Moyen-Orient

Les occasions manquées avant le 7 octobre… Pourquoi Israël a-t-elle annulé les plans visant à éliminer al-Sinwar et Deif ?


Les coulisses des occasions perdues avant l’attaque du 7 octobre révèlent qu’Israël avait devant elle des options décisives pour cibler des dirigeants du Hamas, mais qu’elle ne les a pas mises à exécution.

C’est ce que montrent des témoignages israéliens recueillis, selon le quotidien Yedioth Ahronoth, précisant que la raison en était la volonté de « préserver le calme à Gaza ».

Le journal rapporte que la commission d’enquête présidée par le général de réserve Sami Turgeman a reçu des témoignages de hauts officiers de l’armée israélienne décrivant ce qu’ils qualifient de « grandes occasions manquées » au cours des deux années ayant précédé l’attaque menée par le Hamas le 7 octobre 2023.

D’après ces récits, les plans opérationnels préparés par le commandement sud de l’armée pour cibler les dirigeants du Hamas Mohammed Deif et Yahya al-Sinwar n’ont pas été appliqués, malgré les recommandations de plusieurs hauts gradés.

L’ancien chef d’état-major, Aviv Kochavi, insistait pour concentrer les efforts sur la préparation du front nord, tandis que la direction politique israélienne exerçait une pression répétée sur l’armée afin d’éviter toute opération militaire à Gaza durant les périodes d’accalmie.

Yahya al-Sinwar, que Israël accuse d’être le cerveau de l’attaque du 7 octobre, a été tué au cours du même mois en 2024.

Avant sa mort, il occupait le poste de chef du bureau politique du mouvement, succédant à Ismaïl Haniyeh, tué à Téhéran lors d’une frappe attribuée à Israël.

Le 1er août dernier, l’armée israélienne a annoncé que Mohammed Deif, commandant des Brigades al-Qassam, la branche militaire du mouvement, avait été tué dans une frappe aérienne à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, le 13 juillet.

Dissensions internes autour des opérations
Un haut officier a indiqué que le commandement sud préconisait non seulement une opération limitée visant al-Sinwar et Deif, mais aussi un plan plus vaste, élaboré au début de l’année 2020, et comprenant quatre phases :

– Une initiative surprise visant à éliminer Deif, al-Sinwar et certains commandants des Brigades al-Qassam,
– Des frappes aériennes étendues contre les sites de renforcement militaire du Hamas,
– Une série d’opérations aériennes pour détruire les positions du Hamas et du Jihad islamique,
– Une manœuvre limitée de trois brigades de l’armée israélienne pour nettoyer les zones de lancement de roquettes.

Contraintes et priorité au front nord

Mais, selon les témoignages, la direction politique, dirigée par le Premier ministre Benyamin Netanyahou, tenait à maintenir le Hamas au pouvoir à Gaza afin de préserver une forme de stabilité et d’éviter toute responsabilité de gestion directe du territoire.

Certains officiers ont indiqué que les occasions disponibles avaient été annulées parce qu’Israël considérait que le Hamas devait rester affaibli mais debout.

À l’approche de 2023, l’armée s’est concentrée sur la menace du Hezbollah et de l’Iran, notamment après un incident d’infiltration depuis le Liban en mars, ce qui a conduit le gouvernement à presser l’armée de maintenir le calme à Gaza « presque à tout prix ».

Un autre haut officier a toutefois présenté une version contradictoire, affirmant qu’à la première occasion, en mai 2022, le commandement sud avait uniquement recommandé le plan le plus restreint, visant à éliminer les deux dirigeants du Hamas.

Selon ce témoignage, l’idée provenait du Shin Bet après une attaque ayant causé la mort de quatre Israéliens.

Quelques jours plus tôt, al-Sinwar avait prononcé ce qui fut appelé localement le « discours de la hache », incitant les Palestiniens à utiliser tout moyen disponible pour tuer des Israéliens.

La proposition fut rejetée, selon les officiers, en raison de l’hypothèse israélienne de longue date selon laquelle le Hamas devait rester affaibli mais intact à Gaza, et que les scènes de Cisjordanie et de Gaza ne devaient pas être reliées opérationnellement.

L’opération annulée

D’après les témoignages, l’opération annulée comprenait des missions aériennes coordonnées et l’élimination de commandants intermédiaires, sans objectif d’éradiquer totalement le Hamas.

La durée prévue de l’opération était d’environ deux semaines, l’armée se préparant ensuite à un risque de confrontation sur plusieurs fronts, en tenant compte des capacités du Dôme de fer et des pertes humaines potentielles.

L’armée a confirmé que cette question avait été discutée devant la commission Turgeman, tout en précisant que celle-ci n’avait pas l’autorité nécessaire pour publier des conclusions définitives sur ces décisions.

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