Moyen-Orient

Bombardements incessants et ordres quotidiens d’évacuation : Gaza saigne de son sang et de sa géographie


Les « ordres d’évacuation », devenus une pratique quasi quotidienne, représentent une nouvelle méthode israélienne pour exercer une pression sur les civils dans la bande de Gaza. Tel-Aviv tente désormais de les justifier par la poursuite des tirs de roquettes, dans une démarche perçue comme une réponse aux pressions subies.

Incapable de parvenir à une victoire militaire décisive à Gaza, Tel-Aviv transforme la politique de « l’évacuation forcée » en un outil stratégique pour imposer une nouvelle réalité : un territoire bombardé est vidé de ses habitants, puis intégré à la carte des zones tampons, qui ne cessent de s’étendre jour après jour.

Dimanche, l’armée israélienne a ordonné l’évacuation de tous les habitants des secteurs de Khan Younès et des quartiers suivants : Qizan al-Najjar, Qizan Abu Rashwan, Salam, Al-Manara, Al-Qareen, Ma’an, Al-Batn al-Samin, Jourt al-Lut, Al-Fukhari et les quartiers sud de Bani Suhaila, dans le sud de la bande de Gaza.

Ordres d’évacuation

Le porte-parole de l’armée israélienne pour les médias arabes, Avichay Adraee, a déclaré sur la plateforme X : « Ceci est un avertissement préalable et final avant l’attaque. Nous frapperons avec une extrême intensité toute zone d’où sont tirées des roquettes ». Il a ajouté : « Les organisations terroristes, à leur tête le Hamas, portent l’entière responsabilité du déplacement et de la souffrance des civils ».

Il a poursuivi : « Vous devez vous diriger immédiatement vers l’ouest, vers les centres d’hébergement connus dans la région de Mawasi ».

Plus tôt dans la journée, Adraee avait indiqué que « l’armée de l’air avait intercepté une roquette tirée depuis la bande de Gaza, sans faire de victimes ».

Des sirènes d’alerte ont retenti dans le kibboutz Re’im, à la frontière avec Gaza. Depuis la reprise des frappes sur Gaza le 18 mars dernier, les ordres d’évacuation sont devenus quasi quotidiens.

Selon un communiqué de l’armée israélienne, en réponse aux alertes déclenchées récemment, deux missiles auraient été lancés depuis le Yémen et des tentatives d’interception sont en cours. Le communiqué précise que ces alertes ont été activées conformément à la politique établie.

Missiles en provenance du Yémen

L’armée israélienne a supposé qu’une roquette tirée depuis le Yémen avait été interceptée, entraînant le déclenchement des sirènes dans de nombreuses zones, dont Jérusalem et la grande région de Tel-Aviv.

Elle a ajouté : « Après vérifications, il s’agirait d’un seul missile probablement intercepté avec succès ».

Le trafic aérien a été brièvement suspendu à l’aéroport international Ben Gourion lors du déclenchement des alertes dans la région de Tel-Aviv.

Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA) estime que près de 66 % de la bande de Gaza est désormais interdite aux Palestiniens, que ce soit en raison des ordres d’évacuation ou du classement en « zone tampon » par Israël.

Ces zones tampon, autrefois limitées aux frontières, s’élargissent de jour en jour. Les frappes aériennes israéliennes sur Gaza se poursuivent.

Frappes israéliennes

Dimanche, l’armée israélienne a annoncé avoir ciblé un « complexe de commandement et de contrôle du Hamas à Deir al-Balah, au centre de la bande de Gaza ».

Elle a affirmé : « Les forces de l’armée et du Shin Bet poursuivent les frappes à travers la bande de Gaza pour éliminer toute menace visant les citoyens israéliens et les soldats ».

L’armée a également revendiqué le bombardement de l’hôpital anglican Al-Ahli à Gaza-Nord dans la nuit de samedi à dimanche.

Dans son communiqué, elle a déclaré : « Nous avons ciblé un centre de commandement de Hamas situé à l’intérieur de l’hôpital, utilisé pour planifier et superviser des opérations contre l’armée et les citoyens israéliens ».

Elle a rappelé avoir averti à plusieurs reprises contre l’utilisation d’établissements médicaux à des fins militaires.

Condamnation des frappes

Le Patriarcat grec-orthodoxe de Jérusalem a dénoncé cette frappe, survenue le jour du Dimanche des Rameaux précédant les grandes fêtes chrétiennes.

Dans un communiqué, le Patriarcat a qualifié la frappe de « violation flagrante de la sacralité de la vie sur la Terre de la Rédemption, une blessure douloureuse au cœur du message chrétien humanitaire ».

Il a ajouté que « l’attaque avait visé un établissement médical enraciné dans la miséricorde chrétienne, qui a soigné pendant des décennies les blessés et les nécessiteux, quelle que soit leur appartenance ».

Le communiqué précise que l’hôpital Al-Ahli était l’un des derniers centres médicaux encore opérationnels à Gaza, après que la guerre a détruit la plupart des installations de santé, dans ce qu’il qualifie de « déracinement total de la compassion face à une violence systémique ».

Malgré les blessures et les destructions, l’église Saint-Porphyre dans le quartier de Zeitoun — l’un des plus anciens monuments chrétiens de Gaza — a tenu la messe du Dimanche des Rameaux, dans une atmosphère emplie de foi et de fermeté, adressant ainsi un message symbolique : « La prière ne peut être bombardée, la lumière du Christ ne peut être éteinte, même au cœur de la douleur ».

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