Grand Maghreb

Le retour des déploiements militaires à Tripoli fait craindre de nouveaux affrontements


La Mission d’appui des Nations unies en Libye (MANUL) a mis en garde contre les conséquences d’une escalade militaire dans la capitale, appelant toutes les parties à s’abstenir de toute action ou discours susceptible d’aggraver les tensions, et à un retrait immédiat des forces récemment déployées.

Tripoli vit sous tension depuis plusieurs jours, sur fond de mouvements militaires accélérés dans plusieurs de ses quartiers. Cette situation fait suite à un discours menaçant prononcé par le chef du gouvernement d’union nationale, Abdelhamid Dbeibah, dans lequel il a brandi la menace d’une réponse armée contre ses opposants, y compris certains groupes armés qui étaient auparavant alliés à son gouvernement, et ce malgré un accord visant à éloigner les forces militaires des zones résidentielles de la capitale.

Malgré les efforts locaux et internationaux entrepris ces derniers mois pour contenir les tensions, le spectre d’un affrontement armé refait surface, suscitant de réelles inquiétudes quant à un possible retour de la violence entre factions rivales à Tripoli.

L’escalade a été déclenchée par un discours controversé de Dbeibah, dans lequel il accusait certaines « milices irrégulières » locales de préparer un coup d’État armé, avec des équipements militaires plus avancés que ceux dont disposent les forces gouvernementales. Il a menacé de lancer une « campagne de sécurité globale » contre ces groupes, les appelant à se soumettre à l’autorité centrale.

Peu après ce discours, des sources de sécurité ont signalé des mouvements inhabituels de troupes dans la capitale, avec le déploiement de blindés et la création de nouveaux points de contrôle, notamment dans les quartiers de Salah Eddine, Ain Zara et la route de l’aéroport.

Dans un communiqué publié mercredi, la MANUL a exprimé son inquiétude et appelé « toutes les parties à s’abstenir de toute action ou rhétorique qui pourrait aggraver les tensions », exigeant un « retrait immédiat » des unités récemment déployées. La mission onusienne a souligné poursuivre ses efforts pour préserver le calme, protéger les civils et encourager les responsables politiques et militaires à s’engager de bonne foi dans un processus de désescalade, affirmant que « la poursuite des déploiements militaires menace la sécurité de la capitale et la stabilité du pays ».

Cette détérioration intervient dans un contexte de grogne politique et sociale croissante, marquée par la dégradation des conditions économiques, l’absence d’élections et une insécurité persistante. De nombreux Libyens appellent désormais au départ de Dbeibah, qu’ils accusent d’inefficacité et de blocage du processus politique.

Certains observateurs estiment que cette démonstration de force vise autant les milices que les adversaires politiques, dans une tentative de détourner l’attention des appels croissants à sa destitution et d’éviter l’ouverture d’un dialogue pouvant déboucher sur un remaniement gouvernemental.

Le paysage politique libyen reste profondément fragmenté, avec une paralysie des institutions entre l’Est et l’Ouest du pays. Les puissances étrangères, dont l’ONU et l’Union européenne, ont à plusieurs reprises mis en garde contre le risque d’un retour à la guerre civile.

Des défenseurs des droits humains alertent sur le fait qu’une reprise des combats pourrait réactiver les scénarios de violence vécus récemment, lorsque des affrontements entre deux forces puissantes à l’ouest du pays avaient fait huit morts civils et de lourds dégâts matériels.

D’autres analystes estiment que l’actuelle mobilisation militaire ne répond pas à une menace réelle, mais illustre une volonté de Dbeibah de réaffirmer son autorité par la force, face à une perte de soutien populaire et à l’érosion de sa légitimité internationale.

Tripoli avait pourtant connu une période de relative stabilité après un accord entre le gouvernement d’union et le Conseil présidentiel visant à éloigner les groupes armés des institutions souveraines et à unifier les centres de commandement sécuritaires. Mais le retour des tensions compromet cet équilibre fragile et met en péril les espoirs d’une reprise du dialogue national et d’un climat propice à l’organisation tant attendue des élections.

Afficher plus

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page