Deux experts: Les Frères musulmans en France pratiquent un terrorisme judiciaire

Un débat croissant entoure l’influence des Frères musulmans en France, ravivé par l’affaire impliquant la députée française Marion Maréchal.
Deux experts français estiment que cette affaire a relancé la discussion sur les limites de la liberté d’expression face au « terrorisme judiciaire » exercé par le groupe contre ses détracteurs. Selon eux, les Frères musulmans instrumentalisent la justice pour intimider leurs opposants politiques en France.
La députée française et membre du Parlement européen, Marion Maréchal, présidente du mouvement « Identité et Libertés », a réaffirmé jeudi sa détermination à poursuivre son combat contre l’influence des Frères musulmans, après qu’une organisation affiliée au groupe a déposé une plainte pour diffamation à son encontre.
Franck Frégosi, chercheur au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), a expliqué que les Frères musulmans ne constituent pas un mouvement religieux ou caritatif, mais bien un projet idéologique et politique à long terme visant à influencer les sociétés occidentales. Leur méthode ne passe pas nécessairement par la violence directe, mais par un travail progressif au sein des institutions éducatives, des associations, des mosquées et du marché halal. Il a souligné que le groupe intimide toute personnalité politique ou responsable français qui la critique.
Selon Frégosi, le groupe pratique une stratégie d’« infiltration » des institutions de la société civile et de l’État, afin de diffuser des valeurs et des réformes conformes à sa vision. Cette pénétration s’effectue souvent de manière discrète, sous couvert d’activités sociales ou éducatives. Son influence se manifeste davantage sur le long terme, au niveau culturel et moral, plutôt que par des actions directes.
Il a précisé que cette stratégie rejoint les avertissements de Marion Maréchal, tout en soulignant que le problème ne réside pas uniquement dans les organisations extérieures ou les complots structurés, mais également dans l’isolement social et le sentiment de discrimination de certains musulmans en France, qui peuvent les pousser vers des alternatives idéologiques ou culturelles.
De son côté, le constitutionnaliste français Denis Branger, professeur de droit public à l’Université Paris-Panthéon, a déclaré que le problème ne se limite pas au dépôt d’une plainte contre une députée. Il a rappelé que, selon la Constitution française, les parlementaires bénéficient d’une « immunité » qui les protège contre toute poursuite liée à leurs opinions ou à leurs votes exprimés dans l’exercice de leur mandat.
L’article 26 de la Constitution stipule en effet qu’un parlementaire « ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé en raison des opinions ou votes émis dans l’exercice de ses fonctions ». Selon Branger, utiliser la justice pour cibler un élu, même sans condamnation finale, représente une menace potentielle pour la liberté d’expression et le contrôle parlementaire, risquant de réduire l’espace du débat politique en France.
Dans une vidéo publiée sur son compte X (ancien Twitter), Marion Maréchal a dénoncé « l’acharnement judiciaire » des Frères musulmans à son encontre, rapportait le journal français Le Journal du Dimanche.
Le procureur de Valence a d’ailleurs annoncé que le parquet ne requérait aucune sanction contre la députée, estimant que ses propos relevaient du « débat démocratique ».
Dans cette vidéo, Maréchal a déclaré : « Depuis que j’ai fait de la lutte contre votre mouvement et votre idéologie une priorité politique, vous avez déclenché contre moi un véritable terrorisme judiciaire. »
L’affaire remonte à une interview accordée à la chaîne CNews le 2 octobre 2023, au cours de laquelle Maréchal avait accusé le maire de Valence d’avoir tenté de vendre un terrain à une association proche des Frères musulmans, en référence à l’école islamique gérée par l’association « Valeurs et Réussite ». Cette dernière avait alors porté plainte pour diffamation.
Maréchal, absente des audiences, a néanmoins réaffirmé depuis le Parlement européen à Bruxelles son engagement à « combattre le mouvement des Frères musulmans ».
« À Bruxelles, je révèle vos autres visages, dont celui de l’organisation FEMYSO, que je considère comme une façade cachée d’influence sous couvert d’association de jeunesse », a-t-elle ajouté, accusant le groupe de s’infiltrer silencieusement dans les institutions européennes, profitant de la « naïveté ou de la complaisance » de certains responsables.
Elle a cité l’exemple de la dissolution, en juin dernier, par le ministère français de l’Intérieur, de l’Institut européen des sciences humaines (IESH), considéré comme le plus ancien centre de formation d’imams en France, en raison de ses liens présumés avec les Frères musulmans.
« Vous pouvez salir ma réputation, m’attaquer ou me menacer, mais jamais vous ne ferez taire ma voix », a-t-elle conclu.
Le parquet français, de son côté, a considéré que les propos de la députée s’inscrivaient pleinement dans le cadre de la liberté d’expression politique, et a ainsi requis la relaxe.