La légitimité de Khatumo déclenche un différend entre Puntland et Mogadiscio… avec un dialogue soumis à conditions

D’un « franchissement grave des lignes rouges » à « un État fédéral légitime dont l’existence ne saurait être remise en cause », les positions sont irréconciliables entre la région du Puntland et celle de Khatumo, après l’intégration officielle de cette dernière dans le système fédéral en vigueur en Somalie.
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Alors que Puntland a rejeté catégoriquement la décision du gouvernement fédéral de reconnaître l’administration de Khatumo comme entité officielle au sein de la structure politique nationale, qualifiant cette démarche de « dépourvue de toute base juridique ou constitutionnelle » et de « dépassement grave des lignes rouges », l’administration de Khatumo a rétorqué que la déclaration de Puntland était « regrettable et contraire à l’esprit du système fédéral somalien ».
Équilibres politiques fragiles
Puntland a accusé Mogadiscio de « violer les équilibres politiques et de compromettre le principe de concertation fédérale », à un moment où les tensions entre le pouvoir central et les régions autonomes ne cessent de s’accentuer.
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Cette position ferme a été exprimée dans un communiqué du ministère de l’Intérieur de Puntland, avertissant que « toute tentative d’imposer une nouvelle administration dans ses zones historiques représente une menace directe à la stabilité régionale et une opportunité pour des groupes extrémistes comme Al-Shabaab ou Daech de se renforcer ».
Le communiqué souligne que « les régions de Khatumo, englobant des parties des régions de Sool et Sanaag, font intégralement partie du Puntland depuis sa fondation en 1998 », ajoutant que le clan Dulbahante, majoritaire dans ces zones, est l’un des piliers historiques de la fondation de Puntland.
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Malgré ces tensions, Puntland a laissé la porte ouverte à un dialogue conditionné, appelant à la tenue d’une conférence consultative élargie incluant les anciens et intellectuels du clan Dulbahante, afin de parvenir à un consensus interne sur l’avenir de la région. Cependant, la condition essentielle demeure le respect des procédures juridiques et constitutionnelles internes avant la formation de toute nouvelle entité administrative.
Réponse de Khatumo
De son côté, l’administration de Khatumo a répondu par la voix de son vice-président, Mohamed Ismail Shini, déclarant que « Khatumo est désormais un État fédéral légitime, dont l’existence ne peut être remise en question », qualifiant la réaction de Puntland de « malheureuse et contraire à l’esprit du fédéralisme somalien ».
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Ces développements surviennent à la suite de l’ouverture d’une conférence élargie à Las Anod, capitale administrative de la région de Sool, réunissant des représentants du gouvernement fédéral, des figures politiques de premier plan ainsi que des délégations tribales et civiles locales. L’objectif affiché était de parachever les arrangements politiques et administratifs nécessaires à la transformation de Khatumo, d’une administration provisoire à une entité fédérale pleinement intégrée dans le système somalien.
Racines du conflit
Le différend entre Puntland et Khatumo n’est pas nouveau ; il s’inscrit dans un débat ancien sur la légitimité de la représentation politique et l’appartenance administrative des zones frontalières stratégiques du nord-est de la Somalie.
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Puntland se réfère à sa constitution de 1998, qui inclut les régions de Sool et Cayn dans ses frontières officielles, tandis que l’administration de Khatumo revendique que les dynamiques sociales actuelles et les aspirations locales justifient une représentation indépendante.
Puntland considère ces territoires comme faisant partie intégrante de sa profondeur stratégique, avertissant que toute tentative de modification sans consultation des populations et de leurs chefs traditionnels risquerait d’ouvrir la voie à un vide sécuritaire et politique, particulièrement dans un contexte d’affaiblissement des institutions centrales.
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Une bataille pour la reconnaissance
Plus tôt cette année, le gouvernement fédéral somalien avait annoncé son intention d’aller de l’avant dans la reconnaissance de Khatumo comme État membre du système fédéral, ce qui a contribué à une escalade des tensions avec Puntland. Ce dernier voit dans cette décision une tentative de redessiner la carte géopolitique du nord-est, mettant en péril son influence et l’équilibre fragile entre les clans.
Des observateurs du dossier somalien estiment que, faute de mécanismes clairs et consensuels pour la création des États fédérés, et face à la fermeté des positions de chaque camp, les solutions dépendront de la capacité du gouvernement central à jouer un rôle de médiateur neutre et à encourager un dialogue véritable, sans être perçu comme partial.
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La poursuite de ce conflit sans issue claire menace de saper la confiance entre les entités fédérales et Mogadiscio, tout en compromettant les efforts sécuritaires dans des régions toujours vulnérables à l’extrémisme armé, selon ces mêmes observateurs.