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11 ans après le démantèlement du sit-in : L’anniversaire de « Rabia » approfondit les divisions au sein des Frères musulmans


Le 11e anniversaire du démantèlement du sit-in des Frères musulmans, qualifiés d’organisation terroriste, sur la place Rabia à l’est du Caire, coïncide avec des conflits organisationnels et politiques persistants entre les factions rivales du mouvement.

Le 14 août 2013, les forces armées et la police égyptiennes ont mis fin au sit-in armé des Frères musulmans sur la place Rabia-El-Adaouïa, dans le quartier de Madinat Nasr à l’est du Caire, mettant fin à 55 jours de discours de terreur qui émanaient des plateformes des sit-ins de Nahda à Gizeh (ouest du Caire) et de Rabia-El-Adaouïa.

En août de cette année, les divergences entre les factions du mouvement se sont intensifiées, et plusieurs cadres ont critiqué la gestion du mouvement depuis 2013, appelant à l’élection d’un nouveau guide en remplacement de l’actuel Mohamed Badie, emprisonné en Égypte. D’autres membres ont demandé aux factions rivales de se concentrer sur la libération des prisonniers du mouvement, tandis que certains ont critiqué les dirigeants pour leur enrichissement à travers leurs postes au sein de l’organisation.

Appels à l’élection d’un nouveau guide

Les divergences se sont également reflétées dans la couverture médiatique des plateformes du mouvement à l’occasion de l’anniversaire de « Rabia ». Deux des trois grandes factions (Istanbul et le Bureau général) ont commémoré l’événement dès la deuxième semaine d’août, tandis que la troisième faction (Londres/Salah Abdelhaq) a tardé à réagir et n’a publié aucun communiqué avant le 14 août, contrairement aux années précédentes.

Le chef du bureau politique de cette dernière faction, Helmi al-Jazzar, après dix mois de silence, a publié un post sur son compte officiel sur la plateforme « X », dédié à l’anniversaire de la mort d’Essam El-Erian, un dirigeant des Frères musulmans décédé le 13 août 2020, sans mentionner l’anniversaire de « Rabia », habituellement une occasion pour le mouvement d’attaquer le gouvernement égyptien.

Le guide par intérim de la faction d’Istanbul, Mahmoud Hussein, a consacré son message hebdomadaire aux membres du mouvement à l’anniversaire de la dispersion, intitulé « Rabia, symbole de bravoure et de sacrifice », comparant cet événement à la guerre en cours à Gaza. En revanche, le guide par intérim de la faction de Londres, Salah Abdelhaq, a intitulé son message « Les principes et méthodes du changement dans la vision du mouvement ».

Conflits sur la stratégie politique

Ces différences de position ne sont pas de simples divergences, mais illustrent l’approfondissement des divisions organisationnelles au sein du mouvement, chaque faction adoptant une approche politique différente. La faction d’Istanbul maintient une position hostile au gouvernement égyptien, tandis que la faction de Londres envisage une réconciliation avec le régime égyptien, en échange d’un retour à la vie politique, une offre que Le Caire a rejetée à plusieurs reprises.

Divisions sur la ligne politique

Ces divergences politiques sont apparues parallèlement à la scission du mouvement en différentes factions, après l’arrestation du guide intérimaire Mahmoud Ezzat en août 2020. La faction d’Istanbul accuse celle de Londres de tenter de mettre en œuvre un projet inspiré de l’ex-membre du bureau exécutif Abdel Moneim Abou El-Fotouh pour saper les fondements du mouvement. Un document attribué à la faction de Londres, et publié par des sites liés à la faction d’Istanbul, confirme ces accusations.

La faction de Londres estime que les Frères musulmans traversent une période difficile depuis 2013, nécessitant une « manœuvre tactique » pour permettre au mouvement de retrouver sa place sur la scène politique. Cette stratégie se traduit par la décision de renoncer à toute compétition politique, annoncée dans un document politique il y a deux ans.

Le projet politique de la faction de Londres/Salah Abdelhaq se concentre sur la libération des prisonniers et sur une réconciliation avec les forces politiques en Égypte. Helmi al-Jazzar, chef du bureau politique de cette faction, est l’un des principaux promoteurs de ce projet, perçu par certains comme une extension des idées d’Abdel Moneim Abou El-Fotouh, ce qui aggrave les divisions au sein du mouvement.

De leur côté, les dirigeants de la faction d’Istanbul estiment que ce projet est une tentative de renverser l’ancien projet du mouvement, sans offrir de gains concrets, surtout que les autorités égyptiennes rejettent toute idée de réintégration des Frères musulmans dans le paysage politique.

Occupations des cadres du mouvement

La gravité des divergences entre les factions des Frères musulmans témoigne de la volonté des dirigeants d’occuper leurs cadres avec des discussions secondaires sur des questions comme l’évaluation de la performance du mouvement, pour détourner l’attention des critiques sur la gestion interne.

Cependant, la persistance de ces divisions a conduit de nombreux cadres à critiquer les dirigeants des trois factions, les accusant de nuire au mouvement. Ils ont également dénoncé la corruption au sein des institutions du mouvement, tolérée par ceux qui en tirent profit.

Bien que la direction du mouvement ait maintenu la même ligne à l’occasion du 11e anniversaire du démantèlement du sit-in de Rabia, les divisions internes et la répétition des mêmes messages ont conduit à une perte d’intérêt chez les membres, certains appelant à des élections pour choisir de nouveaux dirigeants.

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