Pourquoi l’Iran a-t-il réactivé son Conseil de défense nationale ?

L’Iran a récemment réactivé le Conseil de défense nationale, une décision qui reflète le besoin croissant de renforcer la coordination entre les institutions politiques et militaires dans un contexte de mutations régionales rapides et de tensions internes accrues entre factions militaires et civiles, notamment à la suite d’importantes failles sécuritaires.
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Cette mesure intervient peu après la guerre de douze jours entre l’Iran et Israël, qui a mis en lumière certaines lacunes dans la gestion de la décision stratégique. Elle s’inscrit également dans un effort plus large de restructuration du système sécuritaire iranien et de redéfinition des rôles entre les différents centres de pouvoir.
Le Conseil est perçu comme une plateforme institutionnelle visant à améliorer la réactivité face aux crises, à rationaliser la prise de décision et à éviter une politisation excessive des choix militaires, tout en assurant une meilleure cohésion entre les élites civiles et les commandements militaires.
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Le Conseil de défense nationale, récemment reformé, est l’un des organes suprêmes de coordination des politiques sécuritaires et militaires en Iran. Il regroupe les principales autorités civiles et militaires et détient le pouvoir de décision stratégique en temps de crise.
Selon l’expert en affaires iraniennes Dr. Ahmad Lashin, cette instance n’est pas nouvelle : elle remonte à la guerre Iran-Irak, durant laquelle elle avait joué un rôle clé dans la conduite militaire. Sa résurgence récente est étroitement liée au conflit avec Israël, révélateur d’une volonté d’anticiper toute confrontation future avec l’État hébreu.
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Conformément à la Constitution iranienne, ce conseil relève du président de la République, car il est issu du Conseil suprême de sécurité nationale, également dirigé par le président. Toutefois, la mise en place du Conseil à ce moment précis indique selon Lashin plusieurs objectifs, notamment la gestion centralisée des éventuelles escalades militaires et la consolidation du contrôle sur les forces armées.
Ce retour s’inscrit aussi dans une vaste réorganisation de l’appareil militaire, marquée par des changements dans les postes de commandement, un repositionnement des systèmes de défense, et une volonté de recentraliser le commandement stratégique.
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Dr. Lashin souligne que le Conseil inclut toutes les figures majeures de la hiérarchie militaire iranienne. L’une de ses fonctions implicites serait de contenir l’influence croissante du Corps des Gardiens de la Révolution, dont le poids politique s’est fortement accentué, surtout après le dernier conflit avec Israël. Ce poids s’est traduit par des prises de position publiques influentes, comme celles du ministre des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, qui a reconnu que la décision de poursuivre les frappes contre Israël avait été tranchée en faveur des militaires.
L’instauration du Conseil reflète également les tensions internes, notamment les rivalités entre réformateurs, conservateurs et ultra-conservateurs. L’arrivée d’Ali Larijani, personnalité proche du Guide suprême mais modérée dans son approche, à la tête du Conseil suprême de sécurité nationale, illustre une volonté d’équilibrer les influences dans un contexte de transition politique post-Raisi.
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De plus, l’activation de ce Conseil intervient dans une période de spéculations sur la succession potentielle du Guide suprême, accentuée par les conséquences politiques et militaires de la guerre récente. Le Conseil pourrait alors jouer un rôle de stabilisateur institutionnel.
Enfin, selon l’expert Ahmad Farouk, la mise en place du Conseil s’inscrit dans trois dynamiques : une réponse aux déficiences révélées durant la guerre avec Israël, une tentative de désengagement de la politisation des décisions militaires, et une anticipation de la transition post-Khamenei. L’identité du président effectif du Conseil reste toutefois floue, bien que la Constitution prévoie qu’il soit dirigé par le président iranien. En pratique, certaines sources avancent qu’Ali Akbar Ahmadian, ancien secrétaire du Conseil de sécurité nationale, pourrait en assumer la direction.