Depuis la chute du groupe en Égypte et l’effritement de sa structure organisationnelle dans la région et dans le monde, les urnes ne sont plus synonymes de renouvellement pour les Frères musulmans, mais un miroir d’une crise existentielle qui frappe le mouvement. Ainsi, cette nouvelle élection n’a fait que révéler l’ampleur des fractures internes au lieu de les réparer, ravivant une question centrale : qui représente réellement l’organisation aujourd’hui, et qui reste encore pour voter ?
