Politique

Le Togo face au terrorisme : d’une zone de transit à une base d’opérations ?


Le terrorisme dépasse désormais les bastions traditionnels du Sahel africain pour s’étendre vers le Togo, voisin vulnérable que des analystes redoutent de voir évoluer d’une simple zone de passage à une base d’opérations.

Profitant de l’instabilité sécuritaire et politique au Mali et au Burkina Faso, les groupes terroristes, notamment Al-Qaïda, ont étendu leurs attaques au Togo, devenu une cible régulière. L’État islamique, rival d’Al-Qaïda, n’a pas manqué l’opportunité d’élargir lui aussi son champ d’action, menant une lutte d’influence dans la région du Sahel et du Sahara.

Une progression manifeste

Un rapport récent de la Fondation Konrad Adenauer met en lumière la situation sécuritaire dans l’extrême nord du Togo, tout en évoquant également le Bénin voisin. Depuis plusieurs années, les pays côtiers subissent la pression du terrorisme issu du Sahel. Le rapport signale des progrès « évidents » des groupes armés au Bénin et au Togo, accentuant l’instabilité.

Matthias Klafkawi, conseiller togolais indépendant et auteur du rapport, précise à RFI que la région de Kpendjal, jadis surnommée « le grenier de la savane », est la plus touchée par l’insécurité. Il note que la fréquence des attaques a paralysé l’activité économique locale : les habitants redoutent de sortir travailler, l’offre diminue, les prix montent, et la frustration sociale croît.

Les échanges commerciaux avec le Burkina Faso sont également affectés. Le transport de marchandises, principalement par voie terrestre, est devenu risqué. Les chauffeurs de camions doivent choisir entre emprunter des routes dangereuses ou s’engager sur des chemins plus longs et non aménagés, engendrant des coûts supplémentaires.

Depuis 2022, les attaques au nord du Togo se sont multipliées, avec une première attaque sur une position militaire en mai 2022 dans la région des Savanes. L’intervalle entre les incidents n’excède souvent que quelques semaines, signe d’un ciblage intensif.

Les zones touchées ne se limitent plus aux frontières : les opérations terroristes ont progressé jusqu’à Bourgou, village situé entre Dapaong et Mandouri, où des éléments du groupe affilié à Al-Qaïda, Jama’at Nasr al-Islam wal Muslimin, seraient désormais implantés.

Malgré le déploiement de l’opération militaire « Koundjouaré » et le plan d’urgence pour la région des Savanes depuis 2018, la menace terroriste s’est enracinée de manière lente mais méthodique, bouleversant la vie des habitants et affectant l’économie locale, en particulier l’agriculture.

Le Sahel, nouvel épicentre du terrorisme mondial

Selon l’Indice mondial du terrorisme, la région du Sahel reste pour la deuxième année consécutive l’épicentre du terrorisme dans le monde. En 2024, sur les 7 555 victimes du terrorisme recensées à l’échelle mondiale, 3 885 – soit 51 % – ont été enregistrées dans cette région.

L’étude, réalisée par l’Institut pour l’économie et la paix (IEP) basé à Sydney, révèle que cinq des dix pays les plus touchés par le terrorisme en 2024 sont situés dans la région sahélienne. Le Burkina Faso, le Mali et le Niger restent parmi les plus exposés depuis 2017.

L’indice souligne ainsi un déplacement du centre géographique du terrorisme du Moyen-Orient vers le Sahel. La majorité des attaques y sont imputées au groupe Jama’at Nasr al-Islam wal Muslimin (lié à Al-Qaïda) ou à des groupes affiliés à l’État islamique dans la région.

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