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Les Frères musulmans perdent leurs bases en Jordanie : la sécurité prend le pas sur la politique dans le démantèlement de l’organisation


Le mouvement des Frères musulmans, classé organisation terroriste, traverse l’une de ses pires phases politiques et organisationnelles en Jordanie, après avoir subi une lourde défaite aux élections du syndicat des médecins. Cela intervient alors que les répercussions du “complot terroriste” impliquant des membres du groupe continuent de susciter de fortes réactions sur les plans sécuritaire et populaire.

Les résultats annoncés ont été sévères : les candidats du courant islamiste n’ont obtenu que deux sièges sur les douze du conseil du syndicat, tandis que leur principal candidat a perdu la présidence, dans l’un des syndicats professionnels les plus prestigieux et influents.

Cette défaite est perçue par de nombreux observateurs comme un reflet direct de l’indignation populaire après le démantèlement d’une cellule jugée “dangereuse”, composée d’individus liés aux Frères musulmans et planifiant des attaques sur le territoire jordanien.

Un moment critique et une chute fracassante

Cette défaite ne constitue pas un simple revers électoral, mais survient à un moment critique qui traduit le recul de l’influence qu’exerçait le mouvement depuis des décennies au sein des cercles syndicaux jordaniens. Ce recul s’est accentué après la déclaration des services généraux de renseignement, annonçant l’arrestation de 16 membres impliqués dans un complot terroriste. Ce plan comprenait la fabrication de roquettes artisanales, l’importation de composants de l’étranger, le développement de drones et le stockage d’armes dans des caches secrètes.

Selon des sources sécuritaires jordaniennes, les accusés ont reçu des formations dans des pays comme le Liban, et prévoyaient de lancer des attaques contre des installations vitales du royaume.

Les enquêtes ont révélé des liens idéologiques et organisationnels entre certains membres de la cellule et le mouvement des Frères musulmans, incitant de nombreux Jordaniens à exiger des mesures juridiques fermes à l’encontre du groupe.

Répercussions populaires et professionnelles

La rue jordanienne n’est pas restée silencieuse. La réaction populaire face à cette affaire a dépassé le cadre de l’analyse politique pour se transformer en appels à interdire l’organisation et à sanctionner toute personne impliquée dans des actes de déstabilisation. Au sein des cercles syndicaux, les élections des médecins ont constitué un premier test réel, et les résultats ont clairement démontré un changement dans l’opinion publique.

Les autorités ont annoncé que les affaires liées au complot terroriste ont été déférées à la Cour de sûreté de l’État, tout en affirmant que le royaume ne tolérera aucune atteinte à sa sécurité, qu’elle vienne de l’intérieur ou de l’extérieur.

Des médias locaux ont rapporté qu’une révision du statut juridique des Frères musulmans est à l’étude, à la lumière des accusations croissantes les reliant à des activités menaçant la sécurité nationale.

Un tournant historique

Ce qui s’est produit ne semble pas être un incident isolé, mais plutôt un tournant dans la relation entre l’État jordanien et le mouvement. La défaite électorale, l’érosion de leur popularité et l’accumulation des dossiers sécuritaires annoncent le début d’une nouvelle phase placée sous le signe de la “tolérance zéro”.

Le politologue jordanien Raja Taleb affirme que la situation actuelle en Jordanie s’inscrit dans un cadre régional plus large de déclin du mouvement, qui a perdu sa légitimité morale avant de perdre son poids populaire, étant désormais associée, dans la conscience collective, aux mouvements extrémistes et aux complots déstabilisateurs.

Il ajoute que si autrefois le mouvement s’appuyait sur un discours victimaire et caritatif, la répétition de l’implication de ses membres dans des affaires de sabotage, et leur implication directe dans des dossiers sécuritaires, comme c’est le cas en Jordanie, ont provoqué une chute sans précédent de leur soutien populaire. Cette perte est politique, mais aussi psychologique et symbolique.

C’est la première fois que le mouvement échoue à imposer son autorité dans les cercles syndicaux jordaniens, révélant ainsi l’érosion de son discours et de sa base traditionnelle. Comme en Égypte, en Tunisie et au Maroc, les Frères musulmans paient aujourd’hui en Jordanie le prix de leur double discours et de leurs connexions transnationales. La rue arabe ne tolère plus les mouvements qui cherchent le pouvoir au détriment de la stabilité des États.

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