Etats-Unis

Trump menace de l’utiliser : qu’est-ce que la loi sur l’insurrection ?


Aux États-Unis, l’armée est généralement tenue à l’écart des affaires intérieures. Pourtant, le président Donald Trump a plusieurs fois brandi la menace de recourir à la « loi sur l’insurrection », un texte qui lui conférerait des pouvoirs étendus pour déployer les forces armées à l’intérieur du pays.

« Eh bien, elle a déjà été utilisée », a déclaré Trump cette semaine devant les journalistes, avant d’ajouter : « Nous voulons des villes sûres. »

Plus tôt dans la semaine, le président avait menacé d’activer cette loi, qui lui permettrait d’envoyer des troupes fédérales pour réprimer des émeutes ou un soulèvement violent — notamment dans les villes gouvernées par ses adversaires démocrates.

Trump avait d’ailleurs signé un décret ordonnant le déploiement de 300 membres de la Garde nationale à Chicago, la plus grande ville de l’Illinois, afin de « protéger les installations et personnels fédéraux ».

Cependant, jeudi, une juge fédérale, April Perry, a suspendu cette décision, estimant que la situation à Chicago « ne constituait pas une insurrection », contrairement à ce qu’avait invoqué l’administration. Des médias locaux ont rapporté que la magistrate jugeait la menace exagérée et infondée.

Le week-end précédent, une autre juge avait temporairement bloqué une mesure similaire à Portland, déclarant : « Il n’y a pas eu d’insurrection à Portland, ni de menace à la sécurité nationale », réfutant ainsi les arguments du gouvernement.

Trump avait déjà ordonné le déploiement de la Garde nationale à Los Angeles, Washington et Memphis, malgré l’opposition des autorités locales.

Qu’est-ce que la loi sur l’insurrection ?

Cette loi, promulguée en 1807 sous la présidence de Thomas Jefferson, autorise le président à mobiliser l’armée ou la Garde nationale fédérale à l’intérieur du pays pour faire face à des rébellions, des émeutes ou des entraves graves à l’application des lois fédérales.

Elle peut être invoquée « en cas d’obstacles, d’attroupements illégaux ou d’insurrections » qui menacent l’autorité du gouvernement américain. Elle permet donc au président de recourir à la force militaire pour rétablir l’ordre ou garantir l’application des lois fédérales, même sans l’accord préalable du Congrès dans certaines circonstances.

Historiquement, les États-Unis ont toujours cherché à maintenir une stricte séparation entre les forces armées et la gestion intérieure, et le recours à cette loi reste exceptionnel.

Quand a-t-elle été utilisée ?

La loi sur l’insurrection a été invoquée à de multiples reprises dans l’histoire américaine, mais son usage s’est raréfié depuis les années 1960, à l’époque du mouvement des droits civiques.

La dernière application remonte à 1992, lors des violentes émeutes raciales de Los Angeles, provoquées par l’acquittement de quatre policiers accusés d’avoir battu Rodney King. À cette occasion, le président George H. W. Bush avait activé la loi à la demande du maire démocrate de la ville et du gouverneur républicain de Californie.

Dans la majorité des cas passés, les présidents et les gouverneurs s’accordaient sur la nécessité d’un déploiement militaire. Néanmoins, la loi prévoit des situations dans lesquelles cette coordination n’est pas requise.

En 2005, le président George W. Bush avait choisi de ne pas recourir à cette disposition pour envoyer des troupes en Louisiane après le passage de l’ouragan Katrina, notamment en raison de l’opposition du gouverneur de l’État.

Pourquoi cette loi suscite-t-elle la controverse ?

Les fondateurs des États-Unis, marqués par les abus de l’armée britannique à l’époque coloniale, redoutaient qu’un pouvoir militaire illimité confié au président ne menace les libertés civiles et la démocratie.

La Constitution confère aux gouverneurs des États la responsabilité du maintien de l’ordre sur leur territoire. Or, selon plusieurs organisations de défense des droits civiques, la loi sur l’insurrection accorde au président un pouvoir excessif, lui permettant d’utiliser l’armée comme une force de police intérieure — ce qui contrevient à l’esprit des pères fondateurs.

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